En novembre 2024, le Gabon a lancé son ambitieux programme « Gabon Digital », avec l’objectif de positionner le pays comme un hub numérique en Afrique centrale. La poursuite de cette vision change de mains, mais reste entre celles d’un expert.
Deux jours après son investiture en tant que quatrième président de la République gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguéma a dévoilé, le mardi 5 mai, la composition du premier gouvernement de son mandat de sept ans. Parmi les principales nominations figure celle de Mark Alexandre Doumba (photo), au poste de ministre de l’Économie numérique, de la Digitalisation et de l’Innovation. Il succède au général de Brigade Bonjean Rodrigue Mbanza, qui occupait ce portefeuille dans le précédent gouvernement de transition.
Avant cette nomination, Mark Alexandre Doumba avait brièvement occupé le poste de ministre de l’Économie et des Participations. Son repositionnement à la tête d’un ministère aussi stratégique témoigne de la volonté des autorités de renforcer la modernisation du pays à travers l’innovation et les technologies.
Âgé de 38 ans, Mark Alexandre Doumba est reconnu comme un entrepreneur aguerri et un stratège de la finance digitale. Fondateur du groupe ClikAfrik et de la néobanque ClikPay, il a fait de l’inclusion financière par le numérique l’un de ses principaux combats. Il a notamment contribué à la création du Guichet numérique de l’investissement, une plateforme ayant facilité la formalisation de plusieurs dizaines de milliers de TPE et PME gabonaises. Il est diplômé de la George Washington University, de la London School of Economics et de la Harvard Kennedy School.
Le nouveau ministre hérite d’un portefeuille dense, avec plusieurs chantiers prioritaires, notamment la relance du backbone national en fibre optique, la construction des centres de données souverains et la modernisation des services publics par le numérique. Ces projets figurent parmi les priorités de la feuille de route du président de la transition.
Mark Alexandre Doumba devra également impulser un nouveau souffle au Centre gabonais de l’innovation et concrétiser le projet de technopôle numérique et industriel, destiné à faire de Libreville un véritable hub régional de l’innovation. Grâce à son approche pragmatique et son expertise en transformation numérique et en partenariats stratégiques, il pourrait jouer un rôle clé dans l’essor du Gabon comme acteur majeur de l’innovation en Afrique centrale.
Samira Njoya
Lire aussi:
Projets et ambitions numériques d’Oligui Nguema, le nouveau président gabonais
Le gouvernement capverdien ambitionne de faire du pays une économie numérisée d’ici 2030. Pour y parvenir, il mise sur des investissements dans des infrastructures technologiques afin de former les talents locaux et renforcer la main-d’œuvre nationale.
Le Cap-Vert a officiellement inauguré, le lundi 5 mai, le TechPark CV, un centre technologique régional conçu pour stimuler l’innovation et la transformation numérique dans l’archipel et au-delà. Financé à hauteur de 45,59 millions d’euros (soit 51,7 millions de dollars) par la Banque africaine de développement (BAD), ce projet marque une étape stratégique pour le pays, qui ambitionne de devenir un hub technologique en Afrique de l’Ouest.
« Le TechPark CV est un environnement accueillant où des innovateurs d'origines et de cultures différentes peuvent collaborer et prospérer ensemble. Grâce à ce projet, nous ne construisons pas seulement un centre numérique ; nous favorisons une communauté où la technologie stimule la croissance économique et le développement durable pour le Cap-Vert et nos partenaires internationaux », a déclaré Carlos Monteiro, président de TechPark CV.
Le parc s’inscrit dans la stratégie nationale de diversification économique et dans le cadre de la stratégie de développement de l’économie numérique du Cap-Vert à l’horizon 2030. L’investissement représente près de 2 % du PIB national, témoignant de l’importance accordée au numérique dans le modèle de croissance du pays.
Des infrastructures aux normes internationales
Le parc technologique est équipé de centres de données, d’espaces de coworking, d’un centre de formation, d’un centre d’affaires et d’un centre de conférence, le tout connecté par une infrastructure haut débit. Son statut de Zone économique spéciale pour les technologies (ZEET) offre des incitations fiscales attractives : exonération de TVA, allègement des droits d’importation et un taux d’impôt sur les sociétés réduit à 2,5 %.
Déployé sur deux campus à Praia (île de Santiago) et à Mindelo (île de São Vicente), TechPark CV héberge déjà 23 entreprises et pourra accueillir jusqu’à 1500 professionnels. Il aspire à devenir un pôle d’innovation, de formation et d’expérimentation, tout en attirant des investissements étrangers.
Des ambitions régionales et inclusives
En plus d’attirer des entreprises locales et internationales, TechPark CV se positionne comme un moteur du développement de secteurs technologiques clés tels que l’intelligence artificielle, la blockchain, la fintech, le big data et l’Internet des objets (IoT). Le Cap-Vert entend également renforcer sa coopération régionale à travers un partenariat avec la CEDEAO, afin de contribuer à l’essor de l’innovation numérique en Afrique de l’Ouest.
Le projet place l’intégration des talents locaux au cœur de sa stratégie. Il favorise les partenariats avec les institutions universitaires et entend créer des opportunités d’emploi pour la jeunesse capverdienne, contribuant ainsi au développement du capital humain et au renforcement de l’économie nationale.
Samira Njoya
Lire aussi:
Le gouvernement capverdien prévoit de numériser 60 % des services publics essentiels d'ici 2026.
Grâce au succès de son système de paiement unifié, l'Inde a enregistré une forte croissance des paiements numériques. Aujourd’hui, l'Inde s'affirme comme un acteur majeur dans l’accompagnement des nations souhaitant déployer des solutions de paiement numérique efficaces.
