Favorisée par l’absence d’infrastructures électriques adéquates, l’Afrique devient le terrain de jeu des innovations les plus agiles. L’adoption de solutions solaires transforme actuellement des millions de vies. Mais cette mutation reste fragile, au regard de diverses contraintes qui persistent.
L’Afrique demeure l’épicentre de la pauvreté énergétique mondiale. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), sur les 730 millions de personnes qui n’avaient toujours pas accès à l’électricité dans le monde, la grande majorité se trouvait en Afrique subsaharienne. Le groupe de la Banque africaine de développement (BAD) évoque plus de 600 millions d’Africains, soit environ la moitié de la population du continent. « Pour ces personnes, la vie quotidienne est un combat éclairé par la faible lueur des lampes à pétrole ou le ronronnement intermittent des groupes électrogènes au diesel. Ces solutions palliatives sont non seulement coûteuses, mais aussi polluantes, perpétuant un cycle de pauvreté et de dégradation de l’environnement. Au rythme actuel de l’électrification et avec la croissance démographique rapide de l’Afrique, le nombre de personnes privées d’électricité restera largement inchangé si nous ne prenons pas des mesures audacieuses et immédiates », déplore la BAD. Compte tenu des enjeux de productivité, d’éducation et de santé sur le continent, l’électrification décentralisée par le solaire est devenue plus stratégique que jamais, d’après l’AIE.
Bien que le Groupe de la Banque mondiale et la Banque africaine de développement se soient associés pour favoriser l’accès de 300 millions de personnes à l’électricité en Afrique d’ici 2030 dans le cadre de l’initiative « Mission 300 », la Banque mondiale reconnaît que l’énergie solaire hors réseau est le moyen le plus rapide et le plus rentable d’alimenter 41 % des personnes dans le monde vivant sans accès à l’énergie d’ici 2030. Cette solution a desservi 561 millions de personnes en 2023 et assuré 55 % des nouveaux raccordements en Afrique subsaharienne entre 2020 et 2022. Par rapport au raccordement au réseau ou au mini-réseau, le solaire hors réseau est une solution moins coûteuse, qui peut être mise en œuvre plus rapidement pour répondre aux niveaux de demande actuels, soutient la Banque mondiale.
Le solaire transforme des vies
Aujourd’hui, face aux défis que rencontrent les réseaux électriques nationaux (faible couverture, capacités limitées, vétusté des équipements, cherté des tarifs), les solutions solaires hors réseau créent une valeur économique mesurable. Dans son rapport « Off-Grid Solar Market Trends Report 2024 », la Banque mondiale estime que les générateurs fournissent près de 9 % de l’électricité en Afrique subsaharienne, ce qui coûte aux ménages entre 28 et 50 milliards de dollars par an en carburant, auxquels s’ajoutent 10 à 20 % supplémentaires en frais d’entretien. Les kits et appareils solaires réduisent les coûts énergétiques des ménages, prolongent les heures d’activité des commerces, sécurisent la chaîne du froid et augmentent les revenus des petites entreprises. L’électricité change la vie : elle offre de la lumière pour étudier, de la ventilation et de la réfrigération pour la santé et l’alimentation, l’information via la radio ou la télévision éducative, et une sécurité accrue la nuit. Les pompes solaires renforcent la résilience face aux sécheresses et soutiennent la productivité agricole, tandis que la réfrigération réduit les pertes post-récolte et permet une meilleure conservation des vaccins et médicaments dans les centres de santé. Le Programme d’aide à la gestion du secteur énergétique (ESMAP) indique que ses analyses montrent que ces « usages productifs » se diffusent rapidement dans les chaînes de valeur locales (agroalimentaire, artisanat, services).
