Face à un déficit budgétaire estimé à 14% du PIB et une dette publique à 119% en 2024, le Sénégal explore de nouveaux leviers économiques, en s’appuyant entre autres sur le potentiel fiscal du secteur du numérique.
Dans un contexte macroéconomique difficile, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko (photo), a dévoilé en début de mois Jubbanti-Koom, le Plan de redressement économique et social du pays, pierre angulaire de la Vision 2050. Objectif : restaurer la soutenabilité budgétaire tout en finançant un développement plus inclusif. Pour ce faire, l’exécutif mise résolument sur le numérique, identifié comme un levier stratégique à la fois pour la croissance et pour l’optimisation des recettes publiques.
Le plan s’articule autour de plusieurs mesures fiscales ciblant des segments en forte croissance : jeux en ligne, mobile money, publicité numérique, vidéos à la demande ou encore revenus des influenceurs. Le gouvernement entend ainsi exploiter les niches fiscales du digital souvent sous-régulées, pour dégager de nouvelles marges de manœuvre budgétaires.
Encadrer et taxer les paris en ligne : 400 milliards FCFA de revenus attendus par an
Parmi les mesures phares figure la taxation du Produit Brut des Jeux (PBJ) issus des paris sportifs et jeux de hasard en ligne, majoritairement opérés par des sociétés étrangères. Une fiscalité sur les gains des joueurs est également prévue. Cette réforme vise non seulement à générer environ 400 milliards FCFA de recettes fiscales annuelles, mais aussi à protéger les consommateurs sénégalais, notamment les plus jeunes, des dérives potentielles d’un cadre insuffisamment réglementé.
Numérisation de la commande publique, mobile money et fiscalité de l’audiovisuel
La réforme prévoit par ailleurs une numérisation renforcée de la commande publique, outil qui aura le double effet de rationnaliser les dépenses publiques et d’améliorer la traçabilité des flux financiers. La publicité en ligne, les vidéos à la demande et les revenus tirés des contenus numériques seront eux aussi désormais intégrés dans l’assiette fiscale. Autre axe stratégique, l’optimisation de la fiscalité sur le mobile money, devenu un canal privilégié de transfert d’argent pour des millions de Sénégalais.
Une transformation structurelle du cadre fiscal numérique
Au-delà des mesures immédiates, le plan prévoit un volet technique visant à préparer l’économie à l’émergence de nouveaux services digitaux. Cela passe notamment par l’accélération de l’identification numérique, indispensable à l’efficacité des réformes, et par le déploiement d’infrastructures tech viables, comme spécifié dans le New Deal Technologique.
Dans un pays où le numérique pèse désormais lourd dans l’économie informelle, ces mesures devraient permettre de réduire l’évasion fiscale, de mieux encadrer les acteurs du digital et de structurer un écosystème plus formel et productif. À terme, le Sénégal espère transformer ce secteur en un véritable moteur de croissance et d’équité fiscale.
Samira Njoya
Edité par : Feriol Bewa
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