En Afrique, l’e-commerce connaît un essor rapide porté par une population jeune et connectée. La Mauritanie, qui peine encore à exploiter pleinement ce potentiel, veut combler son retard et capitaliser sur ce marché en pleine expansion.
Le gouvernement mauritanien, via le ministère de la Transformation numérique, de l’Innovation et de la Modernisation de l’administration, appuyé par la Coopération allemande (GIZ), a officiellement validé le mardi 28 octobre sa Stratégie nationale de commerce électronique 2026–2030. Le document marque une étape décisive dans la mise en place d’un commerce digital plus inclusif, durable et compétitif.
La feuille de route prévoit, entre autres, de faciliter l’accès des femmes entrepreneures aux marchés en ligne, de favoriser la création d’emplois pour les jeunes à travers le freelancing et les plateformes numériques, d’intégrer les petits commerçants dans l’économie formelle par la numérisation, et d’améliorer les recettes fiscales de l’État par une meilleure traçabilité des transactions. Ces ambitions reposent sur un marché encore émergent, où le taux de pénétration d’Internet atteint 37,4 % en 2025.
Cette stratégie s’inscrit dans un contexte de transformation numérique accélérée, alors que le marché africain du commerce électronique devrait croître de 105 % d’ici 2030, passant de 55 à 112,73 milliards de dollars selon les estimations de TechCabal Insights. La Mauritanie entend tirer parti de cette dynamique pour stimuler sa compétitivité et positionner son économie dans les chaînes de valeur régionales du numérique.
Cependant, la réussite de la mise en œuvre dépendra de la capacité du pays à surmonter plusieurs défis structurels, dont une couverture mobile et Internet encore inégale, une forte dépendance aux paiements en espèces et un faible taux de bancarisation. Selon la CNUCED, l’inclusion financière en Mauritanie demeure limitée à 20,9 %, avec des disparités notables entre les genres (15,5 % pour les femmes) et les jeunes (13,1 %).
La stratégie ambitionne ainsi de créer un environnement propice à l’essor du commerce électronique national. Elle pourra aider à renforcer l’inclusion numérique, élargir l’accès aux plateformes numériques pour les acteurs économiques marginalisés, améliorer la transparence des flux financiers et accroître les recettes publiques grâce à la formalisation des échanges. À terme, elle vise à permettre à la Mauritanie de bâtir un écosystème e-commerce structuré, compétitif et porteur de croissance durable.
Samira Njoya
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Face à l’essor du numérique et à la vitalité de son écosystème entrepreneurial, le Maroc mise sur l’innovation et l’accompagnement des jeunes talents pour renforcer la création d’entreprises digitales et stimuler la croissance économique.
L’Agence de Développement du Digital (ADD) et l’Association de Gestion du Centre des Très Petites Entreprises Solidaires (CTPES) ont signé, le lundi 27 octobre, une convention de partenariat à Salé. L’accord vise à promouvoir l’innovation et l’entrepreneuriat digital inclusif dans la région de Rabat-Salé-Kénitra, à travers l’Incubateur Digital Solidaire (IDS).
🚀 𝐒𝐢𝐠𝐧𝐚𝐭𝐮𝐫𝐞 𝐝’𝐮𝐧𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐯𝐞𝐧𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐞 𝐩𝐚𝐫𝐭𝐞𝐧𝐚𝐫𝐢𝐚𝐭 𝐞𝐧 𝐟𝐚𝐯𝐞𝐮𝐫 𝐝𝐞 𝐥’𝐞𝐧𝐭𝐫𝐞𝐩𝐫𝐞𝐧𝐞𝐮𝐫𝐢𝐚𝐭 𝐝𝐢𝐠𝐢𝐭𝐚𝐥 𝐢𝐧𝐜𝐥𝐮𝐬𝐢𝐟
— Agence de Développement du Digital-ADD (@ADD_MAROC) October 27, 2025
L’Agence de Développement du Digital et l’Association de Gestion du Centre des Très Petites Entreprises… pic.twitter.com/jF5mbexxfc
Dans le cadre de ce partenariat, les deux institutions prévoient de mutualiser leurs ressources et leurs expertises pour soutenir les porteurs de projets à fort potentiel. Elles entendent garantir l’accès aux infrastructures de l’IDS, notamment son FabLab, offrir un appui technique et stratégique aux startups digitales, renforcer les capacités par des formations ciblées et intégrer les projets accompagnés dans les dispositifs numériques et plateformes développés par l’ADD.