« Les systèmes solaires hors réseau permettent aux ménages, aux entreprises et aux agriculteurs d’utiliser l’électricité de manière productive et de générer des revenus. Dans une enquête menée auprès de plus de 79 000 clients hors réseau dans 31 pays, 86 % des utilisateurs de pompes à eau solaires ont vu leur productivité augmenter et 60 % ont étendu leurs surfaces cultivées, ce qui a entraîné une augmentation des revenus pour 88 % d’entre eux. De même, 88 % des réfrigérateurs ont été utilisés à des fins productives, 81 % des utilisateurs déclarant une amélioration de leur qualité de vie. En 2023, plus de 3 millions de personnes utilisaient leur système solaire domestique pour gérer une entreprise », explique l’ESMAP. Le modèle de financement Pay-as-you-go (PAYGo), ou paiement à l’usage, a fortement contribué à l’expansion du secteur de l’énergie solaire hors réseau (OGS), notamment en Afrique subsaharienne. Le client verse un acompte initial, entre en possession de l’équipement solaire, puis continue à verser des paiements réguliers sur une période donnée jusqu’au solde total. Les paiements sont généralement effectués via Mobile Money (argent mobile), un canal largement disponible en Afrique subsaharienne, bien que d’autres méthodes incluent les cartes à gratter, du crédit de communication et le paiement en espèces.
Au cœur de cette nouvelle manière d’apporter de l’électricité à un prix abordable à des millions d’Africains, on trouve une diversité d’acteurs de terrain qui ont vu le potentiel transformateur du solaire en Afrique et se mobilisent.
Un secteur privé engagé
Entre 2018 et 2024, les start-up spécialisées dans le solaire hors réseau se sont renforcées en Afrique, consolidant l’accès du continent à l’électricité. Bien que le financement capté par ces entreprises soit passé de 194 millions de dollars à 192 millions de dollars en 2024, après avoir atteint 425 millions de dollars en 2023, le dynamisme du secteur ne s’est toutefois pas émoussé. Sun King fait partie des nombreuses start-up qui s’illustrent en Afrique au cours des dernières années. La société, qui revendique la fourniture d’énergie solaire à 30 % des ménages kenyans grâce à ses produits, a signé en juillet 2024 un accord de titrisation de 156 millions de dollars avec ABSA, Citi, The Co-operative Bank of Kenya, KCB Bank et Stanbic Bank Kenya. Cet accord s’ajoute à celui de 130 millions de dollars effectué en 2023 pour permettre la fourniture de 3,7 millions de produits solaires au Kenya. De son côté, Bboxx s’est consolidé au fil des cinq dernières années. En acquérant PEG en 2022, la société a étendu son empreinte en Côte d’Ivoire, au Ghana et au Mali. Sa présence dans une dizaine de pays lui permet de fournir ses produits solaires à plus de 2,5 millions de personnes.
Même le groupe télécoms Orange a fait de l’énergie solaire hors réseau une priorité stratégique. Il faut dire qu’en favorisant l’accès à l’énergie, la société soutient aussi l’accès à ses offres Internet mobile et Mobile Money. À travers Orange Energies, l’opérateur revendiquait plus de 600 000 foyers connectés en 2024, soit près de 4 millions de personnes avec accès à l’énergie dans 13 pays. Avec un positionnement de partenaire de tous les producteurs d’énergie, Orange Energies a développé une plateforme IoT, Orange Smart Energies, qui permet le PAYGo et le smart metering. Ainsi, Orange peut collaborer avec l’ensemble des producteurs d’énergie, qu’ils soient vendeurs de kits solaires, opérateurs nationaux d’électricité (utilities) ou constructeurs de mini-réseaux. En ajoutant la brique digitale, Orange Energies offre la possibilité à tous les ménages de prépayer leur énergie à leur rythme, en fonction de leurs revenus. En collaboration avec ses partenaires comme Koolboks, Biolite, Sun King, Solar Run, Orange Energies propose une diversité de produits tels que des panneaux solaires, des batteries intelligentes pour stocker l’électricité et optimiser la consommation, des lampes LED, des prises USB et des accessoires adaptés aux besoins des ménages ruraux, avec un catalogue de matériels variés allant du ventilateur au congélateur, en passant par la télévision et la radio.