L’Inde s’engage à mettre son expertise en infrastructure publique numérique au service de l’Angola. L’information a été rendue publique le vendredi 3 mai, à l’issue d’une rencontre à New Delhi entre le président angolais, João Lourenço (photo, à gauche), en visite officielle, et le Premier ministre indien, Narendra Modi (photo, à droite). L’initiative vise à améliorer la gouvernance électronique et à faciliter l'accès aux services publics pour les citoyens angolais.
Selon un communiqué conjoint, l’Inde a « approuvé une ligne de crédit de 200 millions de dollars pour la défense de l'Angola et collaborera dans les domaines de l'infrastructure publique numérique, de l'espace et des soins de santé ». Ce partenariat vise à introduire en Angola le modèle indien d’infrastructure publique numérique (DPI), un système interopérable permettant de numériser les services administratifs, de favoriser l’inclusion financière et de connecter les citoyens à des services essentiels.
Cette collaboration pourrait permettre à l’Angola de déployer des identités numériques, des plateformes de paiements électroniques ou encore des registres sociaux unifiés. Elle prévoit également une coopération dans le domaine spatial ainsi que des formations aux compétences numériques.
L’annonce s’inscrit dans un contexte de rapprochement stratégique entre les deux pays, qui célèbrent cette année 40 ans de relations diplomatiques. Elle illustre aussi l’ambition de l’Inde de renforcer sa présence technologique sur le continent africain. L'Inde a déjà mis en œuvre des systèmes similaires en Afrique, notamment via sa plateforme d'identité numérique MOSIP (Modular Open Source Identity Platform). Des pays tels que le Maroc, la Sierra Leone, la Guinée et l'Éthiopie ont adopté ou sont en phase de déploiement de cette solution. Par ailleurs, l'Inde collabore avec plusieurs pays africains pour développer des systèmes de paiement numérique inspirés de son interface UPI (Unified Payments Interface), avec des discussions avancées notamment avec le Rwanda.
À terme, ce partenariat pourrait accélérer la modernisation des services gouvernementaux angolais, améliorer l’efficacité administrative et stimuler l’innovation locale. Un appui stratégique pour l’Angola, qui cherche à renforcer sa position dans les classements internationaux de gouvernance numérique. Selon les Nations unies, le pays se classe actuellement 156e sur 193 à l’indice de développement de l’e-gouvernement 2024, avec un score de 0,4149, en dessous de la moyenne africaine (0,4247) et mondiale (0,6382).
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
L'Inde exporte son expertise en paiements numériques vers l'Afrique
Les problèmes de santé de ses populations font perdre à l'Afrique 2400 milliards $ chaque année selon la Banque africaine de développement (BAD). Pourtant, le secteur de la healthtech, qui vise à améliorer l'accès aux soins via des solutions numériques, connaît un ralentissement du financement. En 2024, les start-up africaines opérant dans les technologies de la santé ont levé 65 millions $, soit une chute de 69% par rapport à 2023. Ce recul remet-il en cause le rôle stratégique que la healthtech pourrait jouer sur le continent ?
La baisse des financements est liée au ralentissement général du capital-risque et à la prudence des investisseurs face aux incertitudes économiques. Après le boom des investissements en 2021, le marché mondial du capital-risque a subi une correction en 2022-2023, y compris en Afrique.
« Deux ans après le début de la crise mondiale, il est clair que l'écosystème technologique africain en subit de plein fouet les conséquences, même s'il s'en sort beaucoup mieux que les régions d'Amérique latine et d'Asie du Sud-Est » a indiqué Cyril Collon, partenaire général du fonds transatlantique Partech, en 2024.
Il a ajouté que « malgré cette correction, au cours des 10 dernières années l'écosystème technologique africain a été multiplié par 10 en termes de transactions et de financement, avec environ 20 milliards de dollars investis dans près de 3000 transactions, dont 68% au cours des trois dernières années ».
Selon Partech Africa, les start-up africaines ont levé un total de 5,2 milliards USD en fonds propres en 2021 contre 2,2 milliards USD en 2024. La fintech, segment attirant le plus d’investissement sur le continent, a aussi été négativement impactée par cette sécheresse des capitaux. En 2021, les fintechs africaines levaient 3,2 milliards USD, soit 63% des fonds captés, contre 1,35 milliard USD en 2024.
Un écosystème encore dynamique
La healthtech a attiré plus du milliard de dollars en Afrique ces cinq dernières années, informe Agence Ecofin. De 18 millions USD en 2018, les chiffres ont décuplé l’année suivante pour atteindre 189 millions USD, et un pic de 230 millions USD en 2021. Ces flux ont permis aux innovateurs de multiplier les solutions d’e-santé sur le continent, allant des plateformes de télémédecine à la livraison de médicaments ou de sang par drones dans les zones inaccessibles par route.
Au Kenya, Ilara Health fournit des outils de diagnostic abordables aux prestataires de soins sanitaires dans les zones rurales. Elle s'associe à des services d'intelligence artificielle qu’elle intègre aux plateformes technologiques distribuées aux médecins, améliorant ainsi l’organisation de la prise en charge en milieu rural. Pour mettre en place ses activités, elle s’est tournée vers des investisseurs qui y ont déjà injecté environ 10,8 millions USD depuis son lancement en 2019.
La healthtech camerounaise Waspito met en relation patients et médecins pour des consultations vidéo instantanées via son application mobile accessible sur iOS et sur Android. Depuis son lancement en 2020, elle a capté environ 8,7 millions USD selon Crunchbase, afin de développer sa technologie et s’étendre à d’autres pays africains tels que le Gabon, la Côte d’Ivoire ou encore le Sénégal.
Ces jeunes pousses essayent de combler le déficit en professionnels et infrastructures de santé sur le continent. En 2021, l'Afrique subsaharienne comptait en moyenne 2,3 médecins et 12,6 infirmières/sage-femmes pour 10 000 habitants, contre 39,4 et 89,5 en Europe par exemple. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), il manquera 6,1 millions de professionnels de la santé en Afrique d’ici 2030, une hausse de 45% par rapport à 2013, année où les dernières estimations ont été réalisées.
« L’importante pénurie de professionnels de la santé en Afrique a des implications désastreuses. Sans un personnel adéquat et bien formé, répondre aux défis tels que la mortalité maternelle et infantile, les maladies infectieuses et les maladies non transmissibles, mais aussi la fourniture de services de santé essentiels comme la vaccination reste une bataille difficile » a déclaré en 2022 Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.
Le déploiement à grande échelle de la healthtech : une équation à résoudre
L’accès aux alternatives proposées par les healthtechs se heurte à la faiblesse de l’accès à Internet sur le continent. D’après les données de l’Association mondiale des opérateurs de téléphonie (GSMA), l’Afrique subsaharienne comptait en 2023 320 millions d’utilisateurs de l’Internet mobile pour un taux de pénétration de 27%. Ce chiffre devrait croitre de 6,2% chaque année pour atteindre 520 millions en 2030, soit un taux de pénétration de 37%.
Ceci peut s’expliquer par le coût d’accès aux smartphones, le coût de l’Internet et les défis insfrastructurels. Pour la GSMA, « il est urgent de réformer la fiscalité pour améliorer l'accessibilité financière des smartphones et des services mobiles, dont le coût est un obstacle majeur à l'adoption du haut débit mobile ».
L’Afrique a aussi affiché en 2024 un score de 0,4534 sur 1 à l’indice des infrastructures de télécommunications (TII), selon les Nations unies. Elle a progressé de 27,8% par rapport à 2022 où il était de 0,3548 sur 1. La moyenne mondiale s’est de son côté, établie à 0,6896 sur 1.
Si les différents obstacles sont surmontés, la healthtech pourrait bien devenir un pilier stratégique pour l’amélioration durable du secteur de la santé en Afrique. En mobilisant le numérique pour rapprocher les soins des populations, les start-up opérant sur ce segment réinventent les processus. Reste à savoir si l’écosystème saura attirer à nouveau les financements nécessaires pour franchir le cap de l’expérimentation et réussir l’intégration systémique.
Lire aussi:
Cameroun : Waspito, une solution e-santé pour accéder aux soins en quelques clics
Chaque week-end, la rédaction de We Are Tech Africa vous rappelle les principales informations de la semaine dans le domaine du numérique en Afrique, ainsi que leurs implications.
Cybersécurité : la Côte d’Ivoire adopte un nouveau cadre légal
La Côte d’Ivoire a adopté une réforme majeure de son cadre légal en cybersécurité. Le jeudi 24 avril, l’Assemblée nationale a ratifié l’ordonnance n°2024-950, transférant les compétences de L'Autorité de Régulation des Télécommunications/TIC de Côte d'Ivoire (ARTCI) à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). Désormais, l’ANSSI centralise la protection des réseaux, les audits, la certification et la réponse aux incidents, renforçant ainsi la sécurité numérique nationale.
Cybersécurité : la Côte d’Ivoire adopte un nouveau cadre légal
Congo : deux agences publiques s’associent pour renforcer la cybersécurité
L’Agence de régulation des postes et des communications électroniques du Congo (ARPCE) et l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information (ANSSI) du Congo ont signé un accord pour renforcer la cybersécurité nationale. Ce partenariat prévoit le partage d'informations sur les menaces, la coordination des réponses aux incidents et la création d'un comité conjoint. Le gouvernement a alloué 1,3 million de dollars à l'ANSSI pour 2025, visant un Congo numérique, résilient et souverain.
Congo : deux agences publiques s’associent pour renforcer la cybersécurité
Le Sénégal se dote d’un cadre politique pour encadrer la santé numérique
Le Sénégal a validé un cadre politique pour structurer la santé numérique. Cette initiative vise à coordonner les projets existants, renforcer la gouvernance et protéger les données médicales. Un projet de loi est en préparation pour encadrer l’usage des technologies dans le système de santé. Le Dossier patient informatisé sera étendu à six régions supplémentaires dès cette année.
Le Sénégal se dote d’un cadre politique pour encadrer la santé numérique
Tanzanie : plus de 71 millions de dollars générés par les entreprises en ligne en 9 mois
Entre juillet 2024 et mars 2025, la Tanzanie a collecté environ 71,5 millions de dollars de recettes fiscales auprès de 1 820 entreprises en ligne, principalement dans les paris numériques. Le gouvernement finalise une stratégie nationale de commerce électronique visant à adapter le cadre réglementaire, renforcer les infrastructures numériques et sécuriser les transactions en ligne.
Tanzanie : plus de 71 millions de dollars générés par les entreprises en ligne en 9 mois
Le Kenya adopte une stratégie pour faire de l’IA un moteur de croissance d’ici 2030
Le Kenya a publié sa première stratégie nationale d’intelligence artificielle (IA) pour 2025-2030, visant une adoption éthique et inclusive. Elle cible des secteurs clés tels que la santé, l’agriculture, les services financiers et l’administration publique, tout en renforçant la souveraineté des données et les infrastructures numériques. Cette initiative positionne le pays comme un acteur majeur de l’IA en Afrique.
Le Kenya adopte une stratégie pour faire de l’IA un moteur de croissance d’ici 2030
La douane malgache est la première institution publique à intégrer l’IA dans ses opérations. Le département s’est doté d’une stratégie à l’horizon 2029 pour améliorer l’efficacité opérationnelle et garantir une transparence accrue.
L’administration douanière malgache reçoit actuellement une assistance technique du Fonds monétaire international (FMI) pour accélérer sa transition numérique. Deux experts, Victor Budeau et François Chastel, sont en mission à Antananarivo depuis le jeudi 24 avril. Leur intervention, qui s’achèvera le mercredi 7 mai, inclut des formations intensives sur l’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans les processus douaniers.
L’objectif est de renforcer l’efficience, la précision et la transparence des opérations. Lors d’une réunion de travail, le directeur général des douanes, Ernest Zafivanona Lainkana (photo, au centre), a souligné l’importance de centraliser les données dans une base unifiée pour exploiter pleinement le potentiel de l’IA. Il a également affirmé que cette technologie devait désormais faire partie intégrante des outils de la douane.
Loin d’être un simple test, cette initiative s’inscrit dans une démarche déjà amorcée. L’administration utilise déjà plusieurs solutions reposant sur l’IA : l’analyse automatique d’images (RESNET), le Smart Scanning et le système d’évaluation renforcée des risques (Enhanced Risk Assessment – ERA). Grâce à ces outils, les recettes douanières ont augmenté de 68 % en janvier 2025 par rapport à janvier 2024.
À la lumière de ces résultats, le FMI a désigné Madagascar comme projet pilote en Afrique pour l’intégration de l’IA dans les services douaniers. Une reconnaissance stratégique qui pourrait ouvrir la voie à une feuille de route continentale. D’ici 2029, la douane malgache ambitionne d’étendre ces technologies à d’autres secteurs de contrôle, de renforcer son infrastructure numérique et de partager son expertise à l’échelle régionale.
Lire aussi:
Réduire la fracture numérique : Madagascar équipe ses citoyens en appareils connectés
C’est en mai 2024 que le Kenya a lancé l’élaboration de sa stratégie nationale d’IA. Fruit de consultations multisectorielles et d’un appui international, ce document figure désormais parmi les stratégies nationales d’IA élaborées en Afrique, aux côtés de celles du Nigeria, du Rwanda et de l’Algérie.
Le Kenya a publié sa première stratégie nationale d’intelligence artificielle pour la période 2025-2030. Le document trace les contours d’une vision claire pour une adoption de l’IA éthique, inclusive et tournée vers l’innovation. Il s’inscrit dans le programme plus large de transformation numérique du pays et adresse des signaux forts aux entreprises technologiques internationales, attentives à l’évolution des cadres réglementaires sur les marchés émergents.
Cette stratégie, bien que conçue à l’échelle nationale, reflète une dynamique plus large : l’adaptation des normes internationales de gouvernance de l’IA aux contextes émergents. Elle articule les ambitions de Nairobi autour de plusieurs axes, dont les infrastructures, la souveraineté des données, les cas d’usage sectoriels et l’innovation responsable. Elle esquisse également les grandes lignes d’une future législation.
La gouvernance des données est l’un des axes majeurs du texte. Le Kenya affiche son intention de bâtir un écosystème d’IA fondé sur des référentiels locaux, dans le respect de la confidentialité, de la cybersécurité et des principes éthiques. Ce choix pourrait impliquer de nouvelles contraintes pour les multinationales opérant via des infrastructures en nuage ou des flux transfrontaliers de données, notamment en matière de localisation ou de consentement.
Les secteurs ciblés sont ceux où l’IA peut avoir un impact rapide et structurant : santé, agriculture, services financiers, administration publique. Des cas d’usage comme les diagnostics assistés, la médecine personnalisée ou l’automatisation des services administratifs sont identifiés comme prioritaires, avec une attention particulière à la gestion des risques éthiques.
La stratégie prévoit par ailleurs le développement d’une infrastructure numérique nationale robuste, appuyée sur des partenariats public-privé. Centres de données, ressources en nuage et pôles de recherche technologique seront au cœur de cette transformation. Ces investissements pourraient ouvrir des débouchés commerciaux importants, tout en suscitant de nouvelles exigences en matière de conformité, notamment pour les fournisseurs de cloud et les opérateurs télécoms.
Bien que le texte n’ait pas de portée juridique immédiate, il trace les contours d’un futur cadre de régulation de l’IA au Kenya. La stratégie aborde des thèmes sensibles comme la classification des risques, la surveillance réglementaire ou encore la gouvernance algorithmique.
Avec ce document, le Kenya entend s’imposer comme un acteur clé du débat africain sur l’IA. Alors que d’autres pays du continent comme le Nigeria, le Rwanda ou l’Algérie ont déjà adopté leurs propres stratégies nationales, Nairobi veut affirmer sa vision, renforcer ses partenariats internationaux et anticiper les normes à venir. La stratégie s’aligne ainsi sur plusieurs initiatives continentales, notamment celles portées par l’Union africaine, la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) ou l’Alliance Africa Smart.
Le défi sera d’opérationnaliser cette vision. Le succès pourrait dépendre de la capacité à mobiliser des investissements publics et privés, à établir une gouvernance ouverte mais rigoureuse, et à renforcer les compétences locales, notamment par la formation, la recherche et le développement de pôles technologiques.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
Le Kenya annonce le lancement de sa Stratégie nationale d'intelligence artificielle
L’indice de développement des TIC de l’Union internationale des télécommunications (UIT) place l’Afrique parmi les régions du monde avec le plus faible niveau de préparation technique et humain à l’économie numérique. Cette faiblesse entrave grandement la capacité du continent à saisir les opportunités des nouvelles technologies de rupture.
Alors que l’Intelligence artificielle redéfinit les économies à l’échelle mondiale, son adoption dans les pays en développement, particulièrement en Afrique, soulève des enjeux cruciaux. Elle peut accélérer la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), en favorisant l'agriculture intelligente et les réseaux énergétiques, en optimisant les chaînes de production et d'approvisionnement, en améliorant la gestion de l'eau et l'urbanisme, et bien plus encore. Des études de cas montrent que l'IA stimule la productivité et améliore les conditions de vie, si elle est soutenue par des politiques et des compétences adaptées. La CNUCED, dans son indice de préparation aux technologies frontières, évalue la capacité des nations à intégrer l’IA. Trois points critiques émergent pour l'adoption et le développement efficace de l'IA. Le diagnostic pour l’Afrique autour de ces indicateurs révèle des disparités frappantes avec le reste du monde, mettant aussi en lumière les investissements cruciaux à réaliser pour une transformation 4.0 entière et réussie.
Infrastructures
Cet indicateur désigne la connectivité numérique et la puissance de calcul, ainsi que les réseaux, l'architecture et les ressources associées nécessaires pour créer, former et utiliser des solutions d'IA au sein d'une communauté ou d'un pays.
Pays aux infrastructures les mieux préparées pour l’IA
Source : CNUCED
De nombreux pays en Afrique font partie des moins bien préparés à l'IA dans le monde. La grande majorité d’Afrique en fait. Le continent accuse un retard considérable en ce qui concerne la pénétration d'Internet et des investissements dans les services de télécommunications. En 2024, seuls 38% d’Africains avaient accès à Internet contre une moyenne mondiale de 68%, selon l’Union Internationale des télécommunications (UIT). Selon Africa Analysis, l'inventaire total des réseaux terrestres de fibre optique opérationnels en Afrique était d’environ 1 337 158 km, avec 112 373 km en construction. Cependant, certains pays d'Afrique du Nord, comme l'Égypte et le Maroc, dépassent les moyennes mondiales en matière de pénétration d'Internet et d'investissements dans les télécommunications, en partie grâce aux câbles sous-marins. L'Égypte, grâce à sa position géographique et ses liens avec de nombreux opérateurs de câbles sous-marins, pourrait devenir une plaque tournante connectant trois continents. Le pays à lui seul est connecté à plus d’une quinzaine de câbles sous-marins de fibre optique. Il affiche près de 90 % de pénétration d’Intranet.
Nombre d'infrastructures de services Cloud, mi-2024.
Source : CNUCED
L'Afrique est également en retard en ce qui concerne le trafic et l'adhésion aux points d'échange Internet (IXP) par rapport aux autres continents. Malgré ses 53 points d’échange localisés dans 36 pays, selon Internet Society, seuls trois pays ont atteint l’objectif fixé en 2010 de localiser 80% de l’intégralité du trafic Internet en local à l’horizon 2020, avec seulement 20% passant par les lignes internationales afin de réduire la latence et les coûts.
En matière de services d'infrastructure cloud, l'Afrique est également en retard par rapport aux autres régions. L’Afrique du Sud, le Kenya et le Nigeria abritent aujourd’hui le plus grand nombre de centres de données sur le continent. Soit plus de 10 centres. Néanmoins, certains pays accélèrent la numérisation, suscitant l’intérêt croissant des investisseurs du secteur du stockage et de l’hébergement des données.
Données
Les données sont nécessaires pour former les modèles d'IA, avec des données dédiées pour appliquer les modèles à différents cas d'utilisation. Les données ne sont pas seulement un intrant, elles sont également générées par les systèmes d'IA. La plupart des pays d'Afrique sont considérés comme des « retardataires » en matière de préparation des données pour l'IA, avec un faible potentiel d'adoption et de développement. La faible numérisation de la majorité des pays d’Afrique prive le continent de données à exploiter pour nourrir les modèles d’intelligence artificielle indispensables à l’analyse d’informations. Selon l’indice 2024 de développement du gouvernement électronique, seuls deux pays africains affichent un score très élevé : l’Afrique du Sud et l’île Maurice. Dix-sept pays affichent un score élevé. Le reste des trente-cinq pays du continent affichent des scores en dessous de la moyenne mondiale.
Pays à l’accessibilité Internet favorable pour l’IA
Source : CNUCED
En ce qui concerne le trafic de données à haut débit fixe, indispensable pour le flux de données, les pays les moins avancés (PMA), dont beaucoup sont africains, sont en retard par rapport aux pays en développement. Dans son « Mobility Report » de novembre 2024, la société Ericsson indique que le trafic de données mobile ne connaîtra qu’une hausse de 21% entre 2024 et 2028. Soit de 5,4 à 17 Gigabits par mois. Un volume bien en dessous des autres régions et même de la moyenne mondiale qui passera de 19 à 40 Gigabits par mois.
Trafic des points d'échange Internet et nombre de membres, mi-2024
Source : CNUCED
Le retard en matière de points d’échange Internet et de transformation de ces derniers pèse également sur la consommation d’Internet et la production de données.
Compétences
En moyenne, les PMA, dont une grande partie se trouve en Afrique, enregistrent des scores nettement inférieurs à ceux des pays en développement et développés dans toutes les dimensions de l'indice de préparation aux technologies frontières, et l'écart est particulièrement important pour l’indice des compétences.
Les pays africains obtiennent des scores relativement faibles en matière de développeurs par rapport à la population en âge de travailler et de part de la population en âge de travailler ayant fait des études supérieures, note la CNUCED.
Pays aux compétences en matière d'IA (Image préparation IA.4)
Source : CNUCED
Cependant, des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Ghana et le Kenya ont connu une croissance rapide du nombre de développeurs, devenant des pôles prometteurs pour les entreprises technologiques et des semis précieux pour l’innovation tech. L'Éthiopie, l’Egypte connaissent également une croissance rapide du nombre de personnes avec des compétences numériques de niveau intermédiaire et élevé grâce à une multiplication des collaborations internationales. Des initiatives privées comme Andela et bien d’autres portées par de grands groupes à l’instar de Microsoft, Google ou encore Huawei laissent également entrevoir des lendemains meilleurs pour la future main-d’œuvre africaine.
Le rapport de la CNUCED dresse un constat clair : l’Afrique est aujourd’hui mal préparée à la révolution de l’IA. Pourtant, des signaux forts montrent que le continent peut rattraper son retard en accélérant les investissements dans l’infrastructure numérique, en libérant le potentiel des données et en formant massivement aux compétences tech. Des pays comme l’Egypte, le Kenya et le Nigeria montrent la voie. Si ces efforts se généralisent, l’Afrique pourrait non seulement adopter l’IA, mais aussi en devenir un acteur majeur, créant des solutions adaptées à ses défis uniques.
Muriel EDJO
Lire aussi:
L’IA, un levier économique pour les grands événements sportifs en Afrique (BearingPoint)
Dans sa nouvelle stratégie numérique, le Sénégal place la santé numérique parmi ses priorités. L’adoption de nouvelles orientations politiques vise à renforcer et structurer les initiatives déjà engagées.
Le Sénégal dispose désormais d’un cadre politique de santé numérique, destiné à structurer la numérisation du secteur médical. Validé le lundi 28 avril par le ministre de la Santé et de l’Action sociale, Ibrahima Sy, ce document vise à intégrer les technologies numériques dans les services de santé, tout en améliorant leur gouvernance et leur efficacité.
S’exprimant sur ce nouveau cadre, le ministre a insisté sur la nécessité de mieux coordonner les multiples initiatives numériques déjà en cours, souvent mises en œuvre de manière dispersée. L’un des objectifs majeurs est d’éviter les chevauchements et d’optimiser les efforts. Il a également souligné l’urgence d’un cadre juridique robuste, indispensable pour garantir la sécurité et la confidentialité des données de santé des citoyens.
Dans cette dynamique, un projet de loi sur la santé numérique est en cours de finalisation. Il sera prochainement soumis au Secrétariat général du gouvernement. Ce texte vise à encadrer formellement l’usage des technologies dans le système de santé, en définissant des règles claires pour la collecte, le stockage et l’exploitation des données médicales.
Ces initiatives s’inscrivent dans le cadre du Projet d’accélération de l’économie numérique (PAEN), financé par la Banque mondiale à hauteur de 150 millions de dollars jusqu’en 2028. Le PAEN vise notamment à renforcer la connectivité haut débit, résiliente face aux aléas climatiques, et à encourager l’adoption des services publics en ligne, dont le Dossier patient informatisé (DPI).
Le programme prévoit, dès cette année, l’extension du Dossier patient informatisé (DPI) à six régions supplémentaires, après une phase pilote menée dans plusieurs établissements de Dakar, dont les hôpitaux Abass Ndao et Thierno Birahim Ndao, ainsi que le centre de santé Khadim Rassoul et le poste de santé HLM Fass.
Malgré ces avancées, plusieurs défis demeurent. L’un des enjeux majeurs sera d’éviter que la numérisation n’accentue les inégalités d’accès aux soins, notamment dans les zones rurales ou mal connectées. La démocratisation des outils numériques, l’inclusion des populations les plus vulnérables et la formation du personnel de santé seront déterminants pour réussir cette transition.
La réussite de cette transformation devrait aussi s'appuyer sur une gouvernance rigoureuse des données de santé, afin de préserver la confiance des citoyens dans ces nouveaux systèmes. Son succès dépendra ainsi de sa capacité à allier innovation, équité et sécurité.
Samira Njoya
Lire aussi:
Sénégal : six projets pour accélérer la numérisation du système de santé
À l’heure où les transactions en ligne connaissent une expansion fulgurante en Afrique, la Tanzanie s’engage dans un processus d’adaptation de sa fiscalité numérique. L’objectif est de capter les revenus générés par les plateformes, qu’elles soient locales ou étrangères.
Entre juillet 2024 et mars 2025, le gouvernement tanzanien a collecté 192,78 milliards de shillings tanzaniens (environ 71,5 millions de dollars) de recettes fiscales auprès de 1820 entreprises opérant en ligne, principalement dans le secteur des paris numériques. Ces chiffres ont été partagés au Parlement le mercredi 29 avril par le vice-ministre de l’Industrie et du Commerce, Exaud Kigahe (photo).
À cette même occasion, le responsable gouvernemental a annoncé que la Tanzanie finalise actuellement une stratégie nationale de commerce électronique. Cette feuille de route vise à adapter le cadre réglementaire aux évolutions du marché numérique et à maximiser les recettes fiscales générées par ce secteur en plein essor.
Parmi les mesures clés, la stratégie prévoit de renforcer les infrastructures des technologies de l'information et de la communication, de réviser les politiques publiques et les réglementations en vigueur, ainsi que d’améliorer les services de communication, de transport et de logistique. Elle met également l’accent sur la sécurisation des transactions en ligne et la sensibilisation du public à l’adoption des plateformes numériques.
Cette stratégie viendra s’articuler avec le dispositif fiscal déjà en place pour encadrer les services numériques. Depuis juillet 2022, la Tanzanie applique une taxe sur les services numériques (DST) de 2 % aux fournisseurs non-résidents de services électroniques, en plus d’une retenue à la source de 3 % pour les plateformes facilitant les échanges. Ces services sont également soumis à la TVA à un taux de 18 %. Ce cadre vise à assurer que les revenus générés localement, notamment par des acteurs étrangers, soient imposés équitablement.
En misant sur cette stratégie, les autorités espèrent stimuler l’usage du commerce en ligne, renforcer la collecte fiscale et lutter contre les activités numériques non déclarées. L’enjeu pour les autorités sera désormais de consolider cette croissance tout en encadrant les risques associés au secteur numérique, en particulier dans des domaines sensibles tels que les jeux d’argent en ligne.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
Sénégal : plus de 1,7 million $ de TVA récolté en un an grâce aux services numériques
Avec ce partenariat stratégique, le Sénégal se donne les moyens de transformer ses zones industrielles en centres de compétitivité numérique. L’objectif est d’intégrer des solutions innovantes et durables pour renforcer la productivité, l’efficacité énergétique et l’attractivité du secteur industriel.
Le pays ambitionne de faire de ses zones industrielles des moteurs de transformation numérique. Le lundi 28 avril 2025, l’Agence d’Aménagement et de Promotion des Sites Industriels (APROSI) et Orange Business Sénégal, filiale B2B du groupe SONATEL, ont signé une convention de partenariat stratégique visant à équiper les pôles industriels du pays de services digitaux de nouvelle génération.
Nous venons de sceller un partenariat stratégique avec l’APROSI pour accompagner la transformation numérique de l’industrie sénégalaise, en phase avec l'Agenda de Transformation Économique 2050.
— Groupe Sonatel (@GroupeSonatel) April 28, 2025
Ensemble, nous posons les bases d’une industrie digitale, où connectivité, data, IoT… pic.twitter.com/KBjNYEyOes
L’alliance vise à transformer les sites industriels en plateformes intelligentes, connectées, durables et compétitives, à même de répondre aux exigences de l’industrie 4.0. Orange Business apportera son expertise sur des volets clés comme la fibre optique, les réseaux privés, les services cloud et la cybersécurité. Cet accord va encore plus loin. Il prévoit également le déploiement de solutions de gestion énergétique intelligente, d’éclairage public connecté, de sécurité et de mobilité au sein des sites industriels.
Le partenariat inclut aussi un accompagnement des entreprises dans leur transition numérique. Des cas d’usage concrets autour de l’Internet des Objets (IoT), de la blockchain, de l’intelligence artificielle (IA) ou encore de la maintenance prédictive seront proposés pour moderniser les outils de production. Un comité stratégique ainsi qu’un dispositif de suivi-évaluation seront mis en place pour assurer la bonne exécution des projets.
Ce chantier s’inscrit dans la dynamique de l’Agenda de Transformation Économique Sénégal 2050, qui place le numérique au cœur des leviers de croissance et de compétitivité du pays. Il répond également à un contexte régional marqué par une concurrence accrue entre les pays d’Afrique de l’Ouest pour attirer les investissements industriels. Dans cette bataille stratégique, le développement de zones industrielles connectées et performantes pourrait offrir au Sénégal un avantage déterminant.
Le secteur industriel pèse environ 25 % du PIB sénégalais. En l’outillant avec des technologies de pointe, le pays espère améliorer sa productivité, fluidifier la logistique, optimiser la consommation énergétique et renforcer la traçabilité des chaînes de valeur. Le numérique devient ainsi un levier stratégique pour bâtir une industrie plus résiliente, plus compétitive et tournée vers l’avenir.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
Transformation numérique : le Sénégal veut approfondir son partenariat avec Huawei
Parmi les chantiers stratégiques engagés par le Sénégal, la santé numérique s’impose comme une priorité. Un an après le lancement du PAENS, les résultats sont jugés encourageants avec plusieurs projets déjà opérationnels.
Le Sénégal a lancé six projets majeurs pour accélérer la numérisation de son système de santé, a annoncé, lundi 28 avril, Ibrahima Khaliloulah Dia, directeur de la Cellule de la carte sanitaire et sociale, de la santé digitale et de l’observatoire de la santé (CSSDOS). Cette initiative vise à transformer la gouvernance sanitaire du pays en s’appuyant sur des solutions technologiques innovantes.
Les projets concernent la mise en œuvre du dossier patient informatisé, le développement de la télémédecine, la création d’un Système d’information hospitalier (SIH), d’un Système d’information géographique en santé (SIGS), ainsi que la numérisation de la gestion des médicaments et des activités communautaires. Un sixième axe, consacré à la gouvernance numérique, vient structurer l’ensemble.
« À ce jour, deux hôpitaux, un centre de santé et un poste de santé utilisent le dossier patient numérique, totalisant plus de 127 000 patients enregistrés, plus de 355 000 prestations financières et plus de 66 000 actes médicaux », a précisé Ibrahima Khaliloulah Dia.
Ces avancées s’inscrivent dans le cadre du Projet d’accélération de l’économie numérique au Sénégal (PAENS), en cohérence avec la stratégie numérique nationale, le New Deal Technologique. La santé y occupe une place centrale, au même titre que l’éducation et l’administration. L’objectif est double : renforcer l’accès équitable aux soins et positionner le pays comme un leader régional en matière de santé numérique.
À l’horizon 2034, les autorités visent notamment une couverture santé entièrement numérisée, un recours accru à la télémédecine pour limiter les évacuations coûteuses, ainsi qu’une prise de décision fondée sur des données fiables et en temps réel. Selon les objectifs fixés par la CSSDOS, d’ici la fin de l’année, 20 % des centres de santé devront adopter le dossier médical numérique, 30 % des structures sanitaires seront connectées à Internet, et 1,5 million de Sénégalais, dont 50 % de femmes, disposeront d’un espace de santé numérique sécurisé. Par ailleurs, 2000 actes de télémédecine réglementés devront être réalisés.
Samira Njoya
Lire aussi:
Le Sénégal lance son Projet d'accélération de l'économie numérique
Pour répondre aux nouveaux enjeux de cybersécurité, le gouvernement ivoirien a entrepris une réforme de son arsenal juridique numérique, marquée par une redéfinition des compétences en matière de sécurité des systèmes d’information.
L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité, le jeudi 24 avril, le projet de loi portant ratification de l’ordonnance n°2024-950 du 30 octobre 2024 relative à la sécurisation de l’espace numérique. Présenté par le ministre de la Transition numérique et de la Digitalisation, Kalil Konaté, ce texte modernise le cadre juridique des échanges électroniques et renforce les dispositifs de cybersécurité en Côte d’Ivoire.
Le changement principal porte sur l’abrogation de l’article 50 de la loi n°2013-546, qui confiait à l’Autorité de régulation des télécommunications/TIC (ARTCI) la responsabilité de la sécurité des réseaux, de l’audit et de la certification des systèmes d’information, ainsi que de la délivrance des certificats électroniques. Désormais, ces prérogatives sont transférées à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), organisme spécialisé dans la cybersécurité.
En parallèle, les articles 3 et 17 de l’ordonnance n°2017-500, relatifs aux échanges électroniques entre les citoyens et les administrations, sont modifiés pour remplacer les références à l’ARTCI par celles à « l’organisme compétent », désignant l’ANSSI.
L’ANSSI est désormais chargée d’assurer la protection des réseaux et des systèmes d’information de l’État et des infrastructures critiques, de coordonner les réponses aux incidents de cybersécurité, de réaliser des audits de sécurité, de certifier les systèmes d’information, ainsi que de délivrer des certificats électroniques aux acteurs établis en Côte d’Ivoire. Elle a également pour mission de sensibiliser les administrations et les opérateurs économiques aux bonnes pratiques en matière de cybersécurité.
Ce transfert de responsabilités vise à mieux protéger l’espace numérique ivoirien en s’appuyant sur un acteur dédié et techniquement spécialisé. Il s’agit également d’assurer une meilleure interconnexion des systèmes d’information publics, dans un cadre garantissant la transparence, la neutralité technologique et la sécurité. La ratification de cette ordonnance ouvre ainsi la voie à la mise en œuvre de politiques publiques numériques renforcées, dans un environnement juridique plus cohérent et aligné sur les standards internationaux en matière de cybersécurité.
Samira Njoya
Lire aussi:
Côte d’Ivoire : le VITIB recherche 311 millions $ pour accélérer son développement
Depuis sa création en 2004, le VITIB poursuit son ambition de faire de la Côte d'Ivoire un acteur majeur dans l'innovation technologique. Aujourd'hui, il intensifie ses efforts pour attirer des investissements stratégiques et devenir un véritable pôle technologique en Afrique de l'Ouest.
Le Village des Technologies de l’Information et de la Biotechnologie (VITIB), installé à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire, intensifie ses démarches pour lever 180 milliards de francs CFA, soit 311 millions de dollars, destinés à financer son plan de développement à l’horizon 2028. L’objectif est de transformer sa zone franche en un hub technologique intégré, moteur d’innovation et de croissance en Afrique de l’Ouest.
Dans cette perspective, une délégation du VITIB s’est récemment rendue en Inde pour rencontrer investisseurs et partenaires potentiels. Les échanges ont porté sur les opportunités d’investissement dans le parc, l’extension des infrastructures, les modalités de partenariat industriel et financier, ainsi que l’intégration de solutions technologiques innovantes. Parmi les acteurs rencontrés figurent notamment AXL, OKAYA Group et des représentants de l’Exim Bank of India.
« L’Inde occupe une place particulière dans l’histoire du VITIB. Peu après sa création, le premier parc technologique de la Côte d’Ivoire a bénéficié d’un soutien financier déterminant grâce à un prêt de l’Exim Bank of India, qui a permis la construction d’infrastructures clés. En hommage à ce partenariat, une partie du parc technologique a été baptisée Mahatma Gandhi », rappelle le VITIB dans un communiqué.
S’étendant sur plus de 600 hectares, le VITIB est structuré en trois zones : production, administration et résidentielle. Il accueille des entreprises innovantes dans les secteurs des technologies de l’information et de la biotechnologie. Il offre un environnement fiscal attractif, avec une exonération d’impôts durant les cinq premières années d’activité, suivie d’un taux réduit, ainsi que des infrastructures modernes telles que des datacenters, une connexion en fibre optique et un guichet unique facilitant l’implantation des entreprises.
Son plan stratégique vise à créer 40 000 emplois qualifiés et à attirer 1000 milliards de francs CFA d’investissements directs étrangers. Le VITIB aspire ainsi à positionner la Côte d’Ivoire comme la vitrine technologique de l’Afrique de l’Ouest, en développant un écosystème favorable à l’innovation et à la compétitivité.
Ce roadshow en Inde s’inscrit dans une démarche plus large visant à promouvoir le parc technologique, à attirer de nouveaux acteurs des secteurs technologique et biotechnologique, et à explorer de nouveaux mécanismes de financement. En s’appuyant sur son partenariat historique avec l’Inde, le VITIB cherche à donner une nouvelle impulsion à son projet et à faire de Grand-Bassam un centre d’innovation incontournable en Afrique.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi:
Côte d’Ivoire : ST DIGITAL pose la première pierre d’un datacenter à Grand-Bassam