Cette collaboration s’inscrit dans la continuité de la stratégie « Maroc Digital 2030 », qui trace la feuille de route du Royaume en matière de transformation numérique. Le plan ambitionne la création de 3000 start-up labellisées d’ici 2030, la mobilisation de 7 milliards de dirhams (environ 758 millions USD) de financements et la génération de 240 000 emplois directs dans le secteur. Il vise également à porter les exportations numériques à 40 milliards de dirhams à l’horizon 2030, contre 13,4 milliards de dirhams enregistrés au premier trimestre de l’année en cours.
Le partenariat intervient dans un contexte entrepreneurial dynamique. Dans la région de Rabat-Salé-Kénitra, 6399 entreprises ont été créées au cours des sept premiers mois de 2024, selon l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC). Au niveau national, l’écosystème start-up marocain est également en progression. Le pays se classe désormais 88ᵉ au rang mondial et 9ᵉ en Afrique pour son écosystème de start-up, avec une croissance estimée à +23 % en 2025 selon le Global Startup Ecosystem Index 2025 du cabinet de conseil américain StartupBlink.
Au-delà du soutien à l’entrepreneuriat, cette convention marque une étape importante dans la territorialisation de la politique nationale du numérique. En rapprochant les dispositifs d’accompagnement des jeunes porteurs de projets et des acteurs locaux, elle entend renforcer l’inclusion numérique, favoriser la création de valeur et encourager l’émergence d’un tissu entrepreneurial régional capable de contribuer durablement à la croissance économique du Maroc.
Samira Njoya
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Déterminée à concrétiser ses ambitions numériques d’ici cinq ans, l’Algérie renforce sa gouvernance digitale. La mise en place d’un comité scientifique traduit une volonté de coordonner efficacement les efforts publics et privés autour d’une même vision.
Le gouvernement algérien a inauguré, jeudi 23 octobre à Alger, le Comité scientifique et technique du Haut‑Commissariat à la numérisation (CSTHCN), organe consultatif chargé d’orienter les politiques numériques nationales. La cérémonie a été animée par Meriem Benmouloud (photo, à gauche), haut-commissaire à la numérisation, qui a présenté cette instance comme une nouvelle étape dans le processus de transformation numérique du pays, engagé dans une démarche progressive et structurée vers la vision « Algérie Numérique 2030 ».
Les quinze membres du Comité, dont trois issus de la diaspora, rassemblent des experts reconnus dans les domaines de la numérisation, des technologies de l’information, de l’intelligence artificielle, des mathématiques, de l’économie et des transactions financières. Le Comité est chargé d’appuyer le gouvernement dans la définition et la mise en œuvre de sa stratégie numérique. Ses missions portent notamment sur la formulation de recommandations, l’évaluation des projets législatifs et réglementaires relatifs à la digitalisation, ainsi que la production d’études et de rapports prospectifs destinés à anticiper les mutations technologiques et leurs retombées économiques.
La mise en place de ce comité constitue le dernier jalon dans le processus de parachèvement de la création du Haut-Commissariat à la numérisation, lancé en 2023 pour piloter la transformation numérique du pays. Deux ans plus tard, la stratégie nationale « Algérie Numérique 2030 » est finalisée et sera mise en œuvre très prochainement, concrétisant ainsi la vision du gouvernement. Elle prévoit notamment de former 500 000 spécialistes TIC, de connecter l’ensemble des institutions publiques et de porter la contribution de l’économie numérique à 20 % du PIB d’ici 2030.
Le numérique occupe une place stratégique croissante dans l’économie algérienne. Bien que le potentiel soit important, les analyses pointent un décalage entre les investissements lourds et les retombées économiques concrètes, ce qui explique l’importance d’un pilotage renforcé. Grâce à ce Comité, l’Algérie espère accélérer la mise en œuvre de ses politiques numériques, améliorer l’efficacité des services publics, favoriser l’inclusion numérique et libérer la valeur économique du secteur digital.