L’expertise d’Orange Energies dans l’électrification solaire va plus loin et lui a valu la reconnaissance d’organisations internationales et locales. En juin 2024, la société a remporté un appel d’offres de l’AFD de 150 000 euros pour accélérer l’électrification rurale de plus de 400 localités en Côte d’Ivoire, dans le cadre du projet MAX, financé par l’Union européenne et mis en œuvre par Expertise France. En septembre 2024, la Banque mondiale et la GIZ lui ont confié un contrat de 360 000 dollars pour équiper 8000 foyers hors réseau en solutions solaires autonomes au plus tard en juin 2025, dans des zones prioritaires identifiées par la Banque mondiale au Liberia. Orange Energies a également signé un partenariat public-privé avec l’État guinéen (Agence Guinéenne d’Électrification Rurale – AGER) et le développeur de mini-réseaux IPT PowerTech pour la construction d’un mini-réseau ABC qui va alimenter six localités en électricité : Kalenko, Siguiri, Yèndè Milimou, Nongoa, Ouendé Kènèma et Fangamandou, avec un modèle de prépaiement connecté pour les clients.
En clair : le solaire hors réseau en Afrique n’est plus une expérimentation. C’est un secteur industriel, financier et social, qui électrifie, crée des revenus et redessine le quotidien. Pour que cette promesse dure, plusieurs défis doivent être traités de front.
Des risques persistent toutefois
Le marché seul ne suffira pas à électrifier l’Afrique rurale. Pour atteindre les ménages les plus pauvres et les zones les plus difficiles, il faut de l’argent public — subventions directes, garanties, financements concessionnels. Les estimations du secteur indiquent qu’il faudrait environ 3,6 milliards de dollars par an jusqu’en 2030 pour électrifier, via le solaire hors réseau, les centaines de millions de personnes pour lesquelles c’est la solution la moins coûteuse. Environ 40 % de cette somme devrait être sous forme de subventions ciblées, pour abaisser le prix final dans les zones les plus reculées et les contextes fragiles et touchés par les conflits. Il reste à mobiliser ces fonds.
Le modèle de paiement progressif (PAYGo), bien qu’il permette d’étaler le coût d’un kit solaire, se heurte de plein fouet à l’extrême pauvreté. Seule une minorité de ménages ruraux est en mesure de supporter une mensualité, même modeste. La facture s’alourdit dans les zones reculées ou en proie aux conflits, où les surcoûts logistiques peuvent augmenter le prix final de 57 %. Ainsi, seulement 22 % des ménages non raccordés à l’électricité dans le monde peuvent assumer le remboursement mensuel d’un kit solaire via PAYGo — un taux qui chute à 16 % en Afrique subsaharienne. Confrontés à cette barrière financière, de nombreux foyers se rabattent encore sur des solutions de court terme (bougies, lampes à pétrole, groupes électrogènes partagés), dont le coût à long terme s’avère pourtant plus élevé.
Cette précarité des ménages affecte directement la santé financière des entreprises et met en péril leur pérennité. Le taux de recouvrement des paiements PAYGo stagne autour de 62 %, et un client sur quatre rencontre des difficultés de paiement. Par ailleurs, la plupart des start-up solaires s’endettent en devises étrangères (dollars ou euros) mais sont remboursées en monnaie locale, ce qui les expose à un risque de change important.
À ces défis s’ajoutent l’inflation et l’effondrement de certaines monnaies locales, qui entraînent des hausses de prix. Au Nigeria, par exemple, le coût de lanternes solaires de base a augmenté de 91 % à 300 % en monnaie locale en 2023, annulant les baisses de prix des composants sur les marchés internationaux.
Enfin, la dépendance aux importations et l’absence de filière locale posent un défi structurel. Sans assemblage local, sans réseau de maintenance fiable et sans accès à des pièces détachées abordables, les systèmes tombent fréquemment en panne, et les foyers se retrouvent de nouveau privés d’électricité. La prolifération de produits solaires bas de gamme — représentant près de 70 % des ventes — sape la confiance des consommateurs. Le manque de compétences techniques pour l’installation, la maintenance et le dépannage, en particulier dans les zones isolées, complète cette liste d’obstacles qui entrave le déploiement massif des solutions solaires hors réseau.
