L’essor de l’intelligence artificielle redéfinit les priorités éducatives dans la région. Face à une jeunesse nombreuse et à une économie en mutation, l’Afrique de l’Est cherche à structurer sa montée en compétences pour rester compétitive dans la transformation numérique mondiale.
MindHYVE.ai, Inc., entreprise américaine spécialisée dans l’intelligence artificielle agentique, et l’Inter‑University Council for East Africa (IUCEA), l’organisme régional chargé de l’intégration et de l’harmonisation de l’enseignement supérieur en Afrique de l’Est, ont signé le mardi 9 décembre à Kampala un partenariat destiné à faire de la région un futur pôle de compétences en IA. L’accord vise à doter les universités membres de l’IUCEA d’outils d’apprentissage avancés et de programmes certifiants de niveau international.
« Ce partenariat marque un moment déterminant pour l’Afrique de l’Est. Équiper nos universités, nos éducateurs et nos étudiants avec une connaissance de l’IA et une maîtrise éthique est essentiel pour l’avancement de notre région », a déclaré le professeur Idris A. Rai (photo), secrétaire exécutif par intérim de l’IUCEA, soulignant la volonté de renforcer la compétitivité de la région dans l’économie numérique mondiale.
Dans sa première phase, l’accord permettra aux plus de 170 universités membres d’accéder à ArthurAI, la plateforme d’apprentissage agentique de MindHYVE.ai, qui sera déployée dans le cadre d’un projet pilote régional. S’y ajoutent 50 cours certifiés du programme « The Dawn Directive », des certifications en littératie et maîtrise de l’IA codélivrées avec le California Institute of Artificial Intelligence, ainsi que des sessions de formation destinées aux enseignants et responsables académiques. Le protocole prévoit une mise en œuvre sur deux ans, supervisée par un comité conjoint chargé de l’évaluation et du passage à l’échelle.
Cette collaboration intervient dans un contexte où la demande en compétences numériques explose. L’Afrique de l’Est, qui concentre l’une des populations les plus jeunes du continent, peine encore à répondre aux besoins en formation avancée dans les technologies émergentes. Selon la Banque mondiale, d’ici 2030, l’Afrique subsaharienne pourrait créer près de 230 millions d’emplois nécessitant des compétences numériques, alors même que les déficits de qualification demeurent l’un des principaux freins à cette transition. Les gouvernements de la région multiplient par ailleurs les stratégies nationales d’IA, d’innovation et de transformation de l’enseignement supérieur, offrant un terrain favorable à ce type d’initiative régionale.
La mise en œuvre de ce partenariat devrait permettre à l’Afrique de l’Est de former un plus grand nombre d’étudiants et de professionnels aux compétences essentielles dans une économie de plus en plus numérique. Elle offre également aux universités une base commune pour renforcer la qualité de leurs programmes, améliorer la mobilité académique et structurer des formations alignées sur les besoins technologiques croissants de la région. L’initiative pourrait enfin soutenir les efforts engagés par les États membres pour moderniser l’enseignement supérieur et intégrer davantage les technologies émergentes dans les cursus.
Samira Njoya
Lire aussi:
Compétences numériques : l’IUCEA et la GIZ ont formé 4000 personnes en Afrique de l'Est
Le numérique transforme progressivement les processus électoraux en Afrique, en facilitant l’accès aux inscriptions et en renforçant la transparence. L’Éthiopie s’inscrit dans cette dynamique pour moderniser la gestion des candidatures et des électeurs.
L’Éthiopie introduira pour la première fois l’inscription numérique des électeurs et des candidats à l’occasion de ses septièmes élections générales, prévues le 1ᵉʳ juin 2026. L’annonce a été faite le mardi 9 décembre par Melatwork Hailu (photo), présidente de la Commission électorale nationale éthiopienne (NEBE), lors d’un point de presse détaillant les préparatifs du scrutin.
Selon la responsable, les plateformes d’enregistrement numérique sont désormais opérationnelles et les formations des représentants des partis politiques ont débuté. Les candidats pourront s’inscrire via une interface web ou une application mobile, tandis que les électeurs auront le choix entre l’auto‑inscription en ligne et l’inscription assistée dans des centres équipés de tablettes. Pour soutenir ce dispositif, la NEBE a également mis en place un centre d’appels ainsi que des équipes d’assistance technique chargées d’accompagner les usagers rencontrant des difficultés.
Ce virage numérique s’inscrit dans un plan plus large de modernisation de la gestion électorale en Éthiopie. La NEBE affirme vouloir renforcer la transparence, l’efficacité et l’accessibilité du processus, dans un contexte marqué par des défis sécuritaires persistants, des contraintes logistiques et des attentes fortes en matière de gouvernance. L’introduction d’outils numériques doit permettre de sécuriser les données, d’améliorer le suivi administratif des candidatures et de réduire les retards fréquemment observés lors des inscriptions.
Dans un pays de plus de 135 millions d’habitants, où la mobilité est parfois entravée et où l’accès aux centres administratifs reste limité dans plusieurs régions, l’inscription en ligne pourrait faciliter la participation électorale, notamment dans les zones rurales ou isolées. Cependant, cette modernisation comporte aussi des limites importantes, notamment la faible connectivité dans de vastes zones rurales, les inégalités d’accès aux outils numériques, les risques de cybersécurité et la nécessité de former les usagers à ces nouveaux dispositifs.
À terme, si ce système fonctionne comme prévu, l’Éthiopie pourrait renforcer durablement la fiabilité et l’efficacité de son administration électorale et poser les bases d’une transformation progressive de ses procédures démocratiques.
Samira Njoya
Lire aussi:
Ethiopie : une plateforme de commerce B2B pour le secteur industriel
Face aux défis persistants dans l’accès à la justice, le Burkina Faso intensifie sa transformation digitale. Les autorités développent des solutions numériques pour simplifier les démarches, renforcer la transparence et améliorer la réactivité des services judiciaires sur l’ensemble du territoire.
Le ministère de la Transition digitale et celui de la Justice ont annoncé, mardi 9 décembre, la finalisation du « Module Parquet de la Chaîne Pénale », une plateforme destinée à permettre le dépôt en ligne des plaintes auprès des parquets du Burkina Faso. Le dispositif sera officiellement lancé le 15 décembre 2025 à Ouagadougou.
Présenté comme un outil majeur de modernisation du service public, le Module Parquet offrira aux citoyens la possibilité de déposer leurs plaintes en ligne, sans déplacement, et permettra aux acteurs judiciaires d’assurer un traitement intégré et sécurisé des dossiers, depuis la réception des plaintes jusqu’au verdict. La solution vise à réduire les lenteurs administratives, à renforcer la traçabilité des procédures et à fluidifier le travail des professionnels du droit.
Le lancement s’inscrit dans la politique de transformation numérique engagée par les autorités burkinabè depuis plusieurs années, marquée notamment par la généralisation du casier judiciaire en ligne depuis 2023, la digitalisation progressive de la chaîne pénale et la modernisation des systèmes d’information du ministère de la Justice. Cette initiative intervient dans un contexte où l’accès à la justice demeure entravé par les lenteurs procédurales, l’engorgement des greffes et les difficultés de mobilité dans certaines régions.
Avec le « Module Parquet », les autorités espèrent offrir aux citoyens un parcours plus fluide et réduire la pression sur les guichets physiques. La plateforme devrait contribuer à accélérer la circulation de l’information, améliorer la transparence du traitement des plaintes et renforcer la proximité entre le parquet et les usagers. À terme, les données générées par ce service permettront d’affiner le pilotage de la chaîne pénale et d’appuyer la mise en œuvre de réformes visant à rendre la justice plus accessible et plus efficace sur l’ensemble du territoire.
Rappelons que selon l’E-Government Development Index des Nations unies, qui mesure la fourniture de services en ligne, la connectivité des télécommunications et les capacités humaines, le Burkina Faso s’est classé 175ᵉ sur 193 pays en 2024, avec un score très faible de 0,2895, soulignant l’ampleur des défis restant à relever en matière de digitalisation des services publics.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Le marché africain du contenu numérique connaît une croissance rapide, portée par une population jeune et connectée. Cependant, l’accès reste limité par les infrastructures, les coûts et le manque de plateformes adaptées aux réalités locales.
Gara Store, plateforme africaine de distribution de contenus numériques, a annoncé le mardi 9 décembre la signature d’un accord de distribution stratégique avec le groupe européen Média-Participations, un acteur majeur de la bande dessinée francophone et du divertissement familial. Ce partenariat vise à rendre accessibles aux publics africains plusieurs milliers d’œuvres emblématiques tout en renforçant la présence du groupe sur un marché en pleine expansion.
L’accord porte sur le catalogue francophone de Média-Participations, couvrant la bande dessinée, la jeunesse et le spirituel, qui sera intégré sur Gara Store. La plateforme, actuellement en phase de déploiement avec des tests dans plusieurs pays africains, est conçue pour répondre aux obstacles structurels du continent, tels que les difficultés de paiement, l’accès à Internet via mobile et les contraintes économiques locales. Le partenariat est également présenté comme un levier de structuration du marché africain du divertissement numérique, incluant le soutien aux créateurs et la construction d’un écosystème culturel local compétitif.
La collaboration intervient alors que le marché africain du contenu numérique connaît une croissance soutenue. Le continent compte plus de 670 millions d’internautes, dont une majorité accède aux contenus via mobile. En Afrique, plus de 70 % de la connexion Internet passe par le mobile, et la demande en divertissement en ligne augmente rapidement au sein d’une population très jeune, dont plus de 60 % ont moins de 25 ans. Malgré cette dynamique, l’accès légal aux contenus culturels demeure limité, faute de plateformes adaptées, en raison de coûts encore élevés, de difficultés de paiement et de catalogues trop fragmentés.
Pour Média-Participations, cet accord représente une étape stratégique dans sa dynamique d’expansion internationale, après l’Europe, l’Amérique et l’Asie, positionnant l’Afrique comme un nouveau marché prioritaire. « Cet accord ouvre de nombreuses perspectives pour des générations d’Africains qui découvriront ou retrouveront nos titres iconiques », souligne Julien Papelier (photo, à droite), directeur général du groupe.
Le partenariat entre Gara Store et Média-Participations devrait permettre d’élargir l’accès à des contenus de référence sur le continent. Il vise également à encourager la collaboration entre créateurs africains et acteurs internationaux, à démontrer le potentiel du marché africain du divertissement numérique et à générer des opportunités économiques pour l’ensemble de la chaîne de valeur. Par ailleurs, les données collectées via la plateforme devraient aider à mieux comprendre les usages et attentes locaux, afin d’anticiper les besoins futurs du marché.
Samira Njoya
Lire aussi:
Le Maroc investit dans les jeux vidéo et crée un laboratoire national de gamification
Les autorités gabonaises cherchent à mieux structurer l’écosystème des services financiers numériques. Après un partenariat annoncé avec Visa en mai dernier, le gouvernement poursuit ses efforts avec un nouvel accord destiné à renforcer l’inclusion financière et la régulation du secteur.
Le ministère de l’Économie numérique, de la Digitalisation et de l’Innovation (MENDI) a annoncé le lundi 8 décembre la conclusion d’un partenariat avec le Fonds d’équipement des Nations unies (UNCDF). Cette collaboration vise à renforcer l’écosystème des services financiers numériques et à soutenir l’ambition nationale de faire du numérique un moteur de modernisation de l’État et de croissance économique.
Au cœur de cette initiative figurent deux axes prioritaires. Le premier porte sur le dialogue interinstitutionnel, avec pour objectif d’harmoniser les politiques publiques, renforcer la coordination entre les acteurs et instaurer un cadre de concertation pérenne autour des services financiers numériques. Le second axe concerne le renforcement des capacités techniques, à travers la formation des décideurs sur des thématiques clés telles que la gouvernance de la monnaie électronique, l’interopérabilité des services, la protection des données, l’éducation financière ou encore la protection des usagers.
Les autorités annoncent également une attention particulière portée aux réformes favorisant la concurrence entre fournisseurs de services financiers, au développement des infrastructures numériques essentielles et à la mise en place de mécanismes renforcés de protection des usagers.
Ce partenariat s’inscrit dans la continuité du diagnostic national mené en 2024 par l’UNCDF. Il intervient dans un contexte où le Gabon cherche à accélérer l’inclusion financière, encore marquée par de fortes disparités. Si le pays affiche une dynamique positive, avec plus de 4000 milliards FCFA (7 milliards USD) de transactions Mobile Money enregistrées en 2024 et près de 368 millions d’opérations sur la même période, une partie de la population reste en dehors des services financiers formels : seuls 30 % des adultes détiennent un compte bancaire. Les zones rurales, les femmes et les jeunes sont les plus touchés par ces exclusions.
Les coûts des services, l’absence d’interopérabilité complète entre les opérateurs, les limites en matière d’éducation financière et une confiance encore fragile dans les outils numériques figurent parmi les obstacles régulièrement soulignés par les acteurs du secteur.
L’intervention de l’UNCDF devrait permettre de soutenir les réformes permettant de moderniser cet écosystème et de créer un environnement plus attractif pour les prestataires de services financiers numériques. En renforçant la coopération entre institutions, en clarifiant les cadres opérationnels et en améliorant la qualité des infrastructures, les autorités espèrent stimuler l’innovation, encourager l’arrivée de nouveaux services et faciliter l’accès des populations à des solutions de paiement, d’épargne ou de transfert plus fiables et abordables.
Samira Njoya
Lire aussi:
Gabon : vers la digitalisation des paiements pour le visa électronique
Les start-up africaines évoluent dans un environnement où l’accès au capital et à des réseaux solides reste un défi majeur. Face à ces besoins, de nouvelles initiatives cherchent à renforcer les écosystèmes d’innovation et à soutenir l’essor entrepreneurial sur le continent.
Technopark Casablanca, principal hub technologique et entrepreneurial du Maroc, et Renew Capital, l’un des investisseurs panafricains les plus actifs dans le financement des start-up, ont annoncé le jeudi 4 décembre un partenariat marquant l’ouverture du siège de Renew Capital pour l’Afrique du Nord et de l’Ouest au Maroc. L’initiative vise à renforcer les passerelles entre les écosystèmes d’innovation du Maghreb, de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique de l’Est, renforçant la position du royaume comme pôle stratégique de croissance technologique à l’échelle du continent.
Dans le cadre du partenariat, Renew Capital accompagnera les start-up marocaines et nord-africaines dans leur expansion vers les marchés d’Afrique subsaharienne, tout en connectant les institutions marocaines aux opportunités émergentes dans les écosystèmes les plus dynamiques du continent. Le Technopark mettra de son côté à disposition son réseau d’incubation, ses infrastructures et son rôle de plateforme d’innovation pour faciliter l’intégration de ces entreprises sur plusieurs marchés africains. Cette alliance vise à transformer les start-up marocaines et africaines en « champions régionaux », capables de dépasser leurs marchés d’origine et de rivaliser à l’échelle continentale.
Ce partenariat s’inscrit dans un contexte où l’écosystème start-up africain traverse à la fois des turbulences et des opportunités. Après une année 2024 difficile, marquée par une chute de plus de 50 % des financements dans la tech africaine, les premiers mois de 2025 témoignent d’un regain de confiance. Au premier semestre, les start-up africaines ont levé environ 1,42 milliard USD à travers 243 opérations, indiquant une reprise significative du capital-risque.
Plus structurellement, l’Afrique voit émerger ses propres investisseurs. Les fonds de venture capital basés sur le continent représentaient 29 % des acteurs actifs en 2023, contre 23 % un an auparavant, signe de la montée en puissance d’un capital africain plus résilient et mieux ancré dans les réalités locales.
Dans ce paysage en recomposition, la nouvelle plateforme maroco-panafricaine pourrait jouer un rôle de catalyseur. En créant des synergies entre entrepreneurs nord-africains, est-africains et subsahariens, le partenariat entre Renew Capital et Technopark pourrait favoriser l’émergence de start-up à fort impact, capables d’accéder à des marchés élargis, d’attirer davantage de financements et de renforcer les chaînes de valeur régionales.
Samira Njoya
Lire aussi:
Maroc : Technopark s’associe à Plug and Play pour accélérer les start-up innovantes
Les autorités éthiopiennes entendent numériser l’ensemble des secteurs de l’économie pour accélérer le développement. En mai dernier, le ministère des Transports avait déjà déployé des solutions numériques en partenariat avec l’opérateur historique.
Le ministère éthiopien de l’Industrie a lancé, le mardi 2 décembre, une plateforme d’e‑commerce en partenariat avec l’opérateur historique Ethio Telecom. Dénommée « E-Tamirt », elle offre un système centralisé permettant aux industriels de s’approvisionner en matières premières, de se connecter avec les fournisseurs et de vendre leurs produits finis aux acheteurs, tant en Éthiopie que sur les marchés régionaux.
« "E‑Tamirt" jouera un rôle stratégique dans la transition du commerce de détail vers l’industrie manufacturière, en permettant aux produits locaux de concurrencer efficacement les produits importés », a déclaré Ethio Telecom dans un communiqué.
Le ministre de l’Industrie, Melaku Alebel, a indiqué que l’initiative comble les lacunes en matière d’approvisionnement et de distribution en offrant un canal numérique structuré pour les transactions industrielles. Il a ajouté que la nouvelle plateforme soutient les plans nationaux visant à renforcer la capacité de production, encourager l’innovation et renforcer une compétitivité durable.
Cette initiative s’inscrit dans le cadre des ambitions de transformation numérique de l’Éthiopie. Fin novembre, le gouvernement a adopté une nouvelle stratégie à l’horizon 2030 pour poursuivre la digitalisation des services publics, moderniser l’économie et renforcer l’inclusion numérique. La GSMA estime que cette transformation peut générer une valeur ajoutée de 319 milliards ETB (≈2 milliards USD) à l’économie nationale d’ici 2028, notamment dans l’agriculture, le transport, la santé, l’administration publique, le commerce et l’industrie.
Le secteur industriel affiche à lui seul un potentiel de 108 milliards ETB, 180 000 emplois et des revenus fiscaux supplémentaires de 9 milliards ETB pour l’État. « Le sous‑secteur manufacturier en Éthiopie repose en grande partie sur l’agroalimentaire, et il existe un fort potentiel de croissance grâce à la diversification, à l’augmentation de la production industrielle, au renforcement de la R&D [recherche et développement, Ndlr] et à la promotion de la transformation locale et de la valeur ajoutée. De plus, les technologies numériques peuvent soutenir les plans du gouvernement visant à porter les exportations manufacturières de 13 % en 2019 à 48 % en 2030 », explique la GSMA.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
L’Ethiopie lance un modèle de paiement à l'utilisation pour tracteurs agricoles
L’Éthiopie signe un protocole d’accord avec la Chine pour soutenir l’économie numérique
L’e‑gouvernement est au cœur de nombreuses stratégies numériques en Afrique de l’Ouest. Les pays de la CEDEAO cherchent désormais à coordonner leurs efforts afin de créer un cadre régional commun pour des services publics plus efficaces et accessibles à tous.
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) travaille actuellement à l’élaboration de sa première stratégie régionale d’e‑gouvernement. La semaine dernière, responsables gouvernementaux, experts des TIC et partenaires techniques se sont réunis à Abuja afin d’examiner et de valider les grandes orientations de ce futur cadre commun.
La stratégie en préparation ambitionne de doter la région d’une infrastructure numérique publique interopérable, d’encadrer la gouvernance des données et de soutenir les États membres dans le développement de services administratifs modernisés. Elle prévoit également la mise en place de mécanismes communs de cybersécurité, ainsi que la coordination de politiques nationales jusque‑là fragmentées, dans le but d’offrir des services publics plus efficaces, transparents et accessibles.
Ce travail s’inscrit dans le cadre des initiatives de transformation numérique déjà engagées par la CEDEAO à travers des programmes régionaux comme le WARDIP, conçu pour accélérer l’intégration numérique en Afrique de l’Ouest. Il fait aussi écho aux objectifs définis dans la Vision 2050 de l’organisation, qui appelle à un espace communautaire connecté, résilient et fondé sur des institutions modernisées.
Il intervient surtout dans un contexte où les États de la CEDEAO multiplient les réformes numériques, avec l’e‑gouvernement comme priorité. Plusieurs pays se sont déjà dotés de stratégies nationales. Le Ghana a lancé des plateformes d’identification numérique de référence ; le Cap‑Vert poursuit la consolidation de son administration électronique, considérée comme l’une des plus avancées de la région ; la Côte d’Ivoire mise sur des services administratifs en ligne centralisés ; le Sénégal développe progressivement un écosystème d’e‑services, soutenu par l’identifiant unique et l’interopérabilité. L’élaboration d’une stratégie régionale apparaît ainsi comme une étape naturelle pour coordonner et amplifier ces efforts.
Si elle est adoptée, cette stratégie pourrait améliorer considérablement l’efficacité des administrations publiques, favoriser la circulation sécurisée des données, renforcer la transparence et soutenir l’intégration régionale en permettant aux citoyens comme aux entreprises d’accéder plus facilement aux services publics, même au‑delà des frontières nationales.
Selon le dernier rapport E‑Government Development Index 2024 publié par l’UN DESA, plusieurs pays membres de la CEDEAO figurent parmi les plus avancés du continent ouest‑africain en matière d’e‑gouvernement. Le Ghana se classe à la 108ᵉ place mondiale, suivi du Cap‑Vert (109ᵉ), de la Côte d’Ivoire (124ᵉ) et du Sénégal (135ᵉ). Ces performances témoignent d’une dynamique réelle au sein de la région et montrent que, malgré des niveaux d’avancement variables, les fondations nécessaires à une stratégie régionale commune sont déjà en place.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
La CEDEAO place l'éducation numérique au cœur de ses priorités
L’écosystème des start-up sierra-léonais est en pleine émergence. Il compte des jeunes pousses telles que Easy Solar, Rising Academy, Farmerline Group, Mosabi, MiKashBoks…
Le gouvernement sierra-léonais a annoncé le lundi 1er décembre la signature d’un accord-cadre avec Redsalt Angel Investment Network GmbH (RAIN), un investisseur axé sur l’impact, dédié au soutien des start-up en phase de démarrage et des entreprises sociales dans les pays à faible revenu. Les deux parties entendent cofinancer et accompagner les start-up en phase initiale dans le cadre des défis nationaux d’innovation et des programmes associés.
RAIN a indiqué que ce partenariat permettra de libérer des capitaux, de renforcer les structures de gouvernance et d’accélérer le développement d’entreprises sierra-léonaises à fort potentiel de croissance. L’entreprise dispose par ailleurs d’un partenariat avec l’Orange Digital Center (ODC) via la Fondation Orange. Cette collaboration offrira aux start-up issues de l’ODC un parcours structuré, incluant mentorat, accompagnement vers l’investissement et financement d’amorçage par RAIN.
« Construire un écosystème d’innovation solide nécessite des partenariats alignés, un capital patient et un investissement délibéré dans nos jeunes entrepreneurs. Avec des politiques gouvernementales favorables et des efforts continus de transformation numérique, la Sierra Leone crée les conditions nécessaires pour que l’innovation croisse, que les industries se modernisent et que les entrepreneurs puissent passer à l’échelle », a déclaré Salima Bah (photo, à gauche), ministre de la Communication, de la Technologie et de l’Innovation.
Dans le cadre de sa stratégie nationale de transformation numérique, la Sierra Leone mise sur les jeunes pousses pour développer des solutions répondant aux besoins de la société. « Les idées, prototypes et démonstrations doivent être incubés et accélérés afin de promouvoir la culture des start-up et de soutenir le développement de l’industrie technologique locale. Dans les universités, les espaces gouvernementaux et les institutions privées, une série d’initiatives sera renforcée pour encourager l’innovation chez les jeunes, soutenir les petites et moyennes entreprises et transformer les idées en solutions concrètes », précise le document stratégique.
Parmi ces initiatives figurent les défis d’innovation soutenus par l’État, les concours de présentation d’idées et de projets, les bacs à sable d'innovation (innovation sandboxes) et d’autres dispositifs similaires. Des données, financements et autres formes de soutien seront offerts aux participants comme incitation, avec des ressources provenant principalement du gouvernement et de ses partenaires.
Selon un rapport publié en juin 2025 par Invest Salone, l’écosystème start-up de Sierra Leone doit relever plusieurs défis : un marché restreint et des revenus faibles, une littératie numérique limitée et des infrastructures insuffisantes, surtout en dehors de Freetown, un soutien aux start-up fragmenté et une réglementation incertaine, en particulier pour les services financiers numériques et la blockchain.
Le rapport souligne également que la Sierra Leone ne dispose pas encore d’une loi définissant clairement le statut de start-up, la distinguant d’une PME traditionnelle et fournissant un cadre politique ciblé pour soutenir l’innovation, attirer les investissements et réduire l’incertitude réglementaire. Il ajoute qu’une telle législation permettrait d’aligner les incitations, de simplifier la conformité et de montrer un engagement national fort en faveur d’une économie moderne et technologique.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
La Sierra Leone étend sa plateforme d’e-gouvernement à la frontière avec la Guinée
Favorisée par l’absence d’infrastructures électriques adéquates, l’Afrique devient le terrain de jeu des innovations les plus agiles. L’adoption de solutions solaires transforme actuellement des millions de vies. Mais cette mutation reste fragile, au regard de diverses contraintes qui persistent.
L’Afrique demeure l’épicentre de la pauvreté énergétique mondiale. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), sur les 730 millions de personnes qui n’avaient toujours pas accès à l’électricité dans le monde, la grande majorité se trouvait en Afrique subsaharienne. Le groupe de la Banque africaine de développement (BAD) évoque plus de 600 millions d’Africains, soit environ la moitié de la population du continent. « Pour ces personnes, la vie quotidienne est un combat éclairé par la faible lueur des lampes à pétrole ou le ronronnement intermittent des groupes électrogènes au diesel. Ces solutions palliatives sont non seulement coûteuses, mais aussi polluantes, perpétuant un cycle de pauvreté et de dégradation de l’environnement. Au rythme actuel de l’électrification et avec la croissance démographique rapide de l’Afrique, le nombre de personnes privées d’électricité restera largement inchangé si nous ne prenons pas des mesures audacieuses et immédiates », déplore la BAD. Compte tenu des enjeux de productivité, d’éducation et de santé sur le continent, l’électrification décentralisée par le solaire est devenue plus stratégique que jamais, d’après l’AIE.
Bien que le Groupe de la Banque mondiale et la Banque africaine de développement se soient associés pour favoriser l’accès de 300 millions de personnes à l’électricité en Afrique d’ici 2030 dans le cadre de l’initiative « Mission 300 », la Banque mondiale reconnaît que l’énergie solaire hors réseau est le moyen le plus rapide et le plus rentable d’alimenter 41 % des personnes dans le monde vivant sans accès à l’énergie d’ici 2030. Cette solution a desservi 561 millions de personnes en 2023 et assuré 55 % des nouveaux raccordements en Afrique subsaharienne entre 2020 et 2022. Par rapport au raccordement au réseau ou au mini-réseau, le solaire hors réseau est une solution moins coûteuse, qui peut être mise en œuvre plus rapidement pour répondre aux niveaux de demande actuels, soutient la Banque mondiale.
Le solaire transforme des vies
Aujourd’hui, face aux défis que rencontrent les réseaux électriques nationaux (faible couverture, capacités limitées, vétusté des équipements, cherté des tarifs), les solutions solaires hors réseau créent une valeur économique mesurable. Dans son rapport « Off-Grid Solar Market Trends Report 2024 », la Banque mondiale estime que les générateurs fournissent près de 9 % de l’électricité en Afrique subsaharienne, ce qui coûte aux ménages entre 28 et 50 milliards de dollars par an en carburant, auxquels s’ajoutent 10 à 20 % supplémentaires en frais d’entretien. Les kits et appareils solaires réduisent les coûts énergétiques des ménages, prolongent les heures d’activité des commerces, sécurisent la chaîne du froid et augmentent les revenus des petites entreprises. L’électricité change la vie : elle offre de la lumière pour étudier, de la ventilation et de la réfrigération pour la santé et l’alimentation, l’information via la radio ou la télévision éducative, et une sécurité accrue la nuit. Les pompes solaires renforcent la résilience face aux sécheresses et soutiennent la productivité agricole, tandis que la réfrigération réduit les pertes post-récolte et permet une meilleure conservation des vaccins et médicaments dans les centres de santé. Le Programme d’aide à la gestion du secteur énergétique (ESMAP) indique que ses analyses montrent que ces « usages productifs » se diffusent rapidement dans les chaînes de valeur locales (agroalimentaire, artisanat, services).
« Les systèmes solaires hors réseau permettent aux ménages, aux entreprises et aux agriculteurs d’utiliser l’électricité de manière productive et de générer des revenus. Dans une enquête menée auprès de plus de 79 000 clients hors réseau dans 31 pays, 86 % des utilisateurs de pompes à eau solaires ont vu leur productivité augmenter et 60 % ont étendu leurs surfaces cultivées, ce qui a entraîné une augmentation des revenus pour 88 % d’entre eux. De même, 88 % des réfrigérateurs ont été utilisés à des fins productives, 81 % des utilisateurs déclarant une amélioration de leur qualité de vie. En 2023, plus de 3 millions de personnes utilisaient leur système solaire domestique pour gérer une entreprise », explique l’ESMAP. Le modèle de financement Pay-as-you-go (PAYGo), ou paiement à l’usage, a fortement contribué à l’expansion du secteur de l’énergie solaire hors réseau (OGS), notamment en Afrique subsaharienne. Le client verse un acompte initial, entre en possession de l’équipement solaire, puis continue à verser des paiements réguliers sur une période donnée jusqu’au solde total. Les paiements sont généralement effectués via Mobile Money (argent mobile), un canal largement disponible en Afrique subsaharienne, bien que d’autres méthodes incluent les cartes à gratter, du crédit de communication et le paiement en espèces.