Samira Njoya
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Le Sénégal s’est lancé dans une initiative de réforme des services publics pour rétablir la confiance entre le gouvernement et ses citoyens. La participation collective est encouragée afin d’optimiser les résultats.
Le gouvernement sénégalais a officiellement lancé, le vendredi 24 octobre à Dakar, la deuxième édition du Gov’athon, un hackathon national consacré à la modernisation numérique de l’administration publique. L’initiative constitue une étape clé pour identifier et sélectionner des idées et solutions concrètes visant à améliorer l’efficacité des services publics et à renforcer l’innovation citoyenne.
Lancement officiel du Gov’athon 2025
— Ministère Communication - Télécoms et Numérique (@mctngouvsn) October 25, 2025
Le ton de l’innovation et de la transformation numérique est donné !
Le Ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, M. Alioune SALL, a co-présidé, ce vendredi 24 octobre 2025 à Dakar, aux côtés de M. Olivier Boucal,… pic.twitter.com/JBUpcgfIvb
Cette édition 2025 a suscité un fort engouement, avec 812 projets soumis en dix jours, impliquant plus de 2000 participants issus du monde académique, entrepreneurial et citoyen. Au total, 104 projets ont été sélectionnés, dont 72 dans la catégorie « Étudiants », 11 dans la catégorie « Startups » et 21 dans la catégorie « Citoyens ».
La phase finale, prévue pour décembre prochain, sera précédée d’un programme intensif de suivi et de coaching destiné à perfectionner les projets en lice. À l’issue de cette étape, les meilleures équipes seront récompensées dans les catégories Étudiants et Startups, selon les critères définis par un jury pluridisciplinaire. Les lauréats bénéficieront ensuite d’un accompagnement personnalisé pour déployer leurs prototypes comme solutions concrètes au service de l’administration.
Le Gov’athon s’inscrit dans la dynamique du « New Deal Technologique », la feuille de route nationale lancée en février 2025 pour faire du Sénégal un acteur majeur de l’économie numérique africaine à l’horizon 2034. Cette stratégie prévoit notamment la création de 500 start-up labellisées, la formation de 100 000 jeunes aux métiers du numérique et l’atteinte d’un taux de connectivité de 95 %.
L’édition 2024 avait déjà permis de concrétiser plusieurs projets à fort impact, dont AI Karangué, Firndé Bi et Agri-Drone Vision, récompensés respectivement par 20, 10 et 5 millions FCFA. Ces initiatives avaient démontré le rôle clé du Gov’athon dans la modernisation de l’administration et l’émergence de solutions numériques locales dans des secteurs tels que l’éducation, la santé ou l’agriculture.
Avec cette nouvelle édition, le gouvernement entend renforcer le lien entre innovation citoyenne et gouvernance publique, tout en soutenant l’entrepreneuriat technologique national. Les résultats attendus pourront contribuer à rendre les services publics plus efficaces, accessibles et adaptés aux réalités des usagers.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Face aux défis de commercialisation et de productivité, le gouvernement santoméen parie sur la connectivité et les données numériques pour donner un nouveau souffle à son agriculture.
Le gouvernement de São Tomé-et-Príncipe, en partenariat avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a officiellement présenté, le vendredi 24 octobre, une nouvelle plateforme numérique destinée à soutenir les agriculteurs dans la diffusion et la commercialisation de leurs produits.
Développée par la Direction de l’entrepreneuriat à la demande de l’exécutif, cette solution vise à fluidifier la circulation des produits agricoles du champ au marché, à réduire les pertes post-récolte et à rapprocher producteurs et consommateurs. Conçue pour être simple et accessible, elle s’appuie sur les usages numériques déjà répandus parmi les exploitants locaux, dont beaucoup disposent de smartphones et utilisent WhatsApp.
Cette innovation s’inscrit dans un programme plus large de promotion de l’employabilité des jeunes dans le secteur agricole. Pilier de l’économie nationale, l’agriculture contribue à environ 14 % du PIB et représente près de 80 % des recettes d’exportation, selon l’Agence française de développement (AFD). Le secteur reste toutefois confronté à plusieurs défis structurels, notamment la difficulté d’accès aux marchés, l’insuffisance d’informations sur les prix et la demande, la faiblesse des circuits de distribution et les pertes post-récolte élevées.
La nouvelle plateforme se positionne comme un outil stratégique pour transformer le potentiel agricole du pays en valeur économique tangible. Elle vise à renforcer la compétitivité des filières locales, à faciliter l’accès aux marchés, à diversifier les débouchés commerciaux et à offrir de nouvelles opportunités aux jeunes entrepreneurs ruraux. À terme, cette digitalisation du secteur agricole est appelée à favoriser une meilleure traçabilité des échanges, une amélioration des revenus des exploitants et une modernisation progressive de l’économie rurale de l’archipel.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Dans la continuité de sa stratégie de modernisation de l’État, le Gabon expérimente la numérisation de ses caisses publiques. L’objectif est de renforcer la traçabilité et de préparer la transition vers une administration entièrement numérique.
Le gouvernement gabonais prévoit de lancer le 30 octobre la phase pilote de la digitalisation des caisses sociales et fiscales. C’est ce qui ressort des conclusions d’une réunion tenue la semaine dernière au ministère de l’Économie numérique, de la Digitalisation et de l’Innovation, réunissant les principales institutions concernées par la gestion des cotisations et des recettes publiques.
L’initiative vise à déployer une plateforme intégrée permettant d’automatiser la collecte des cotisations sociales et fiscales, d’assurer le suivi en temps réel des transactions et de renforcer la traçabilité des opérations financières. La phase pilote, prévue jusqu’au 15 décembre, précédera le lancement officiel du dispositif en janvier 2026. Selon le ministère, la plateforme technique est déjà opérationnelle et servira de base à la modernisation des systèmes de gestion des caisses.
Ce projet intervient dans un contexte où le gouvernement cherche à rationaliser la gestion publique et à renforcer la transparence des flux financiers. Les caisses sociales, notamment la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale (CNAMGS) et la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), connaissent depuis plusieurs années des difficultés de fonctionnement : retards de paiement, lenteur des traitements manuels et absence de traçabilité complète. La digitalisation apparaît ainsi comme une solution structurelle pour fiabiliser la collecte et optimiser la redistribution des fonds sociaux.
La démarche s’inscrit dans la stratégie « Gabon numérique », portée par le président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, qui fait du numérique un levier central de modernisation de l’État. Le ministère de l’Économie numérique a d’ailleurs engagé plusieurs chantiers complémentaires, dont la digitalisation du système de paie des fonctionnaires et l’interconnexion des régies financières à travers la plateforme SIGFiP, déjà en phase de déploiement.
À terme, la numérisation des caisses vise à accroître la transparence dans la gestion des fonds publics, améliorer la mobilisation des recettes et réduire les coûts liés aux procédures manuelles. Elle offrira également à l’État une vision consolidée de la situation financière de ses institutions, tout en renforçant la confiance des citoyens et des entreprises dans la gestion des services publics.
Samira Njoya
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Le Maroc, à travers sa stratégie « Digital Maroc 2030 », ambitionne de renforcer son positionnement en tant que hub régional pour l’outsourcing et les exportations numériques. L’objectif est de porter les revenus issus du digital à 40 milliards de dirhams (environ 4,3 milliards de dollars) d’ici 2030, soit plus du double des 15,8 milliards enregistrés en 2022.
L’exportation de services numériques et l’externalisation s’imposent désormais comme l’un des moteurs discrets des exportations marocaines. En 2024, ces activités se sont consolidées, enregistrant une légère amélioration par rapport à 2023, avec un total de 26,2 milliards de dirhams (soit 2,8 milliards de dollars), en hausse de 0,2 % selon l’Office des Changes. Les chiffres du premier semestre 2025 confirment cette dynamique, atteignant 13,4 milliards de dirhams, soit une progression de 3,5 % par rapport à la même période de 2024 (12,9 milliards de dirhams).
L’exportation des services numériques et l’externalisation se traduisent par la mise à disposition d’une main-d’œuvre marocaine qualifiée au service d’entreprises ou de clients étrangers. Depuis le Maroc, des équipes locales spécialisées exécutent des tâches numériques pointues pour le compte de sociétés étrangères. Il est également possible que des sociétés internationales confient des parties de leurs activités, généralement celles de supports ou de service client, à des prestataires marocains pour réduire leurs coûts.
Les services numériques constituent la composante la plus dynamique et la plus demandée par les entreprises internationales, représentant la majorité des revenus générés par les exportations du secteur.
Les chiffres
Selon l’Office des Changes, « la ventilation par écosystème du secteur laisse apparaitre, en 2024, la prédominance des activités des services informatiques et technologiques avec une part de 40,3%, suivies des services relatifs à la gestion de la relation client (CRM : Centres d’appels) avec 37,4% ». À eux deux, ils pèsent 78% des exportations.
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Services |
Compétences |
Contribution aux revenus du secteur |
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Services informatiques et technologiques (ITO) |
Développement, maintenance, cybersécurité, assistance, etc. |
40,3% |
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Gestion de la relation client (CRM) |
Centres d'appels, assistance après-vente, support multilingue, etc. |
37,4% |
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Services d'ingénierie (ESO) |
Conception, tests, intégration de systèmes, prototypage, etc. |
13,2% |
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Processus d’entreprise (BPO) |
Comptabilité et traitement des factures, gestion des stocks et logistique, saisie et traitement massif de données, etc. |
8,9% |
|
Processus de connaissance (KPO) |
Recherche et analyse financière, conception de stratégies marketing, analyse de données business intelligence |
0,2% |
Malgré les tensions globales (inflation, taux de change), l'externalisation des services d'ingénierie a aussi enregistré de la croissance, signe d'une montée en gamme progressive. Entre 2023 et 2024, les recettes du secteur sont passées de 3,2 milliards de dirhams à 3,4 milliards. Pour le premier semestre 2025, il affichait déjà 2,5 milliards.
L’externalisation des processus métier (BPO) a aussi enregistré de la croissance passant de 1,9 milliard de dirhams à 2,3 milliards entre 2023 et 2024 pour afficher 1,3 milliard en début d’année 2025. Par contre, l’externalisation des processus de connaissance (KPO) a connu un fort recul, passant de 78 à 48 millions de dirhams pour atteindre 21 millions au premier semestre 2025.
Renforcer l’activité
La stabilité de l’ensemble des recettes 2024, malgré la conjoncture et les signaux positifs du premier semestre 2025, soutient les entrées de devises et la diversification des exportations au-delà des biens. L'accélération de l’ingénierie en particulier démontre que le Maroc ne se contente plus d'être une plateforme de centres d'appels, il s'affirme également comme un hub d'ingénierie à proximité de l'Europe, avec des délais réduits et une capacité à travailler selon les standards internationaux.
Le dynamisme des différents services numériques externalisés se traduit sur l’économie marocaine par des emplois qualifiés et des revenus stables. Les centres d'appels et les activités de support recrutent des jeunes dotés d'un bon niveau linguistique et de compétences relationnelles, et offrent des perspectives d'évolution. Les services informatiques et technologiques, quant à eux, stimulent la demande pour des profils plus techniques, mieux rémunérés. Le ministère de la Transition numérique et de la Réforme administrative révèle que l’exportation des services numériques et l’externalisation enregistraient déjà 141 000 emplois en 2023 contre 130 000 en 2022 et 100 000 en 2020.
Le Maroc entend mieux piloter cette trajectoire croissante de son secteur d’exportation de services numériques et de l’externalisation. L'Office des Changes et le ministère de la Transition numérique ont lancé un chantier pour moderniser les indicateurs de suivi des exportations de services numériques. Objectif : disposer de données plus fines pour cibler la formation, l'attractivité des territoires et les niches prometteuses. Ce travail s'inscrit dans la stratégie Digital Morocco 2030.
Défis
Pour préserver cette dynamique de croissance dans l'exportation de services numériques et l'externalisation, le Maroc devra relever trois défis majeurs. L'adaptation à l'ère de l'automatisation : face à la reconfiguration des métiers par l'IA, une montée en compétences continue est indispensable pour maintenir la compétitivité et l'emploi. Il y a ensuite l'exigence de qualité et de sécurité. En effet, pour rivaliser à l'international, il est crucial de garantir des niveaux de service élevés, une cybersécurité robuste et une continuité d'activité irréprochable. Enfin, le développement des talents et des territoires. Attirer des projets à plus haute valeur ajoutée nécessite à la fois un vivier élargi de compétences – via la formation initiale, continue et les certifications – et un maillage territorial d'infrastructures au-delà des grandes villes. La réussite dépendra surtout de la capacité à exécuter ces réformes de manière cohérente entre les différents acteurs gouvernementaux.
Muriel Edjo
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En 2023, seulement 27% de la population d’Afrique subsaharienne avait accès à l’Internet mobile, selon la GSMA. L’accessibilité financière des smartphones est l’une des principales causes de cette fracture numérique.
L’Association mondiale des opérateurs télécom (GSMA) et six grands opérateurs africains, dont Orange, se mobilisent pour élargir l’accès des Africains au smartphone. Le mardi 21 octobre, lors du Mobile World Congress de Kigali au Rwanda, ils ont présenté un accord sur un standard technique minimal (mémoire/RAM, écran, batterie, caméra, etc.), garantissant un appareil de qualité offrant une expérience 4G « suffisante » et durable, au prix compris entre 30 et 40 $.
Selon la GSMA, la valeur des composants physiques d’un smartphone (écran, processeur, mémoire, radio, batterie, etc.) représente 50 à 70 % de son coût total. Mais aucun composant, pris isolément, ne permet de réduire le prix sans dégrader l’expérience utilisateur (trop peu de mémoire, caméra médiocre, batterie qui surchauffe…). Une baisse durable des prix nécessite à la fois d’optimiser la valeur des composants, de produire en volume (effets d’échelle) et de rationaliser tout ce qui entoure la production : brevets, licences, logistique, marges des distributeurs. La standardisation permet à tous de commander le même modèle, ce qui incite les fournisseurs (écrans, batteries, etc.) à réduire leurs prix grâce aux volumes importants. L’objectif du standard GSMA est exactement cela : fédérer les commandes autour d’un modèle unique, rassurer les fabricants et permettre une production en grande série à moindre coût.
Comment atteindre l’objectif ?
Pour concrétiser cette vision, la coalition s’appuiera sur deux leviers. Dans les prochains mois, la GSMA prévoit de collaborer avec les fabricants d’équipements d’origine (OEM) et les entreprises technologiques pour discuter des exigences minimales et obtenir leur soutien en faveur d’appareils 4G abordables. Parallèlement, elle encourage les gouvernements africains à supprimer rapidement les taxes sur les smartphones d’entrée de gamme, dont le prix est inférieur à 100 dollars. Par exemple, en Afrique du Sud, en mars 2025, les autorités ont supprimé les droits d’accise pour les smartphones coûtant moins de 2 500 rands (136 $), afin de réduire la barrière d’accès pour les ménages modestes.
« Dans certains pays, la TVA et les droits d’importation peuvent augmenter le prix des appareils de plus de 30 %, ce qui alourdit directement le coût pour les citoyens et freine l’inclusion numérique », dénonce l’Association. Vivek Badrinath, directeur général de la GSMA, précise : « L’accès à un smartphone n’est pas un luxe, c’est un lien vital vers les services essentiels, les opportunités de revenus et la participation à l’économie numérique. En s’unissant autour d’une vision commune pour des appareils 4G abordables, les principaux opérateurs africains et la GSMA envoient un signal fort aux fabricants et aux décideurs politiques. »
Pourquoi c’est décisif ?
En Afrique, le principal frein à l’accès aux services mobiles n’est plus la couverture réseau, mais le coût des téléphones. Au cours des dix dernières années, les sociétés de téléphonie ont beaucoup investi pour étendre leur couverture et répondre à la demande croissante en connectivité. Ainsi, en 2024, la couverture mobile sur le continent atteignait 86 % pour la 3G, 71 % pour la 4G et 11 % pour la 5G, selon l’Union internationale des télécommunications (UIT). Cependant, seuls 52 % des Africains étaient connectés au haut débit mobile.