Muriel EDJO
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La ville de Dakhla (région Dakhla-Oued Eddahab) va accueillir un data center alimenté par des énergies renouvelables et un Institut Jazari consacré à l’intelligence artificielle et à la transition énergétique. Deux partenariats ont été signés le vendredi 15 novembre entre Amal El Fallah Seghrouchni, ministre de la Transition numérique et de la Réforme de l’administration, Leila Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, et les autorités de la région.
Le premier accord vise la création du data center « Igoudar Dakhla », de nouvelle génération, avec des capacités d’hébergement, de stockage et de traitement de données pour des besoins nationaux et internationaux. Le projet repose sur des infrastructures cloud avancées, des compétences numériques locales et des solutions de refroidissement naturel, permettant de réduire la consommation énergétique. Avec une capacité annoncée de 500 mégawatts, il sera entièrement alimenté par une ferme solaire et éolienne, dans le cadre de l’initiative Digital for Sustainable Development (D4SD).
Le second accord concerne la création de l’Institut Jazari de l’intelligence artificielle et de la transition énergétique, un institut dédié à la formation, à la recherche et à l’innovation dans les domaines de l’IA, de l’Internet des objets et de leurs applications énergétiques. Il proposera des plateformes de recherche et d’expérimentation, un accompagnement pour les start-up et impliquera des étudiants et des chercheurs dans des projets appliqués sur les énergies renouvelables, le dessalement, l’hydrogène vert et les réseaux électriques intelligents.
Ces initiatives s’inscrivent dans le développement intégré de la région Dakhla-Oued Eddahab, visant à positionner le Maroc comme un hub numérique arabo-africain et à renforcer sa connectivité internationale, en particulier à l’approche de la Coupe du monde 2030. Elles mettent également l’innovation et le capital humain au cœur de la stratégie numérique et énergétique du royaume.
Sur le plan économique, ce data center s’inscrit dans un marché en forte croissance. Le marché marocain des centres de données devrait générer 766,81 millions USD en 2025, selon Statista, avec une progression annuelle estimée à 6,35 % entre 2025 et 2030, pour atteindre environ 1,04 milliard USD. De plus, le royaume représenterait 35 % de la nouvelle capacité énergétique prévue pour les data centers en Afrique, selon ResearchAndMarkets.
La mise en œuvre de ces projets devrait permettre au Maroc de renforcer sa souveraineté numérique, de stimuler la création d’emplois qualifiés dans le secteur technologique et de soutenir le développement d’une chaîne de valeur régionale autour du cloud, de l’intelligence artificielle et de la cybersécurité.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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La start-up nigériane Rana Energy a levé 3 millions $ en pré-amorçage pour développer sa plateforme d’énergie propre alimentée par l’intelligence artificielle. Soutenue par Techstars, EchoVC Eco et FSDH Asset Management, elle gère un réseau solaire virtuel permettant aux entreprises de réduire leurs coûts et leur dépendance au diesel, avec une expansion prévue au Ghana et en Zambie.
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Le secteur des télécommunications fait partie des plus gros consommateurs d’énergie, majoritairement issue de sources fossiles. Face à cette réalité, les opérateurs cherchent activement des alternatives plus durables afin de réduire leur impact environnemental.
Orange Moyen-Orient et Afrique (OMEA) a solarisé plus de 12 000 sites en 2024, soit une hausse de plus de 50 % par rapport à 2023, selon son rapport de responsabilité sociétale « Cultiver l’impact ». Désormais, 25 % des installations de l’entreprise dans la zone sont alimentées par l’énergie solaire. L'opérateur se positionne ainsi pour atteindre son objectif Net Zéro Carbone d’ici 2040, grâce à des investissements massifs dans les énergies renouvelables et l’économie circulaire.