Au cœur de cette nouvelle manière d’apporter de l’électricité à un prix abordable à des millions d’Africains, on trouve une diversité d’acteurs de terrain qui ont vu le potentiel transformateur du solaire en Afrique et se mobilisent.
Un secteur privé engagé
Entre 2018 et 2024, les start-up spécialisées dans le solaire hors réseau se sont renforcées en Afrique, consolidant l’accès du continent à l’électricité. Bien que le financement capté par ces entreprises soit passé de 194 millions de dollars à 192 millions de dollars en 2024, après avoir atteint 425 millions de dollars en 2023, le dynamisme du secteur ne s’est toutefois pas émoussé. Sun King fait partie des nombreuses start-up qui s’illustrent en Afrique au cours des dernières années. La société, qui revendique la fourniture d’énergie solaire à 30 % des ménages kenyans grâce à ses produits, a signé en juillet 2024 un accord de titrisation de 156 millions de dollars avec ABSA, Citi, The Co-operative Bank of Kenya, KCB Bank et Stanbic Bank Kenya. Cet accord s’ajoute à celui de 130 millions de dollars effectué en 2023 pour permettre la fourniture de 3,7 millions de produits solaires au Kenya. De son côté, Bboxx s’est consolidé au fil des cinq dernières années. En acquérant PEG en 2022, la société a étendu son empreinte en Côte d’Ivoire, au Ghana et au Mali. Sa présence dans une dizaine de pays lui permet de fournir ses produits solaires à plus de 2,5 millions de personnes.
Même le groupe télécoms Orange a fait de l’énergie solaire hors réseau une priorité stratégique. Il faut dire qu’en favorisant l’accès à l’énergie, la société soutient aussi l’accès à ses offres Internet mobile et Mobile Money. À travers Orange Energies, l’opérateur revendiquait plus de 600 000 foyers connectés en 2024, soit près de 4 millions de personnes avec accès à l’énergie dans 13 pays. Avec un positionnement de partenaire de tous les producteurs d’énergie, Orange Energies a développé une plateforme IoT, Orange Smart Energies, qui permet le PAYGo et le smart metering. Ainsi, Orange peut collaborer avec l’ensemble des producteurs d’énergie, qu’ils soient vendeurs de kits solaires, opérateurs nationaux d’électricité (utilities) ou constructeurs de mini-réseaux. En ajoutant la brique digitale, Orange Energies offre la possibilité à tous les ménages de prépayer leur énergie à leur rythme, en fonction de leurs revenus. En collaboration avec ses partenaires comme Koolboks, Biolite, Sun King, Solar Run, Orange Energies propose une diversité de produits tels que des panneaux solaires, des batteries intelligentes pour stocker l’électricité et optimiser la consommation, des lampes LED, des prises USB et des accessoires adaptés aux besoins des ménages ruraux, avec un catalogue de matériels variés allant du ventilateur au congélateur, en passant par la télévision et la radio.
L’expertise d’Orange Energies dans l’électrification solaire va plus loin et lui a valu la reconnaissance d’organisations internationales et locales. En juin 2024, la société a remporté un appel d’offres de l’AFD de 150 000 euros pour accélérer l’électrification rurale de plus de 400 localités en Côte d’Ivoire, dans le cadre du projet MAX, financé par l’Union européenne et mis en œuvre par Expertise France. En septembre 2024, la Banque mondiale et la GIZ lui ont confié un contrat de 360 000 dollars pour équiper 8000 foyers hors réseau en solutions solaires autonomes au plus tard en juin 2025, dans des zones prioritaires identifiées par la Banque mondiale au Liberia. Orange Energies a également signé un partenariat public-privé avec l’État guinéen (Agence Guinéenne d’Électrification Rurale – AGER) et le développeur de mini-réseaux IPT PowerTech pour la construction d’un mini-réseau ABC qui va alimenter six localités en électricité : Kalenko, Siguiri, Yèndè Milimou, Nongoa, Ouendé Kènèma et Fangamandou, avec un modèle de prépaiement connecté pour les clients.
En clair : le solaire hors réseau en Afrique n’est plus une expérimentation. C’est un secteur industriel, financier et social, qui électrifie, crée des revenus et redessine le quotidien. Pour que cette promesse dure, plusieurs défis doivent être traités de front.
Des risques persistent toutefois
Le marché seul ne suffira pas à électrifier l’Afrique rurale. Pour atteindre les ménages les plus pauvres et les zones les plus difficiles, il faut de l’argent public — subventions directes, garanties, financements concessionnels. Les estimations du secteur indiquent qu’il faudrait environ 3,6 milliards de dollars par an jusqu’en 2030 pour électrifier, via le solaire hors réseau, les centaines de millions de personnes pour lesquelles c’est la solution la moins coûteuse. Environ 40 % de cette somme devrait être sous forme de subventions ciblées, pour abaisser le prix final dans les zones les plus reculées et les contextes fragiles et touchés par les conflits. Il reste à mobiliser ces fonds.
Le modèle de paiement progressif (PAYGo), bien qu’il permette d’étaler le coût d’un kit solaire, se heurte de plein fouet à l’extrême pauvreté. Seule une minorité de ménages ruraux est en mesure de supporter une mensualité, même modeste. La facture s’alourdit dans les zones reculées ou en proie aux conflits, où les surcoûts logistiques peuvent augmenter le prix final de 57 %. Ainsi, seulement 22 % des ménages non raccordés à l’électricité dans le monde peuvent assumer le remboursement mensuel d’un kit solaire via PAYGo — un taux qui chute à 16 % en Afrique subsaharienne. Confrontés à cette barrière financière, de nombreux foyers se rabattent encore sur des solutions de court terme (bougies, lampes à pétrole, groupes électrogènes partagés), dont le coût à long terme s’avère pourtant plus élevé.
Cette précarité des ménages affecte directement la santé financière des entreprises et met en péril leur pérennité. Le taux de recouvrement des paiements PAYGo stagne autour de 62 %, et un client sur quatre rencontre des difficultés de paiement. Par ailleurs, la plupart des start-up solaires s’endettent en devises étrangères (dollars ou euros) mais sont remboursées en monnaie locale, ce qui les expose à un risque de change important.
À ces défis s’ajoutent l’inflation et l’effondrement de certaines monnaies locales, qui entraînent des hausses de prix. Au Nigeria, par exemple, le coût de lanternes solaires de base a augmenté de 91 % à 300 % en monnaie locale en 2023, annulant les baisses de prix des composants sur les marchés internationaux.
Enfin, la dépendance aux importations et l’absence de filière locale posent un défi structurel. Sans assemblage local, sans réseau de maintenance fiable et sans accès à des pièces détachées abordables, les systèmes tombent fréquemment en panne, et les foyers se retrouvent de nouveau privés d’électricité. La prolifération de produits solaires bas de gamme — représentant près de 70 % des ventes — sape la confiance des consommateurs. Le manque de compétences techniques pour l’installation, la maintenance et le dépannage, en particulier dans les zones isolées, complète cette liste d’obstacles qui entrave le déploiement massif des solutions solaires hors réseau.
Muriel EDJO
Lire aussi:
Les start‑up camerounaises peinent à attirer les investissements, freinées par le manque de compétences managériales et la structuration insuffisante de l’écosystème entrepreneurial. Un accompagnement ciblé s’avère indispensable pour soutenir leur croissance et renforcer leur compétitivité.
Enovation Factory, incubateur et accélérateur de start‑up basé au Cameroun, a lancé en partenariat avec le PNUD Cameroun l’initiative Scale 32, un programme national de 14 mois visant à soutenir 32 start‑up technologiques dans leur croissance, en répondant aux principaux défis qu’elles affrontent, notamment l’accès au financement, le renforcement des compétences managériales et la mise en relation avec des investisseurs.
Le programme se déroule en deux phases : la première cohorte bénéficiera d’un accompagnement intensif de six mois, de janvier à juin 2026 ; la seconde, de juin à décembre 2026. Les start‑up sélectionnées seront intégrées à l’un des deux volets d’Enovation Factory : Newbie, pour les projets en phase d’idéation ou émergents, et Cracker, pour ceux déjà opérationnels souhaitant accélérer leur développement. L’accompagnement comprend des formations spécialisées, du mentorat, l’accès à des espaces de travail, ainsi que la mise en relation avec des partenaires institutionnels et des investisseurs.
À l’issue de ces six mois, chaque start‑up rejoindra le programme Alumni d’Enovation Factory, avec un suivi de 12 mois : accès au réseau, à des opportunités de financement et à des événements de l’écosystème, garantissant ainsi la pérennité des acquis.
Cette initiative intervient dans un contexte où le Cameroun cherche à renforcer son écosystème technologique et à stimuler la création d’emplois. Elle complète d’autres efforts de structuration du secteur, en s’attaquant au faible taux de survie des start‑up et à l’insuffisance de la gouvernance des jeunes entreprises.
Cependant, la modestie des montants levés, le nombre limité de start‑up capables d’attirer l’attention des investisseurs, et la faible part de la région dans les flux de capital‑risque soulignent la nécessité d’un travail structurel approfondi. Il s’agit notamment de renforcer la gouvernance des jeunes entreprises, d’améliorer leur attractivité pour les investisseurs, de consolider le soutien institutionnel et de mieux positionner les start‑up camerounaises sur la scène internationale.
Les start‑ups évoluant dans les domaines de la tech, de l’agritech, de la healthtech, de la fintech, de l’edtech, de l’économie verte et autres secteurs innovants sont invitées à postuler avant le 18 décembre via le lien : https://www.enovation-factory.com/postuler.
Samira Njoya
Lire aussi:
Le Togo ambitionne de numériser l’ensemble de ses services publics dans les prochaines années afin de simplifier les démarches et d’améliorer l’accès pour tous les citoyens. L’ajout de nouvelles procédures en ligne confirme l’avancée de cette transformation.
Le Togo poursuit la modernisation de son administration en ajoutant trois démarches supplémentaires au portail national service-public.gouv.tg. Les citoyens peuvent désormais effectuer en ligne la renonciation ou réintégration à la nationalité togolaise, ainsi que la modification du patronyme ou du matronyme.
Ces téléprocédures, portées par le ministère de la Justice et des Droits humains, s’inscrivent dans un mouvement méthodique de modernisation. La plateforme permet désormais de réaliser tout le parcours à distance : dépôt de dossier, suivi en temps réel du traitement et réception des décisions. Cette évolution est rendue possible par la consolidation du guichet unique numérique, conçu pour centraliser les services administratifs et améliorer l’accessibilité pour l’ensemble des citoyens.
Ce déploiement intervient dans un contexte où le Togo accélère la digitalisation de ses démarches administratives. Ces derniers mois, le portail national a ajouté plusieurs services majeurs, dont la demande de certificat de nationalité, le renouvellement de passeport, la carte de séjour, le casier judiciaire, le permis de construire ou encore diverses formalités. Avec ces ajouts successifs, la plateforme consolide désormais 101 services désormais accessibles en ligne.
L’intégration de ces trois nouvelles démarches répond à des enjeux clés : réduire les déplacements des usagers, renforcer la transparence des procédures, raccourcir les délais d’instruction et améliorer l’efficacité du service public. Elle participe aussi à une plus grande inclusion administrative en permettant aux citoyens, y compris ceux éloignés des centres urbains, d’accéder aux démarches essentielles sans contrainte géographique.
Cette accélération de la transformation numérique intervient dans un contexte où le pays s’emploie à combler un important déficit en matière de digitalisation des services publics. Le rapport 2024 de l’ONU sur l’E-Government Development Index (EGDI) attribuait au Togo un score de 0,3920, le positionnant à la 161ᵉ place sur 193. Un classement qui met en lumière l’ampleur des défis à relever. Les avancées enregistrées ces derniers mois témoignent ainsi de la détermination des autorités à moderniser l’action publique, à renforcer l’accessibilité des démarches et à inscrire durablement l’administration togolaise dans l’ère du numérique.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
En Afrique de l’Ouest, les PME peinent à accéder efficacement aux marchés régionaux. Le numérique s’impose comme une solution pour simplifier la logistique, renforcer la traçabilité et l’intégration commerciale.
La Côte d’Ivoire a lancé, lundi 1er décembre à Abidjan, le projet Tradepost, un dispositif destiné à moderniser la logistique postale et à faciliter le commerce transfrontalier dans l’espace CEDEAO. Portée conjointement par l’Union postale universelle (UPU), la Poste de Côte d’Ivoire et la Conférence des postes des États de l’Afrique de l’Ouest (CPEAO), l’initiative marque une nouvelle étape dans l’intégration économique régionale et dans la digitalisation des services postaux.
Représentant le ministre de la Transition numérique et de la Digitalisation, le directeur de cabinet Assoua Raymond a souligné que Tradepost permettra « d’accélérer les procédures douanières grâce à la dématérialisation, de réduire les coûts logistiques et les délais de livraison, tout en offrant une traçabilité complète des envois ». Selon lui, ce dispositif constitue « un instrument stratégique pour connecter les PME ivoiriennes aux marchés africains et internationaux ».
En pratique, Tradepost entend digitaliser et harmoniser les processus liés aux échanges commerciaux : déclaration et traitement des colis, suivi, formalités douanières, ainsi que connexion à des plateformes d’e‑commerce régionales ou internationales. Cette modernisation vise à lever plusieurs obstacles qui freinent encore le commerce transfrontalier en Afrique de l’Ouest, parmi lesquels la fragmentation réglementaire, les coûts logistiques élevés, la lenteur des procédures et la faible intégration des écosystèmes numériques.
Ce lancement s’inscrit dans un contexte où les échanges numériques progressent rapidement en Afrique de l’Ouest, soutenus par une hausse de la connectivité, la digitalisation croissante des services publics et la montée en puissance des plateformes de commerce en ligne. La Côte d’Ivoire se distingue particulièrement dans la progression du commerce en ligne. Avec une croissance annuelle composée de 11,3 % attendue d’ici 2027, le marché, déjà valorisé à plus de 280 milliards FCFA (495,5 millions USD) en 2023 selon les acteurs du commerce électronique ivoirien.
En renforçant la traçabilité des colis et en harmonisant les procédures, le projet devrait réduire les obstacles au commerce transfrontalier, améliorer l’accès aux marchés pour les artisans, agriculteurs et jeunes entrepreneurs, et favoriser un écosystème e‑commerce plus transparent et performant dans l’espace CEDEAO. Cette approche fondée sur les données permettra également d’identifier les goulots d’étranglement, d’orienter les investissements et de soutenir durablement l’intégration économique et numérique régionale.
Samira Njoya
Lire aussi:
Côte d'Ivoire : vers une croissance 11,3 %pour l'e-commerce d'ici 2027
Au Lesotho, près de la moitié des jeunes restent sans emploi, un défi majeur pour l’insertion socio-professionnelle. Le gouvernement mise sur le numérique pour favoriser l’accès aux compétences, développer l’employabilité et créer de nouvelles opportunités économiques pour la jeunesse.
Le ministère du Genre, de la Jeunesse et du Développement social du Lesotho a lancé, mercredi 26 novembre à Maseru, la plateforme Youth Agency Marketplace (YOMA) en partenariat avec l’UNICEF. Cette initiative vise à réduire les obstacles qui freinent l’insertion professionnelle des jeunes, notamment l’accès limité à la formation, aux compétences numériques et aux opportunités de marché.
YOMA est une plateforme numérique panafricaine qui permet aux jeunes d’acquérir des compétences, de bénéficier de mentorat et d’accéder à des opportunités économiques. Elle propose des parcours allant de la formation de base à la mise en relation avec des entreprises, des ONG ou des institutions. Les utilisateurs peuvent également réaliser des « missions à impact » social ou environnemental, récompensées par des jetons numériques, échangeables contre des biens ou services comme des crédits téléphoniques ou des cours supplémentaires.
Toutes les activités réalisées sur la plateforme sont enregistrées dans un CV numérique vérifiable, destiné à renforcer la visibilité et la crédibilité des jeunes auprès de potentiels employeurs. Alignée sur les standards internationaux de développement des compétences, YOMA adopte une approche individualisée : les opportunités proposées sont adaptées au profil, aux objectifs et au potentiel de chaque utilisateur, en lien avec les besoins du marché.
Selon les autorités, le lancement de YOMA s’inscrit dans la volonté du gouvernement d’autonomiser la jeunesse à travers des solutions numériques accessibles. L’enjeu est de taille dans un pays où les jeunes représentent une proportion importante des chômeurs. Les données officielles estiment le taux de chômage des 15–35 ans à près de 50 %, l’un des plus élevés d’Afrique australe.
Au Lesotho, YOMA devrait permettre d’améliorer l’employabilité, de stimuler l’auto-entrepreneuriat, de faciliter l’accès à des formations certifiantes, et d’ouvrir des opportunités de revenus via les missions rémunérées. La plateforme vise aussi à renforcer les compétences numériques dans un pays où les jeunes manquent encore d’outils pour s’insérer dans une économie de plus en plus digitalisée.
Cependant, plusieurs défis pourraient freiner l’adoption du dispositif. Selon DataReportal, seulement 48 % de la population du Lesotho utilisaient Internet au début de 2025, et le coût de la data reste élevé par rapport au revenu moyen. En zones rurales, la couverture mobile reste instable, ce qui limite l’accès régulier à une plateforme entièrement numérique. La réussite de YOMA dépendra donc de l’amélioration de la connectivité, de la réduction des coûts d’accès et d’efforts accrus de sensibilisation pour encourager les jeunes à s’approprier l’outil.
Avec son lancement au Lesotho, YOMA s’ajoute aux déploiements déjà engagés depuis 2020 dans plusieurs pays africains, notamment le Bénin, le Burundi, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Ce partenariat avec l’UNICEF permet au pays de s’appuyer sur un modèle éprouvé pour élargir l’accès des jeunes à la formation, aux opportunités économiques et à l’entrepreneuriat.
Samira Njoya
Lire aussi:
Lesotho : le PNUD déploie un modèle innovant pour l'inclusion numérique