GSMA Intelligence estime qu’un smartphone à 40 dollars pourrait permettre à 20 millions de personnes supplémentaires en Afrique subsaharienne d’accéder à Internet mobile, tandis qu’un appareil à 30 dollars pourrait connecter 50 millions de personnes.
Pour qu’un smartphone soit considéré abordable, la GSMA indique qu’il doit représenter entre 15 % et 20 % du revenu mensuel moyen. Cette proportion se base sur l’observation des pays où l’adoption des smartphones est élevée (plus de 60 %, 70 % et 80 %). Selon la Banque mondiale, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, le coût d’un smartphone d’entrée de gamme représente en moyenne 18 % du revenu mensuel d’un adulte. Pour les 40 % des ménages les plus pauvres d’Afrique subsaharienne, ce chiffre grimpe à 73 %.
Pour les opérateurs télécom, démocratiser le smartphone n’est pas anodin : cela signifie un volume plus important de consommateurs d’Internet et, par conséquent, une augmentation de leurs revenus issus des données.
Au-delà de l’aspect technique et fiscal
Rendre le smartphone réellement accessible ne se limite pas à en réduire le prix. Il faut combiner plusieurs leviers pour abaisser la barrière d’entrée et garantir un usage durable. Le financement joue un rôle clé : proposer des paiements échelonnés via les opérateurs ou des microcrédits adaptés aux revenus irréguliers, avec une transparence totale sur les frais et une assurance en cas de panne, facilite l’accès. L’après-vente est tout aussi déterminante : disposer d’un réseau de réparation de proximité, de pièces détachées disponibles et de prix plafonnés prolonge la durée de vie des appareils, réduit les déchets et protège le pouvoir d’achat.
Les compétences numériques sont également cruciales. Beaucoup de personnes perçoivent encore le smartphone comme un produit de luxe simplement parce qu’elles ne savent pas l’utiliser. Former les utilisateurs aux fonctions de base augmente leur autonomie et valorise l’appareil, ce qui relativise son coût face à son utilité quotidienne.
En combinant ces différents leviers, l’acquisition d’un smartphone devient un véritable investissement. L’appareil se transforme en outil de travail, de formation et d’accès aux droits essentiels. Pour que cette dynamique fonctionne sur le long terme, il est nécessaire que les politiques publiques et l’industrie co-conçoivent des parcours complets, depuis l’achat jusqu’à la maintenance, afin que le smartphone devienne un vecteur durable d’inclusion numérique.
Muriel Edjo
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L’Afrique s’oriente vers une gestion foncière plus moderne grâce aux technologies satellitaires et aux systèmes cadastraux numériques. Ces outils promettent une meilleure transparence, une fiscalité optimisée et une exploitation durable des ressources.
Digital Telecom, filiale de Digital Afrique Telecom (DAT) basée à Abidjan, a annoncé, le mercredi 22 octobre, un partenariat avec l’entreprise estonienne AS Datel, spécialisée dans les technologies géospatiales. L’accord prévoit le déploiement de solutions satellitaires et cadastrales numériques avancées à travers l’Afrique, afin de moderniser la gestion foncière, de détecter les constructions illégales et de surveiller l’exploitation minière non autorisée.
« En nous associant à AS Datel, nous apportons des technologies de gouvernance satellitaire et numérique de classe mondiale en Afrique. Il s’agit plus que de la simple technologie : il s’agit de donner aux gouvernements les moyens de protéger leurs ressources, d’assurer la transparence et de récupérer les revenus qui peuvent être réinvestis dans les services publics », a déclaré Simplice Anoh, PDG de Digital Telecom.
Le partenariat prévoit notamment la mise en place d’un système de cadastre électronique avancé, une plateforme centralisée entièrement numérique intégrant des cartes cadastrales actualisables, des modules automatisés de taxe foncière, ainsi que des outils de contrôle et de sécurisation des échanges de données. Cette innovation offrira aux autorités locales et nationales la possibilité de tenir des registres immobiliers précis, de rationaliser la perception de l’impôt et de renforcer la transparence au bénéfice des citoyens et des investisseurs.
AS Datel, d’origine estonienne, provient d’un pays reconnu pour son excellence en matière d’e-gouvernement et de systèmes numériques sécurisés. Forte de son expertise en systèmes d’information géographique (SIG) et en observation de la Terre, l’entreprise apporte un savoir-faire technologique éprouvé. Pour Digital Telecom et sa maison mère Digital Afrique Telecom, cette initiative répond à la volonté des États africains de moderniser leurs systèmes fonciers et de mieux encadrer l’exploitation des ressources naturelles tout en renforçant la transparence fiscale.
Ce projet intervient dans un contexte régional marqué par la croissance rapide des technologies géospatiales. Le marché du secteur au Moyen-Orient et en Afrique pourrait atteindre 69,7 milliards de dollars d’ici 2030, selon Grand View Research. Cette expansion est portée par l’adoption croissante des outils de géolocalisation, de télédétection et d’analyse spatiale dans l’agriculture, la gestion des ressources et l’urbanisme.
À terme, cette alliance technologique est appelée à transformer la manière dont les autorités africaines enregistrent les biens, appliquent les taxes foncières et surveillent les activités illégales. En dotant les États d’outils numériques fiables, elle ouvre la voie à une gouvernance plus transparente, à des recettes publiques renforcées et à une meilleure protection des ressources environnementales.
Samira Njoya
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Le Nigeria mise entre autres sur la coopération internationale pour réussir sa transformation numérique, considérée comme un catalyseur de développement socio-économique. Le pays veut notamment faire passer la part des TIC à 22 % du PIB d’ici 2027.
Le Nigeria souhaite renforcer sa coopération avec le Danemark dans les domaines de l’infrastructure numérique, de l’intelligence artificielle, de la connectivité et de l’innovation. Les deux parties ont signé un protocole d’accord à cet effet en début de semaine.
L’accord a été signé par le ministre nigérian des Communications, de l’Innovation et de l’Économie numérique, Bosun Tijani, et la secrétaire d’État danoise au Commerce et à l’Investissement, Lina Gandløse Hansen, lors de la quatrième édition du « NORDIC Nigeria Connect » qui s’est tenue le mardi 21 octobre à Lagos.
« Nous travaillerons ensemble à l’expansion des infrastructures à large bande, à la mise en œuvre de solutions de gouvernance numérique intelligente et à la création de passerelles permettant aux talents technologiques nigérians de contribuer aux entreprises danoises, tant à distance qu’en présentiel », a déclaré le ministre dans un communiqué publié sur X, le 22 mercredi octobre. Il a ajouté que le Danemark a promis un soutien de 12 millions d’euros via l’Union européenne pour le programme 3MTT Nigeria, qui vise à former 3 millions de talents technologiques.
“When Nigeria calls for collaboration, Denmark responds,” - Strong and encouraging words from Danish State Secretary for Trade, Lina Gandløse Hansen as Nigeria and Denmark formalised a new era of digital cooperation through a Memorandum of Understanding (MoU).
— Dr. 'Bosun Tijani (@bosuntijani) October 22, 2025
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Selon M. Tijani, ce mémorandum d’entente témoigne une fois de plus de la volonté du Nigeria de s’ouvrir aux partenariats et d’adapter les meilleures pratiques mondiales au contexte local. Le Danemark, par exemple, est classé premier sur 193 pays à l’Indice de développement de l’e-gouvernement des Nations unies avec un score de 0,9847, bien au-dessus de la moyenne mondiale de 0,6382. Le Nigeria, quant à lui, occupe la 144e place avec un score de 0,4815.
Le Danemark figure également dans la catégorie des exemples à suivre (Tier 1) à l’Indice global de cybersécurité 2024 de l’Union internationale des télécommunications (UIT), avec un score maximal (20/20) dans les cinq piliers évalués. Le Nigeria, de son côté, est classé dans la troisième catégorie (Tier 3) sur cinq, avec des efforts supplémentaires à fournir en matière de mesures organisationnelles, de développement des capacités et de coopération.
Il convient toutefois de rappeler que si la signature de ce protocole constitue une avancée par rapport aux discussions engagées ces derniers mois, elle ne garantit pas encore une coopération effective. Aucun calendrier n’a été précisé pour la signature de l’accord définitif ni pour sa mise en œuvre.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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