« Chez OMEA, nous nous engageons à développer un numérique responsable, inclusif et durable, en utilisant pour la satisfaction de nos besoins un maximum d’énergies renouvelables et en incitant nos fournisseurs à en faire de même », déclare la société dans son rapport.
Cette stratégie de solarisation a permis à l’entreprise d’économiser plus de 35 millions de litres de carburant et d’éviter l’émission de plus de 80 000 tonnes de CO₂ équivalent (CO₂éq.) Par ailleurs, la part d’énergie renouvelable dans la consommation globale d’OMEA atteint désormais 35,6 %, soit une progression de plus de 4 points par rapport à 2023.
Dans le cadre de son objectif climatique, Orange s’est engagé à réduire de 90 % ses émissions de CO₂éq. sur l’ensemble de ses activités. Cela inclut les émissions directes, liées à l’usage d’énergies fossiles, et les émissions indirectes, issues de la consommation d’électricité et de l’ensemble de la chaîne de valeur, fournisseurs comme clients. Les 10 % d’émissions résiduelles seront compensés par des projets de séquestration via des puits de carbone naturels, notamment par la restauration et la protection d’écosystèmes.
Mais au-delà des impacts environnementaux, la solarisation du réseau présente aussi des enjeux économiques et opérationnels majeurs, sur un continent où les opérateurs télécoms sont particulièrement exposés aux défis énergétiques. Ces défis incluent des coupures de courant fréquentes, un accès limité au réseau électrique, des coûts énergétiques élevés et des obstacles logistiques à l’adoption des énergies renouvelables. À cela s’ajoute une forte dépendance au diesel, qui entraîne des coûts importants et des inconvénients opérationnels pour les opérateurs.
Étant une source d’énergie renouvelable, le solaire offre une solution adaptée pour compenser le manque d’accès à une électricité fiable, en fournissant une énergie propre, disponible localement et renouvelable. Cela garantit la disponibilité du réseau de l’opérateur même dans des zones où le réseau électrique est limité ou indisponible.
Orange MEA comptait 161 millions de clients dans 17 pays fin décembre 2024. La société a enregistré un chiffre d’affaires de 770 millions d’euros (soit 895,45 millions de dollars américains), en hausse de 11 % par rapport à 2023. Elle a investi 1,4 milliard de dollars pour développer ses infrastructures et ses technologies.
En accélérant la solarisation de son réseau, Orange MEA illustre sa volonté de conjuguer performance opérationnelle, responsabilité environnementale et résilience énergétique sur l’ensemble du continent.
Isaac K. Kassouwi
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La start-up sud-africaine Open Access Energy (OAE) a levé 1,8 million de dollars pour accélérer le développement de ses plateformes d’échange d’électricité basées sur l’intelligence artificielle. Un financement, soutenu par E3 Capital, Equator VC et Factor E Ventures, pour répondre à la demande croissante pour des solutions énergétiques flexibles et décentralisées en Afrique du Sud.
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Après ses études, il s’est installé au Gabon pour y développer des solutions technologiques adaptées aux besoins locaux. Son travail vise à améliorer l’accès aux services d’électricité grâce aux outils numériques.
Basé au Gabon, Birane Ndiaye (photo) est un expert en communication et entrepreneur technologique. Il est le fondateur et directeur général d’Orema Technology, une start-up lancée en 2018, spécialisée dans les solutions connectées pour le secteur de l’énergie.
Orema Technology développe des outils basés sur l’Internet des objets (IoT) afin de moderniser la gestion des compteurs électriques à prépaiement, notamment ceux de la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG), commercialisés sous le nom d’EDAN. L’entreprise a conçu un boîtier intelligent, relié à une application mobile, permettant aux usagers de consulter leur consommation, de recharger leur crédit et de suivre leur utilisation en temps réel, le tout à distance depuis un smartphone.
« Acheter du crédit EDAN et recharger son compte pendant la saison des pluies alors que c’est crucial nous a vraiment fait réfléchir. Comme tous les compteurs EDAN sont installés à l’extérieur des concessions, nous nous sommes dit qu’il fallait trouver une solution qui convienne à tout le monde. Le numérique était la clé à notre problème », a expliqué Birane Ndiaye, évoquant la genèse du projet en 2019.
Birane Ndiaye est titulaire d’un diplôme en relations publiques, publicité et communication appliquée obtenu à l’université de Johannesburg en Afrique du Sud. Entre 2016 et 2017, il a travaillé comme directeur général de la Société équatoriale des Mines (SEM) au Gabon.
Melchior Koba
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Il parie sur l’innovation technologique pour transformer la façon dont les ménages utilisent l’électricité. À travers sa start-up, il ambitionne de rendre l’énergie plus propre, plus intelligente et accessible à tous.
Jon Kornik (photo) est un entrepreneur en série et expert en finance originaire d’Afrique du Sud. Il est cofondateur et président-directeur général de Plentify, une start-up spécialisée dans l’énergie intelligente, dont l’objectif est de rendre l’électricité propre et abordable accessible à tous.
Fondée en 2017, Plentify conçoit des technologies innovantes qui connectent les appareils domestiques à des sources d’énergie plus économiques et respectueuses de l’environnement. L’entreprise développe des solutions intelligentes et durables qui favorisent les économies d’énergie et contribuent à la construction de systèmes énergétiques plus résilients.
Parmi ses produits phares figure HotBot, un contrôleur intelligent destiné aux geysers. Il optimise leur consommation énergétique et inclut un système de détection des fuites, réduisant ainsi les risques d’éclatement, souvent coûteux. SolarBot, une autre innovation, analyse les données météorologiques, les calendriers de délestage et les habitudes de consommation afin d’optimiser la production solaire des utilisateurs.
Avant Plentify, Jon Kornik a lancé en 2008 Selador Capital, une société de capital-risque social dédiée à la création d’entreprises rentables en Afrique du Sud. La même année, il fonde le bureau Afrique subsaharienne de South Pole Carbon Asset Management, une société spécialisée dans le développement d’actifs carbone et le conseil climatique.
Jon Kornik est diplômé de l’Université du Cap, où il a obtenu en 2005 un master en finance. Il détient aussi un master en entreprise sociale et entrepreneuriat obtenu en 2011 à la Columbia Business School.
Il débute sa carrière en 2006 chez McKinsey & Company en tant qu’analyste commercial. En 2011, il rejoint Google en tant que responsable énergie et développement durable, avant d’être promu en 2014 directeur du département d’accès à l’énergie et d’investissements, un poste qu’il occupe jusqu’en 2016.
Melchior Koba
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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1er producteur africain de pétrole brut, le Nigeria détient aussi les plus grandes réserves de gaz du continent. Encore partiellement exploité, le secteur pourrait gagner en compétitivité grâce aux solutions numériques, désormais perçues comme un levier clé de modernisation.
La firme technologique chinois Huawei a lancé une série de solutions numériques pour accompagner la transformation du secteur pétrolier et gazier au Nigeria. L’annonce a été faite à Lagos lors du Forum sur le pétrole et le gaz organisé dans le cadre de la Journée Huawei Nigeria 2025 tenue la semaine dernière.
Ces solutions visent à répondre à trois défis majeurs qui freinent la performance de l’industrie : une exploration peu efficace, des vulnérabilités persistantes en matière de sécurité des oléoducs et une gestion des données encore largement dépendante de l’étranger, au détriment de la souveraineté numérique.
Parmi les innovations présentées figure une solution d’exploration offshore basée sur l’intelligence artificielle, capable de réduire de 21 jours à 72 heures le temps de traitement des données sismiques, avec une précision de 92 %. Testée dans le bloc OML 130 du delta du Niger, elle a permis une réduction de 35 % des coûts d’exploration. Huawei a également déployé une plateforme de sécurité tridimensionnelle intégrant des capteurs à fibre optique et une analyse vidéo. Cette solution aurait permis de réduire de 60 % les fuites sur les oléoducs et de faire passer le temps de réponse aux incidents de 45 à 8 minutes.
Sur le plan de la souveraineté numérique, Huawei a présenté une infrastructure cloud localisée, en conformité avec la législation nigériane sur les données stratégiques. Les informations relatives aux opérations pétrolières et gazières seront désormais stockées localement, assurant leur sécurité et leur disponibilité en temps réel.
L’initiative s’inscrit dans la stratégie de transition énergétique 2050 du Nigeria, qui vise à renforcer les capacités techniques locales, garantir la sécurité énergétique et moderniser un secteur clé de l’économie.
Un secteur vital pour l’économie nigériane
Le pétrole et le gaz représentent le socle de l’économie nigériane. Ils génèrent plus de 90 % des recettes d’exportation et environ la moitié des revenus de l’État. Le Nigeria, premier producteur de pétrole brut en Afrique, possède également les plus importantes réserves prouvées de gaz naturel du continent.
Cependant, le secteur est confronté à des défis structurels parmi lesquels les infrastructures obsolètes, les faibles investissements dans l’innovation, le sabotage des pipelines et la dépendance aux technologies étrangères. En apportant des solutions technologiques avancées, Huawei espère contribuer à une meilleure valorisation des ressources nationales et à une amélioration de la gouvernance sectorielle.
Dans cette optique, le groupe chinois prévoit de doubler les incitations offertes aux partenaires locaux et de former plus de 1000 professionnels nigérians dans les technologies énergétiques d’ici fin 2025. L’objectif est de bâtir un écosystème local capable d’accélérer la transition numérique de l’industrie énergétique nigériane.
Pour Huawei, cette démarche stratégique vise à positionner le Nigeria comme un pôle régional d’innovation énergétique, en s’appuyant sur la technologie pour optimiser la productivité, sécuriser les infrastructures et renforcer la souveraineté sur les données.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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La lutte contre le réchauffement climatique est l’un des grands enjeux du développement mondial à l’horizon 2050. Au-delà des actions politiques, une implication significative du secteur privé, notamment des start-up, est indispensable.
Le 26 février 2025, la start-up MEPS (Methane Energy Production Solutions) a remporté la seconde place de l’Orange Summer Challenge (OSC) International 2024 grâce à son biodigesteur intelligent, mobile et autonome. L’innovation, portée par une jeune Tunisienne, Khouloud Ayachi (photo), et son équipe, vise à transformer les déchets organiques en biogaz et en fertilisant naturel, réduisant leur coût de traitement ainsi que leur impact environnemental.
Il y a deux ans, Khouloud Ayachi, issue d’une famille d’agriculteurs et d’éleveurs de Bargou, a vu son oncle et ses voisins contraints de vendre leur troupeau, victimes des difficultés économiques du secteur. Elle a alors imaginé une solution permettant aux agriculteurs et éleveurs de préserver leurs activités tout en générant de la valeur ajoutée. En s’appuyant sur son Master professionnel en Environnement et Analyse physico-chimique des sols industriels, obtenu en 2022 à la Faculté des sciences de Monastir, elle a donné naissance au projet MEPS.
Le biodigesteur fonctionne simplement. Après leur ajout, les déchets « se transforment naturellement pour créer du biogaz et du biofertilisant. Le biogaz est stocké et peut être utilisé pour cuisiner, chauffer de l’eau ou alimenter des équipements agricoles. Le biofertilisant, quant à lui, est récupéré et utilisé pour nourrir les sols, remplaçant ainsi les engrais chimiques. L’utilisateur peut suivre toute la production de biogaz et de fertilisant via une application mobile, sans effort, et recevoir des conseils pour optimiser l’utilisation des ressources. En plus, un chatbot est à disposition pour répondre aux questions et aider l’utilisateur à tout moment. Le système est également équipé de mécanismes de sécurité pour éviter toute fuite de gaz ou présence de flammes », explique Khouloud Ayachi.
La conception du biodigesteur MEPS n’a pas été facile. L’équipe a dû surmonter des défis financiers et techniques, comme le développement avec des ressources limitées ou l’intégration de mécanismes de sécurité complexes. Grâce au soutien de l’Orange Summer Challenge, notamment via l’École du Code et le Fablab Solidaire, un prototype performant a été conçu. L’équipe travaille désormais à sécuriser des financements pour améliorer la solution et finaliser un produit encore plus sûr et efficace. « Ces expériences nous ont appris l’importance de l’innovation, de la collaboration et de la persévérance. Grâce à l’engagement de nos partenaires, MEPS est sur la voie de devenir une solution complète », confie Khouloud Ayachi, fondatrice et PDG de la start-up.
Proposer le biodigesteur aux agriculteurs et éleveurs n’est qu’un premier pas. MEPS a une vision ambitieuse : révolutionner la gestion des déchets organiques tout en réduisant les émissions de CO2 dans les secteurs de la restauration, de l’hôtellerie, de l’industrie, et même pour un usage domestique, en Tunisie et au-delà. L’objectif est de rendre la technologie plus accessible et performante. Ce dynamisme s’appuie sur la croissance rapide du secteur africain et mondial de la greentech. « La demande pour des solutions innovantes et durables ne cesse de croître. Les entreprises et les consommateurs deviennent de plus en plus sensibles à l’impact environnemental, et de nombreuses industries recherchent des alternatives pour réduire leur empreinte carbone. Nous voyons cette évolution comme une opportunité pour diversifier nos solutions et répondre à des besoins variés », affirme Khouloud Ayachi.
Après avoir remporté la seconde place à l’OSC International 2024, MEPS se prépare à une phase de tests en conditions réelles pour garantir que son biodigesteur répond parfaitement aux besoins des utilisateurs. Parallèlement, un processus d’amélioration continue sera lancé pour optimiser la technologie, le modèle commercial et les services avant d’entamer une phase de scalabilité. L’objectif est de bâtir une entreprise durable, prête à croître et à relever les enjeux environnementaux et économiques de demain.
Muriel EDJO
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La Somalie s’engage activement dans le développement de ses infrastructures numériques pour répondre aux besoins croissants du marché. L’extension des centres de données verts devient ainsi une priorité pour soutenir l’économie numérique locale et mondiale.
Hormuud Telecom, l’un des principaux opérateurs de télécommunications en Somalie, a annoncé son intention de construire davantage de centres de données verts pour répondre aux besoins croissants de l’économie locale et mondiale en solutions d’intelligence artificielle (IA). Cette annonce, faite par le directeur général Ahmed Mohamud Yusuf (photo), marque une nouvelle étape dans l’engagement de l’entreprise envers des infrastructures numériques durables.
« La Somalie est l’un des pays les plus ensoleillés au monde, et nombre de nos centres de données fonctionnent déjà à l’énergie solaire pendant la journée. Nous opérons dans un environnement complexe avec des défis liés à la sécurité et aux infrastructures, mais notre pays regorge d’opportunités », a précisé Ahmed Mohamud Yusuf.
Cette ambition s’inscrit dans un contexte où la demande pour des solutions numériques durables et fiables ne cesse d’augmenter, tant au niveau local que mondial. Hormuud dispose actuellement de 11 centres de données avec une capacité combinée de 10 mégawattheures, dont jusqu’à 95 % de l’énergie provient de l’énergie solaire. La capacité des nouvelles installations sera ajustée en fonction de la demande, reflétant une approche flexible et durable.
En Afrique, les centres de données verts revêtent une importance capitale dans une région où les coupures d’électricité sont fréquentes et où les infrastructures énergétiques sont limitées. En misant sur l’énergie solaire, Hormuud offre non seulement une solution écologique mais également une résilience accrue face aux interruptions d’alimentation électrique, garantissant ainsi une continuité des services numériques essentiels pour le développement économique et social.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji