Après le lancement de sa stratégie numérique, le Sénégal veut attirer des investisseurs pour concrétiser ses projets. Les États-Unis, acteur clé de la tech mondiale, représentent un partenaire stratégique pour faire du pays un hub numérique en Afrique.
En marge du mini-sommet économique organisé à la Maison-Blanche par le président américain, Donald Trump (photo, à gauche), le chef de l'État sénégalais, Bassirou Diomaye Faye (photo, à droite), a rencontré, le mercredi 9 juillet, son homologue américain, en compagnie de plusieurs dirigeants africains et d’investisseurs américains. À cette occasion, il a présenté une série de projets stratégiques nécessitant des investissements structurants, dont un projet phare : la création d’une ville numérique en bord de mer à Dakar.
Prévue sur un site de 40 hectares en bord de mer, la ville numérique que souhaite développer le Sénégal ambitionne de transformer Dakar en un hub technologique majeur en Afrique, à l’image d’une Silicon Valley africaine, ouverte à l’innovation mondiale. L'objectif est d'attirer les plus grandes entreprises américaines du secteur, notamment dans l’intelligence artificielle, la cybersécurité, les fintech et le cloud computing.
Ce projet s’inscrit dans la vision portée par le New Deal Technologique, lancé par les autorités sénégalaises, qui prévoit de faire du numérique un pilier du développement économique. Avec une enveloppe de plus de 1105 milliards FCFA (environ 2 milliards de dollars), cette stratégie vise à moderniser les infrastructures numériques, soutenir les start-up et étendre la connectivité sur l’ensemble du territoire.
En présentant ce projet à la Maison-Blanche, le président Faye cherche à créer un effet d’entraînement auprès des investisseurs américains, en positionnant le Sénégal comme une porte d’entrée stable, innovante et dynamique vers l’Afrique numérique. Si les financements sont mobilisés et les partenariats conclus, cette future ville pourrait devenir un levier de transformation pour l’écosystème technologique ouest-africain, tout en contribuant à la création d’emplois qualifiés et à l’insertion du pays dans l’économie mondiale de demain.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Par cette démarche inédite, le pays tend la main aux Afro-descendants, réaffirmant son rôle de terre de mémoire, de réconciliation et d’avenir partagé.
Le Bénin a lancé, le vendredi 4 juillet 2025, la plateforme numérique My Afro Origins, destinée à accueillir les demandes de reconnaissance de la nationalité béninoise par les Afro-descendants.
Ce portail s’inscrit dans la mise en œuvre de la loi n°2024-31 du 2 septembre 2024 qui consacre, pour la première fois, le droit au retour et à la citoyenneté pour les descendants d’Africains subsahariens déportés durant la traite négrière et le commerce triangulaire.
« Nos frères et sœurs de la diaspora, déracinés de force lors des heures sombres de la traite transatlantique, doivent retrouver leur place au sein de la communauté africaine. Il est temps de guérir ces blessures, de recréer ce lien sacré avec ceux qui, bien que physiquement éloignés, portent l’Afrique dans leur cœur », a déclaré Olushegun Adjadi Bakari, ministre des Affaires étrangères du Bénin.
🇧🇯 #MyAfroOrigins | Le Bénin franchit une étape historique en lançant https://t.co/xECNhS3QvZ, la plateforme dédiée à la reconnaissance de la nationalité béninoise pour nos frères et sœurs afro-descendants.
— Olushegun ADJADI BAKARI (@shegunbakari) July 7, 2025
Ce faisant, le @gouvbenin réaffirme leur droit au retour. L’Afrique est… pic.twitter.com/MLpcTjWU97
Cette information s’inscrit dans un contexte où les Afro-descendants, en particulier les Afro-américains et les Afro-caribéens, cherchent à revenir en Afrique, renouer les liens et contribuer au développement du continent. Elle intervient également dans le cadre de la décennie internationale des personnes d’ascendance africaine 2015-2024 proclamée par l’ONU pour promouvoir les droits humains, la justice et le développement pour les personnes d’origine africaine vivant hors du continent.
Le Bénin a lancé plusieurs initiatives pour favoriser le retour des Afro-descendants et renforcer les liens avec sa diaspora mondiale. Les Vodun Days sont devenus un rendez-vous essentiel pour la diaspora africaine. De nombreux Afro-descendants, venus d’Haïti, des États-Unis ou du Brésil, y voient une opportunité de renouer avec leurs racines. De plus, le Bénin a vu émerger, ces dernières années, de nombreux Guadeloupéens animés par le désir de retrouver leurs racines africaines.
Cette initiative est également portée par plusieurs pays, dont le Ghana avec son programme « Year of Return » en 2019, et la Guinée-Bissau, qui a récemment accordé la citoyenneté et délivré des passeports nationaux à un premier groupe de personnes d’origine africaine.
Au-delà de la reconnaissance de la nationalité béninoise aux Afro-descendants, cette initiative pourrait créer de réelles opportunités de développement économique, culturel et éducatif.
Notons que la plateforme My Afro Origins permet, entre autres, de s’informer, de constituer son dossier et d’effectuer le paiement des frais de traitement de 100 $.
Lydie Mobio
Edité par M.F. Vahid Codjia
Les innovations numériques transforment les systèmes éducatifs à travers le monde. Ces avancées technologiques ouvrent de nouvelles opportunités d’apprentissage, notamment dans les zones isolées, et renforcent la qualité de l’éducation.
Le ministère ghanéen de l’Éducation et l’initiative eLearning Africa ont signé, le mardi 8 juillet, un mémorandum d’accord visant à étendre l’accès aux plateformes d’apprentissage numérique à l’échelle nationale. Ce partenariat concrétise la volonté du gouvernement d’investir dans les infrastructures et l’innovation pédagogique pour améliorer la qualité de l’éducation. « Aujourd’hui marque un peu plus qu’un accord formel, il témoigne de l’engagement du Ghana à être à l’avant-garde de la transformation numérique éducative en Afrique. Depuis 2005, eLearning Africa est la première plateforme continentale d’innovation éducative », a déclaré le vice-ministre de l’Éducation, Clement Apaak.
Concrètement, l’accord prévoit le déploiement d’outils numériques modernes dans les établissements scolaires, en particulier dans les zones mal desservies, ainsi que le renforcement des compétences fondamentales des élèves. Il s’appuie sur l’expertise de la plateforme eLearning Africa, active depuis deux décennies en collaboration avec les gouvernements africains, pour fournir des contenus adaptés aux contextes locaux.
En parallèle, le Ghana s’est engagé à accueillir la 18ᵉ édition de la conférence eLearning Africa, du 3 au 5 juin 2026 à Accra. L’événement mettra en lumière les avancées du programme national et la stratégie éducative du pays à l’horizon 2030.
Cet accord intervient dans un contexte d’accélération de la transformation numérique de l’éducation au Ghana, mais reste freiné par des inégalités d’accès. Bien que le taux de pénétration de l’internet atteigne 69,9 %, plus de 30 % des Ghanéens restent hors ligne, et les établissements ruraux demeurent souvent sous-équipés.
Ces défis soulignent la nécessité d’un investissement accru dans les infrastructures numériques, la formation des enseignants et la dotation en équipements, conditions indispensables pour tirer pleinement parti des technologies éducatives, y compris de l’intelligence artificielle. À terme, cet accord pourrait favoriser une plus grande inclusion scolaire dans les zones reculées et consolider l’ambition du Ghana de se positionner comme un pôle d’innovation éducative numérique sur le continent africain, en capitalisant sur les opportunités offertes par l’EdTech pour réduire les inégalités, renforcer les apprentissages et préparer les jeunes aux métiers de demain.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Les start-up occupent une place croissante dans les stratégies de développement économique, portées par leur capacité d’innovation et leur agilité. En misant sur ces jeunes entreprises, l’Algérie entend accélérer la modernisation de ses secteurs clés, dont celui des infrastructures.
L’Algérie mise sur ses jeunes entreprises innovantes pour moderniser ses infrastructures. Une commission conjointe a été mise en place le mercredi 9 juillet entre le ministère des Travaux publics et des Infrastructures de base et celui de l’Économie de la connaissance, des Start-up et des Micro-entreprises, afin d’impliquer les start-up dans la conception et la réalisation des projets d’infrastructure.
L’objectif affiché est de structurer un cadre de coopération entre les deux secteurs pour exploiter le potentiel technologique des start-up dans les projets ferroviaires, les transports guidés ou encore la gestion intelligente des chantiers. Le recours à des outils numériques, à la recherche appliquée et à la gestion des connaissances est au cœur de cette approche.
Dans cette optique, des plateformes d’échange et des ateliers de co-développement seront mis en place pour connecter les start-up aux différents acteurs du secteur. L’idée est de leur permettre d’intervenir dès les premières étapes des projets, depuis les phases d’étude et de suivi jusqu’à l’exécution, en intégrant des solutions locales, agiles et économiquement viables.
Cette initiative s’inscrit dans la politique de soutien à l’économie de la connaissance engagée depuis 2020. Le pays s’est doté d’un ministère dédié aux start-up, a mis en place le label « Start-up », le Fonds algérien des start-up (ASF), ainsi que plusieurs incubateurs et dispositifs d’accompagnement. Le pays compte aujourd’hui entre 5 000 et 8 000 start-up, dont plus de 1 200 ont obtenu le label officiel « Start-up » délivré par la Commission nationale de labellisation.
En mobilisant cet écosystème sur les chantiers stratégiques, le gouvernement entend stimuler l’innovation locale, réduire la dépendance technologique et renforcer les capacités internes. À terme, cette orientation pourrait dynamiser l’emploi qualifié et consolider un tissu entrepreneurial tourné vers les besoins du marché national.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Selon McKinsey, l’intelligence artificielle (IA) pourrait injecter jusqu’à 1200 milliards de dollars dans l’économie africaine d’ici 2030. Pour tirer parti de ce potentiel, la formation des talents s’impose comme un levier stratégique majeur. Le Cameroun s’engage résolument sur cette voie.
Le Cameroun ambitionne de former 60 000 spécialistes en intelligence artificielle d’ici 2040, dont 40 % de femmes, dans le cadre de sa Stratégie nationale pour l’IA (SNIA), dévoilée récemment par la ministre des Postes et Télécommunications, Minette Libom Li Likeng. Cette initiative s’inscrit dans une vision plus large visant à faire du pays un hub africain de l’intelligence artificielle.
Parmi les principaux objectifs de cette stratégie figurent également la création de 12 000 emplois directs, la mise au point de 12 solutions souveraines à fort impact socio-économique, et une contribution attendue de l’IA au PIB national estimée entre 0,8 % et 1,2 %. Une attention particulière est accordée à la diversité linguistique, avec le développement de modèles d’IA capables d’intégrer les langues nationales, un levier clé pour l’inclusion numérique et la valorisation des patrimoines culturels locaux.
Cependant, pour concrétiser ces ambitions, le Cameroun doit combler plusieurs lacunes majeures. Le pays souffre encore d’un retard significatif en matière d’infrastructures numériques, notamment en ce qui concerne le déploiement de centres de données modernes, le développement de plateformes cloud sécurisées, ainsi qu’une connectivité haut débit inégale, en particulier dans les zones rurales.
Sur le plan continental, cette réalité est illustrée par le dernier classement de l’Union internationale des télécommunications (UIT), dans lequel le Cameroun obtient un score de 46,3 sur 100, se classant à la 30ᵉ position sur 42 pays africains. Un résultat en dessous de la moyenne continentale, estimée à 56 points, qui témoigne de la nécessité pour le pays d’accélérer ses efforts.
La formation de talents qualifiés demeure l’un des défis majeurs. Le manque d’ingénieurs, de chercheurs et de spécialistes en IA freine le développement du secteur. Pour y remédier, le Cameroun devra investir massivement dans la création de centres d’excellence, établir des écoles et instituts spécialisés dans les technologies avancées, et intégrer des programmes de formation à l’IA dans les cursus secondaires et universitaires. Des partenariats structurants entre universités, entreprises technologiques et institutions publiques seront indispensables pour adapter les contenus pédagogiques aux réalités du marché.
Par ailleurs, il sera crucial de mettre en œuvre des programmes de formation continue et de reconversion professionnelle, afin de doter un large public des compétences numériques nécessaires à l’économie de demain. L’élargissement de l’accès à Internet haut débit, notamment dans les zones reculées, devra également accompagner cette dynamique, tout comme la stimulation d’un écosystème entrepreneurial innovant, apte à attirer les investisseurs et à favoriser l’émergence de solutions locales.
L’objectif de former 40 % de femmes est ambitieux et louable, mais il implique des mesures proactives : campagnes de sensibilisation, mentorat, soutien aux carrières féminines dans la tech, et lutte contre les stéréotypes de genre dans les filières scientifiques.
Malgré ces défis, des signaux encourageants émergent. La récente adoption d’une loi sur la protection des données personnelles ainsi que les premières concertations nationales sur l’IA témoignent d’une volonté politique affirmée de créer un cadre réglementaire solide, condition essentielle à la structuration du secteur et à la confiance des acteurs.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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La Somalie mise sur la coopération internationale pour atteindre ses ambitions de transformation numérique. En mai dernier, le pays avait signé un protocole d’accord avec la Malaisie dans le domaine de la cybersécurité, entre autres.
Les autorités somaliennes souhaitent renforcer leur collaboration avec la communauté internationale dans le domaine du numérique. En marge d’une rencontre organisée à Genève (Suisse) du 7 au 11 juillet pour faire le point sur vingt ans de mise en œuvre des résolutions du Sommet mondial sur la société de l’information (WSIS+20), elles ont échangé avec plusieurs hauts responsables d’organisations internationales et de gouvernements.
Mohamed Adan Macallin (photo, à droite), ministre des Télécommunications et des Technologies, s’est notamment entretenu avec Doreen Bogdan-Martin (photo, à gauche), secrétaire générale de l’UIT, ainsi que Cosmas Luckyson Zavazava, directeur du Bureau de développement des télécommunications de l’UIT. Il a également discuté avec Fahmi Fadzil et Ridwaan Abdulaahi Bahdoon, ses homologues de la Malaisie et de Djibouti, respectivement. Globalement, les échanges ont porté sur l’inclusion numérique, la formation des jeunes et des fonctionnaires aux compétences numériques, ainsi que sur la gouvernance numérique et la cybersécurité.
Ces initiatives interviennent alors que le gouvernement cherche à « favoriser le progrès technologique et l’inclusion numérique » pour le développement socio-économique du pays. Toutefois, la Somalie est classée 191ᵉ sur 193 selon l’indice de développement de l’e-gouvernement (EGDI) 2024 des Nations unies. Elle a enregistré un score de 0,1468 sur 1, bien en deçà des moyennes africaine (0,4247) et mondiale (0,6382).
Par ailleurs, la Somalie a été classée dans la catégorie 4 sur 5 dans le « Global Cybersecurity Index 2024 » de l’UIT, ce qui témoigne d’un engagement de base en matière de cybersécurité. Le pays doit toutefois intensifier ses efforts, notamment en matière de mesures techniques, légales et de développement des capacités. Il a enregistré un score global de 37,38 sur 100.
Il convient de souligner que ces échanges restent, pour l’heure, au stade de discussions. Aucun accord formel n’a encore été signé ni annoncé. Toutefois, la Somalie avait déjà franchi une première étape en mai dernier, en signant un protocole d’accord avec l’agence nationale de cybersécurité de la Malaisie, considérée comme un exemple à suivre dans ce domaine.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Confrontée à une crise structurelle majeure, l’Afrique peut s’appuyer sur l’intelligence artificielle pour repenser son système éducatif. De la personnalisation de l’apprentissage à l’optimisation de la gestion, l’IA ouvre des perspectives durables, malgré de nombreux défis.
L’intelligence artificielle (IA), au cœur des transformations globales, pourrait jouer un rôle décisif dans la refondation du système éducatif africain. Marqué par des effectifs en forte croissance, une pénurie d’enseignants et des infrastructures limitées, le continent fait face à une crise structurelle. En 2024, selon l’UNESCO, 58 % des adolescents de 15 à 17 ans en Afrique subsaharienne n’étaient pas scolarisés, et 98 millions d’enfants restaient totalement hors du système. L’accès à l’électricité, à Internet et aux ressources pédagogiques reste marginal dans de nombreuses régions.
Un outil d’adaptation face à la pénurie d’enseignants
L’un des problèmes les plus urgents auxquels l’éducation africaine est confrontée est la pénurie chronique d’enseignants qualifiés. Selon l’UNESCO, plus de 16,5 millions d’enseignants devront être recrutés d’ici 2030 pour répondre à la croissance démographique en Afrique subsaharienne. Sans remplacer le personnel éducatif, l’IA peut jouer un rôle clé en soutenant les enseignants surchargés à travers la correction automatisée des devoirs, la génération de supports pédagogiques personnalisés, ou encore l’assistance à la planification des cours. Au Kenya, certains enseignants testent l’assistant Kalasik, un chatbot qui génère des plans de cours et automatise les tâches répétitives.
Une pédagogie personnalisée et inclusive
L’IA permet aussi de créer des parcours éducatifs adaptés au niveau de chaque élève, en s’appuyant sur ses progrès et difficultés. Dans des classes souvent surchargées, cette approche individualisée est quasi impossible sans outils numériques. Grâce à des systèmes intelligents, les élèves peuvent accéder à des exercices interactifs, à des tutoriels ou à des retours personnalisés, notamment en dehors du temps scolaire. Cette personnalisation contribue à réduire le décrochage scolaire et à maintenir l’intérêt des apprenants, notamment dans les zones rurales ou marginalisées.
En milieu informel, l’assistant Kwame for Science, déployé dans 11 pays d’Afrique de l’Ouest, offre un tutorat adapté aux élèves de sciences. Son taux de précision parmi les trois premières réponses est de 87 %, avec 750 utilisateurs sur plusieurs mois.
Des données pour piloter les politiques éducatives
Au-delà de la salle de classe, l’IA peut transformer la gouvernance du système éducatif en fournissant des données précises et en temps réel. Les ministères de l’Éducation peuvent ainsi mieux comprendre les zones de sous-scolarisation, anticiper les besoins en infrastructures ou en enseignants, et orienter les ressources là où elles sont le plus nécessaires. L’analyse prédictive, nourrie par les données démographiques, scolaires et territoriales, permet de passer d’une logique réactive à une planification proactive.
Des stratégies nationales en phase avec l’éducation
Plusieurs États africains ont déjà franchi le pas en intégrant l’éducation dans leurs stratégies nationales d’IA. Le Kenya, par exemple, a récemment lancé une stratégie nationale sur les technologies émergentes et l’IA (2025–2030), co-construite avec l’UNESCO, mettant l’accent sur l’intégration de l’IA en éducation via des curriculums basés sur les compétences numériques.
La Zambie et la Côte d’Ivoire ont également lancé des stratégies nationales d’IA, identifiant l’éducation comme l’un de leurs secteurs prioritaires, avec des mesures visant à intégrer l’analyse des données scolaires et l’apprentissage personnalisé. Le Nigeria adopte une approche combinée : développement des compétences en IA et intégration de l’IA dans l’éducation, notamment via des partenariats avec les universités et les acteurs privés. D’autres pays, comme le Sénégal, le Burkina Faso et le Congo, ont aussi inscrit l’IA dans l’éducation comme composante de leurs stratégies numériques.
Défis à relever pour une adoption à grande échelle
Pour exploiter pleinement le potentiel de l’IA, l’Afrique doit surmonter plusieurs obstacles : infrastructures numériques insuffisantes, manque de formation des enseignants, enjeux éthiques liés à la gestion des données, et surtout financement des technologies éducatives (EdTech). Le développement et le déploiement des solutions IA exigent des investissements conséquents, ainsi qu’un modèle économique viable pour assurer leur pérennité.
Il est aussi crucial de protéger les données sensibles des élèves via des cadres éthiques robustes. Les solutions doivent être adaptées aux langues locales et aux contextes culturels. Enfin, un engagement durable des États, des partenaires techniques, des investisseurs et du secteur privé est nécessaire pour financer un écosystème éducatif pérenne au-delà des projets pilotes.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Le phénomène des nomades numériques, en pleine expansion depuis l’essor du télétravail, ouvre de nouvelles perspectives pour les pays africains. Entre attractivité croissante, infrastructures en développement et politiques encore balbutiantes, le continent pourrait bien devenir un acteur clé de cette nouvelle géographie du travail.
Depuis 2020, le monde du travail connaît une révolution silencieuse, mais profonde. En quelques années, le nomadisme numérique est passé d’un phénomène marginal à une dynamique mondiale, portée par la digitalisation des métiers, l’essor du travail à distance et les aspirations à une vie plus flexible. Si cette tendance a d’abord conquis les grandes capitales occidentales, elle s'étend désormais à l’Afrique qui pourrait capter une manne financière estimée à plusieurs milliards de dollars dans les prochaines années. À condition de s’en donner les moyens.
Un phénomène mondial aux retombées locales
Le nomade numérique, c’est ce travailleur qui, grâce à un ordinateur et une connexion Internet, peut exercer son activité depuis n’importe quelle partie du monde : un freelance en marketing basé à Nairobi pendant six mois, une développeuse sénégalaise qui vit entre Dakar et Bali, ou encore un designer américain installé à Zanzibar, le temps d'un été.
Selon les statistiques 2025 collectées par Nomads.com, la plateforme de la communauté mondiale des nomades numériques, il y a plus de 80 millions de nomades numériques dans le monde. Un chiffre en hausse constante. Leur impact économique est loin d’être négligeable : en moyenne, un nomade numérique gagne 124 000 dollars par an. Il dépense entre 1 000 et 3 000 dollars par mois dans le pays qui l'accueille — hébergement, restauration, loisirs, coworking, transports, etc. Pour les pays hôtes, cela représente une source de revenus directe pour les économies locales, sans les contraintes classiques du tourisme de masse. Les Américains représentent la plus forte communauté de nomades numériques, avec 46 millions d’individus à travers le monde. Près de 88% des nomades numériques à l’échelle mondiale sont originaires de pays situés en dehors de l'Afrique.
Profil type du nomade numérique selon Nomads.com :
Catégorie |
Sous-catégorie |
Valeur |
Âge |
53 % ont entre 31 et 39 ans |
|
Genre |
Hommes |
91 % |
Femmes |
7 % |
|
Autres genres |
2 % |
|
Éducation |
90 % niveau supérieur |
|
Durée de séjour moyen |
Par ville |
63 jours |
Par pays |
167 jours |
|
Revenu annuel moyen |
124 304 $ |
|
Statut professionnel |
Salariés à plein temps |
38 % |
Fondateurs de start-up |
18 % |
|
Freelances |
18 % |
|
Secteurs dominants (Hommes) |
Développement logiciel |
35 % |
Développement web |
28 % |
|
Fondateurs de start-up |
28 % |
|
Marketing |
16 % |
|
Secteurs dominants (Femmes) |
Marketing |
16 % |
Industrie créative |
15 % |
|
Start-up |
12 % |
|
Développement logiciel |
10 % |
|
Motivations |
Cadre de travail + escapades en Afrique |
Source : Nomads.com
L’Afrique, une nouvelle frontière
Longtemps ignorée, l’Afrique commence à apparaître sur la carte du nomadisme numérique mondial. Le Cap, Johannesburg, Marrakech, Accra, Dakar, Abuja, ou encore Luanda, Libreville, Cotonou figurent parmi les destinations qui suscitent un intérêt croissant sur le continent. Ces villes attirent une nouvelle génération de télétravailleurs en quête d’authenticité, de coûts de la vie plus accessibles et de connexions humaines fortes. Ces villes proposent une connectivité à haut débit stable, de l’électricité, des cadres de travail et d’hébergement selon des standards adaptés, des services de restauration, de transport et sanitaires. En somme un cadre propice à une expérience alliant efficacité professionnelle et découverte touristique.
Cette dynamique ne concerne pas seulement les étrangers. Une partie croissante de la jeunesse africaine, notamment dans les secteurs du digital (développement web, design, community management, rédaction, etc.), s’éveille, elle aussi, à un mode de vie itinérant, souvent à l’intérieur du continent. Ce nomadisme intra-africain est soutenu par des destinations qui appliquent une exemption totale ou partielle de visa comme le Sénégal, le Bénin, le Kenya, le Ghana ou encore le Rwanda. Des incitations qui redessinent les cartes de la mobilité professionnelle à l’heure de la transformation numérique.
Des milliards de dollars à capter
Selon Newland Chase, fournisseur mondial de services d'immigration et de visas, 35 millions de nomades numériques recensés dans le monde en 2021 ont contribué à une valeur économique globale de 787 milliards de dollars. Faute d’études détaillées sur les perspectives économiques du nomadisme numérique en Afrique, une estimation basée sur une hypothèse modérée de 500 000 nomades numériques étrangers en Afrique dépensant chacun 1000 $ par mois laisse entrevoir que le continent pourrait générer 6 milliards de dollars de retombées économiques par an. En ciblant seulement 2 % du nombre de nomades numériques identifiés dans le monde par Nomads.com en 2025 (environ 80 millions), soit environ 1,6 million de travailleurs, l'Afrique pourrait capter près de 20 milliards de dollars annuellement, via les dépenses directes de ces professionnels. Mais au-delà de cette consommation immédiate, le nomadisme numérique constitue un levier de croissance pour de nombreux secteurs économiques comme l’immobilier locatif de court terme, la restauration et l’hôtellerie, les services Internet, les transports locaux, l’économie des loisirs (randonnées et autres activités sportives ou touristiques). Un potentiel qui pourrait profiter à des milliers de petites entreprises locales, notamment dans les zones urbaines.
Des initiatives rares, mais prometteuses
Quelques pays africains ont commencé à structurer leur offre pour les travailleurs nomades. En 2020, l’île Maurice a lancé son visa Premium. Les ressortissants de 114 pays y sont éligibles. Le visa est gratuit et valide pour un an renouvelable. Pour l'obtenir, le demandeur doit impérativement prouver que son activité principale et/ou la source de ses revenus se situent en dehors de l'île, afin de ne pas intégrer le marché du travail local. Il doit justifier d’un revenu mensuel d’au moins 1500 dollars.
Pour le Cap-Vert qui a fait du numérique et du tourisme des leviers de croissance économique, le visa pour nomade numérique a été lancé en 2020. Il est valide pour une période de six mois renouvelable. Il est payant. Les nomades numériques au Cap-Vert sont exonérés de l'impôt sur le revenu et de toute autre taxe locale. Le pays n’impose pas de salaire minimum, mais le demandeur de visa doit justifier d’un revenu. Il doit présenter un solde bancaire moyen minimum de 1500 € au cours des six derniers mois précédant la demande de visa.
En 2024, l’Afrique du Sud a adopté le visa de nomade numérique. Il permet à son titulaire de résider sur le territoire pour une durée allant de trois mois à trois ans. Le demandeur doit apporter la preuve sous la forme de relevés bancaires de trois mois qu’il gagne un salaire brut annuel d'au moins 650 796 rands (36 782 dollars).
D’autres pays comme la Namibie ou le Kenya ont également adopté le visa de nomade numérique en 2024 pour attirer des talents internationaux et stimuler l’économie locale. Mais l’Afrique reste à la traîne par rapport à d’autres régions comme l’Amérique latine ou l’Asie du Sud-Est, qui ont compris l’intérêt de proposer des visas pour nomades numériques, des hubs technologiques, des exonérations fiscales, ou des services spécialisés.
Défis à relever
L’Afrique a du potentiel pour capitaliser sur le nomadisme numérique. Le continent affiche un taux de couverture haut débit élevé. Il est de 71% pour la 4G selon l’Union internationale des télécommunications (UIT) et de 86% pour la 3G. La 5G ne représente encore que 11% de la couverture réseau du continent. Dans la zone urbaine, le taux de couverture 4G est de 73% pour la 4G et de 2% pour la 3G. La 5G couvre déjà 25% de la zone urbaine africaine. Elle est disponible dans les capitales des pays comme l’Afrique du Sud, Sénégal, Maurice, Nigeria, Botswana, Ethiopie ou encore Seychelles, Tunisie, Lesotho. En zone rurale, la couverture de la 4G atteint 49% contre 26% pour la 3G et 14% pour la 2G. Si les grandes villes disposent généralement d’un accès Internet fiable, ce n’est pas encore le cas dans de nombreuses régions secondaires.
Pour ce qui est du prix du forfait Internet mobile le plus accessible du marché (2GB), il représente 3,9% du revenu national brut mensuel (RNB) par habitant contre 13,4% du RNB pour l’internet fixe (5GB). Ces tarifs sont jugés élevés, car ils dépassent le seuil des 2% du RNB recommandé par la Commission du haut débit pour le développement durable des Nations unies. A l’échelle mondiale, le prix moyen du forfait Internet mobile le plus accessible du marché représente près de 1% du RNB contre près de 2,3% du RNB pour l’Internet fixe.
A ces défis, s’ajoutent des questions de stabilité politique et de sécurité. Les risques d’instabilité dans certaines zones freinent les visiteurs, même si celles-ci sont minoritaires à l’échelle du continent. L’absence de statut clair pour les travailleurs nomades réduit également l’attrait des destinations africaines. Les visas touristiques ne sont pas adaptés à des séjours de longue durée et n’offrent pas les mêmes incitations. Cela suppose qu’il faut intégrer le nomadisme numérique dans les politiques publiques du tourisme, de l’entrepreneuriat et de l’emploi des jeunes et adopter les politiques à cet effet.
Le nomadisme numérique n’est pas qu’un phénomène de mode ou réservé à une élite occidentale. C’est une mutation profonde du travail mondial, dans laquelle l’Afrique peut jouer un rôle de premier plan, à condition d’anticiper, d’investir et d’innover.
Muriel Edjo
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Les autorités capverdiennes ambitionnent d’augmenter la part du numérique dans le PIB, actuellement estimée à environ 5 %. Pour atteindre cet objectif, elles multiplient les initiatives de coopération internationale. En juin dernier, le pays a discuté de coopération renforcée avec le Portugal.
Le gouvernement capverdien explore un partenariat avec la Corée du Sud dans le domaine de la transformation numérique. À cet effet, une délégation conduite par la Direction générale des télécommunications et de l’économie numérique a récemment effectué une mission technique dans le pays asiatique.
Dans un communiqué publié le lundi 7 juillet, le ministère de l’Économie numérique a expliqué que les discussions entre les deux parties ont notamment porté sur « comment la gouvernance intégrée des données, la numérisation des services publics et la cybersécurité peuvent renforcer la confiance des citoyens, stimuler l’économie numérique et améliorer l’efficacité de l’État ».
Cette initiative s’inscrit dans la volonté des autorités capverdiennes de faire du numérique un pilier du développement socio-économique au cours des prochaines années. Dans une récente interview avec l'Agence Ecofin, Pedro Lopes, Secrétaire d’État à l’Économie numérique, expliquait par exemple que le numérique peut accélérer la transformation de l’économie malgré les ressources naturelles limitées. « Nous modernisons aussi le tourisme, l’économie bleue et l’agriculture via des solutions numériques, et nous soutenons nos jeunes pour qu’ils créent des start-up compétitives à l’échelle mondiale », avait-il déclaré.
La Corée du Sud apparaît comme un allié pour atteindre ces objectifs. En effet, le pays est considéré par l’Union internationale des télécommunications (UIT) comme un des modèles à suivre au plan mondial en matière de cybersécurité. En ce qui concerne la transformation numérique, le pays est classé quatrième mondial par les Nations unies en 2024 à l’indice de développement de l’e-gouvernement (EGDI), avec un score de 0,9679 sur 1.
À l’EGDI, le Cap-Vert occupe la 111e place mondiale, avec un score de 0,6238 sur 1. Ce résultat est supérieur à la moyenne de l’Afrique de l’Ouest, mais reste légèrement en dessous de la moyenne mondiale, qui s’établit à 0,6382. En matière de cybersécurité, le pays figure dans la quatrième catégorie sur cinq, selon le « Global Cybersecurity Index » de l’UIT. Il affiche de bons résultats sur le plan réglementaire, mais doit encore renforcer ses dispositifs techniques et organisationnels, améliorer la coopération internationale et investir dans le développement des compétences humaines.
Il convient toutefois de rappeler que les discussions entre la Corée du Sud et le Cap-Vert n’en sont qu’à leur début. Si les autorités capverdiennes affirment avoir identifié des opportunités concrètes de collaboration future, aucun accord formel n’a encore été signé ni annoncé. Il faudra donc attendre de futurs développements pour évaluer si ce rapprochement débouchera sur un véritable partenariat et mesurer l’impact potentiel.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Le gouvernement camerounais veut faire de l’intelligence artificielle un levier clé de sa transformation numérique. Il adopte une feuille de route ambitieuse pour structurer ce secteur stratégique et en tirer pleinement profit dans tous les pans de l’économie.
La ministre des Postes et Télécommunications, Minette Libom Li Likeng, a dévoilé ce lundi 7 juillet la Stratégie nationale d’intelligence artificielle (SNIA) du Cameroun à l’occasion de la 2e édition des Concertations nationales sur l’IA. Portée par une vision à l’horizon 2040, cette stratégie ambitionne de faire du pays un hub continental en matière d’IA, en misant sur des solutions souveraines, inclusives et durables, ancrées dans les réalités culturelles africaines.
Une vision ambitieuse portée par des objectifs chiffrés
La SNIA entend faire du Cameroun « le hub de référence en intelligence artificielle en Afrique » en misant sur des solutions ancrées dans les valeurs africaines. Parmi les objectifs fixés : former 60 000 talents (dont 40 % de femmes), créer 12 000 emplois directs, faire contribuer l’IA à hauteur de 0,8 à 1,2 % du PIB, et développer 12 solutions IA souveraines à fort impact. Une attention particulière est portée à la diversité linguistique avec la conception de modèles multilingues intégrant les langues nationales.
Sept piliers structurants pour concrétiser la stratégie
Le document stratégique repose sur sept piliers interdépendants. Le premier est celui de la gouvernance et de la souveraineté numérique, avec la création d’une autorité camerounaise de l’IA, d’un Conseil présidentiel pour l’IA et l’élaboration d’une loi-cadre intégrant les enjeux éthiques et les mécanismes de coordination ministérielle. Le deuxième pilier concerne les données et l’infrastructure numérique. Il prévoit la mise en place d’un Data Lake gouvernemental, la numérisation massive des services publics, des normes d’interopérabilité et une politique ciblée d’Open Data.
Le troisième pilier est axé sur une IA multilingue et inclusive, à travers le développement d’un modèle de langage local – le « GPT Cameroun » – et la valorisation des langues nationales par la recherche linguistique et la collecte de données vocales. Le quatrième pilier porte sur l’infrastructure technologique souveraine, avec l’installation de quinze nœuds régionaux d’Edge Computing, alimentés par des micro-réseaux solaires pour renforcer la résilience énergétique.
Le cinquième pilier est dédié à la formation, la recherche et le capital humain, avec la création de cinq centres d’excellence en IA, un objectif de 4000 personnes formées par an, un programme de retour des talents de la diaspora et un soutien accru à la recherche locale. Le sixième pilier, consacré à l’innovation et aux cas d’usage sectoriels, vise à stimuler les start-up à travers des accélérateurs et à promouvoir l’adoption de l’IA dans des domaines clés tels que la santé, l’agriculture, la justice ou encore l’éducation.
Enfin, le septième pilier met l’accent sur la coopération et le rayonnement régional, à travers la création d’un réseau IA pour l’Afrique centrale, le renforcement des partenariats internationaux et l’exportation de solutions numériques « Made in Cameroon ».
Un positionnement à améliorer selon le FMI
Selon l’AI Preparedness Index 2024 publié par le Fonds monétaire international (FMI), le Cameroun obtient un score de 0,34 sur 1, le plaçant dans la moitié inférieure du classement mondial. Le pays reste en retrait sur les infrastructures numériques et l’innovation, mais dispose d’un potentiel intéressant en matière de capital humain. La stratégie nationale entend justement combler ces lacunes en accélérant la mise à niveau réglementaire et en favorisant l’adoption de l’IA dans les services publics.
Avec cette feuille de route, le Cameroun espère s’ancrer dans la dynamique continentale de transformation numérique et tirer pleinement parti des technologies émergentes pour soutenir son développement socio-économique.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Les autorités burkinabè considèrent les technologies de l’information et de la communication comme un levier essentiel du développement socio-économique. À l’instar de nombreux autres pays africains, elles misent sur la coopération internationale pour atteindre leurs objectifs.
Le gouvernement burkinabè explore des pistes de coopération renforcée avec les États-Unis d’Amérique dans le secteur du numérique. La question était au cœur des discussions la semaine dernière lors d’une rencontre entre Aminata Zerbo/Sabane (photo, à drote), ministre de la Transition digitale, et Joann Lockard (photo, à gauche), ambassadrice des USA au Burkina Faso.
« Le gouvernement du Burkina Faso mène beaucoup d’actions pour soutenir la transition digitale. L'expérience américaine peut être d’un grand apport pour réussir cette transition, notamment dans les domaines de la cybersécurité et du contrôle des données pour protéger les citoyens », a déclaré la diplomate américaine. Elle s’est dite convaincue du potentiel des entreprises américaines dans le secteur du numérique et de leur capacité à accompagner les autorités burkinabè dans leurs projets.
Parmi les projets phares annoncés pour 2025 figurent la finalisation des travaux des data centers, dont l’avancement atteint déjà 70 %, ainsi que l’extension de la couverture des zones blanches à au moins 500 localités supplémentaires. Le ministère prévoit également de renforcer la dématérialisation des services administratifs, de mener un enrôlement massif des populations dans le cadre de l’identification unique électronique et de lancer les travaux du Projet d’accélération de la transformation numérique, dont le budget est estimé à 150 millions de dollars.
Si aucune entreprise spécifique n’a encore été citée dans le cadre de ce rapprochement, ces projets pourraient offrir des opportunités concrètes à plusieurs acteurs américains déjà présents sur le continent. Dans le domaine de l’extension de la couverture réseau, on peut notamment citer American Tower, fournisseur d’infrastructures télécoms, ou encore Starlink pour l’accès Internet par satellite. D’autres entreprises spécialisées dans la transformation numérique, telles que Microsoft, Oracle, Amazon Web Services (AWS), Cybastion ou Cisco, pourraient également s’inscrire dans cette dynamique.
Par ailleurs, les États-Unis figurent parmi les pays les plus avancés en matière de gouvernance numérique. Selon les Nations unies, ils occupent le 19e rang mondial à l’indice de développement de l’e-gouvernement (EGDI) avec un score de 0,9195 sur 1. En matière de cybersécurité, le pays est classé parmi les exemples à suivre par l’Union internationale des télécommunications (UIT), dans son Global Cybersecurity Index 2024. Sur l’indice de développement des TIC en 2025, les États-Unis affichent un score de 97,4 sur 100.
À titre de comparaison, le Burkina Faso se classe 175e mondial à l’EGDI avec un score de 0,2895, bien en dessous de la moyenne mondiale (0,6382). Sur le plan de la cybersécurité, le pays se situe dans la troisième catégorie sur cinq, avec des efforts à poursuivre, notamment pour renforcer les capacités techniques et développer le capital humain.
Il convient toutefois de rappeler que les échanges entre les deux parties n’en sont, pour l’instant, qu’au stade des discussions. Aucun accord n’a encore été signé ni même annoncé officiellement. Il conviendra donc de suivre l’évolution des pourparlers pour évaluer les perspectives concrètes de partenariat et l’engagement effectif des entreprises américaines dans la transformation numérique du Burkina Faso.
Isaac K. Kassouwi
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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Déterminé à faire du numérique un levier de développement et de souveraineté technologique, le Maroc multiplie les initiatives pour former ses talents. La création d’une école d’ingénieurs dédiée à la transition numérique et à l’intelligence artificielle s’inscrit dans cette ambition.
La ministre de la Transition numérique et de la Réforme de l’administration, Amal El Fallah Seghrouchni (photo, à gauche), a signé le vendredi 4 juillet une convention de partenariat avec le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, Azzedine El Midaoui (photo, à droite), et André Azoulay (photo, au centre), président de la Fondation de recherche, de développement et d’innovation en sciences et ingénierie (FRDISI). Cet accord tripartite porte sur la création de l’École supérieure d’ingénieurs en transition numérique et intelligence artificielle, ainsi que sur le lancement de formations spécialisées dans ces domaines.
Selon le communiqué du ministère chargé du numérique, l’initiative vise à rapprocher l’offre de formation des réalités du terrain, en alignant les parcours académiques sur les besoins des territoires et du tissu économique, ainsi que sur les priorités du développement technologique national.
Le projet s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale « Digital Morocco 2030 » qui vise à former 100 000 jeunes par an d’ici 2030 et à créer 240 000 emplois dans le numérique. Elle fait également suite aux Assises nationales de l’IA tenues la semaine dernière à Salé, où neuf accords ont été signés avec des acteurs publics et privés. Ces Assises ont souligné la nécessité de former les forces vives et d’élaborer une feuille de route nationale pour un usage éthique et responsable de l’IA.
Avec cette école, le Maroc entend former des ingénieurs capables de concevoir et de déployer des solutions numériques innovantes, que ce soit dans les services publics, la santé, l’industrie ou l’éducation. L’objectif est double : répondre aux défis internes tout en préparant les jeunes aux métiers de demain.
Au-delà de la formation, le projet ambitionne aussi de renforcer la souveraineté numérique du pays, de stimuler l’innovation et de positionner le Maroc comme un pôle d’attractivité pour les start-up technologiques et les centres de Recherche et Développement (R&D) régionaux.
Samira Njoya
Edité par Sèna D. B. de Sodji
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En 2023, le groupe Orange a lancé Lead the future, un nouveau modèle d’entreprise guidé par la responsabilité et l’efficacité. Une dynamique qui redéfinit les frontières entre performance économique et impact social, et dont les retombées visibles se multiplient au fil des ans dans ses différents marchés, notamment en Afrique.
Le 5 juin 2025, Orange Afrique et Moyen-Orient (OMEA) a célébré le premier anniversaire d’Orange Engage for Change, son programme d’initiatives sociales et environnementales visant à valoriser les actions à impact positif d’OMEA tout en donnant l’opportunité à ses salariés de s’engager concrètement et d’avoir un impact positif direct au bénéfice des populations et des territoires. Ce programme innovant, qui valorise les initiatives d’OMEA via la Fondation Orange, les Orange Digital Centers, les Villages Orange et d’autres projets, a été déployé simultanément dans ses 17 marchés. Une première sur le continent. L’initiative pionnière qui mobilise chaque salarié autour des enjeux sociétaux et environnementaux majeurs des territoires dans lesquels le groupe est implanté, a ainsi vu la participation de 5676 salariés depuis son lancement en 2024 soit près d’un tiers de son effectif total. Ils ont pris part à des actions du groupe sur le terrain en partageant leurs expériences, compétences et soutien dans les domaines de l’éducation, du numérique, de l’environnement et de la solidarité sociale. Chaque collaborateur d’OMEA a consacré trois jours de travail par an, octroyés par son entité, à des missions solidaires regroupées dans plus de 280 opportunités d’engagement, recensées sur la plateforme https://engageforchange.orange.com/fr, dédiée au programme.
Lors du lancement du programme en 2024, Asma Ennaifer, Directrice Exécutive RSE, ODC et de la Communication d’Orange Middle East and Africa, expliquait qu’Orange Engage for Change est née de la volonté de « fédérer nos équipes autour de valeurs partagées. Chaque initiative, chaque action menée par nos salariés témoigne de notre capacité collective à apporter des changements significatifs ».
Le secteur de l’éducation a été le plus dynamique avec 123 opportunités d’engagements proposées aux collaborateurs dont 54 pour l’acquisition de compétences numériques. Sur l’investissement d’OMEA dans le développement des compétences en particulier, la société télécoms estime que « l’inclusion numérique est l’un des leviers d’action les plus puissants pour réduire les inégalités et renforcer l’autonomie des individus. Chez Orange, nous sommes convaincus que le numérique doit être un facteur d’égalité des chances, pas de fracture. C’est pourquoi nous avons intégré cette priorité au cœur d’Orange Engage for Change, notre programme d’engagement solidaire. Agir pour l’inclusion numérique, c’est agir concrètement pour un progrès partagé et durable, en phase avec notre mission d’opérateur responsable ». Le domaine de l’environnement quant à lui a proposé 53 opportunités d’engagement pour les salariés d’Orange en Afrique et au Moyen-Orient.
Des initiatives locales, un impact global
Le succès que rencontre le programme Orange Engage for Change repose en grande partie sur son ancrage local. Les missions d’Orange proposées sont en lien avec les besoins identifiés par les filiales et les Organisations non gouvernementales (ONG) partenaires, assurant une pertinence maximale. En Côte d’Ivoire, 150 volontaires ont contribué, en collaboration avec un partenaire local, à reboiser 30 hectares dans la forêt d’Azaguié. Au Mali, 350 volontaires ont planté 1000 arbres et contribué à la mise en œuvre d’actions pour créer un parc urbain dédié aux enfants. A Madagascar, 240 volontaires ont contribué à une opération de sensibilisation sur la lutte contre le réchauffement climatique auprès de 1200 élèves dans chacune des 24 zones du pays. Au total, les actions menées couvrent un large éventail de domaines — éducation, culture, inclusion numérique, environnement, santé — reflétant la richesse et la portée des engagements proposés. Cette diversité d’actions s’inscrit dans une vision plus large : faire du numérique un levier d’inclusion, mais aussi promouvoir une responsabilité sociétale à tous les niveaux.
Des millions de vies touchées
Les actions sociales d’Orange à travers l’Afrique et le Moyen-Orient, sur une année, ont eu un impact direct ou indirect sur la vie de plus de 18 millions de personnes. A travers plusieurs centaines de missions, des milliers d’enfants et de jeunes ont participé à des sessions de codage au sein du réseau Orange Digital Centers, des porteurs de projets ont vu leurs compétences développées lors de sessions de mentorat, des centaines de femmes rurales ont assisté à des ateliers de formations à diverses compétences dans les maisons digitales. Des opérations d’assainissement urbain comme le ramassage d’ordures, curage de caniveau, recyclage de déchets électroniques, construction de toilettes modernes dans des écoles, installation de points d’eau potable dans des communautés, remises de médicaments dans les centres de détention, etc. ont été exécutées.
En République démocratique du Congo par exemple l’hôpital général de référence Kisenso à Kinshasa, s’est vu doter d’équipements de stockage d’eau et d’énergie électrique pour améliorer le cadre de travail des soignants et de prises en charge des malades. En Guinée, au Sénégal, au Burkina Faso ou encore au Cameroun, des kits numériques ont été offerts à diverses écoles de localités rurales ou défavorisées afin d’améliorer l’accès des jeunes apprenants à des ressources pédagogiques plus riches. Au Botswana, à Madagascar ou encore en Guinée- Bissau, plusieurs initiatives ont été menées dans les Maisons Digitales pour développer les compétences des femmes dans l’entrepreneuriat et renforcer leur autonomie.
Hélène Ndogmo, ménagère et membre de l’association des veuves de Douala 5ème, fait partie de celles qui ont découvert l’artisanat numérique grâce aux ateliers organisés par Orange Cameroun. Elle a appris à concevoir des créations via un logiciel de dessin, à les fabriquer avec une machine à découpe laser. « Je suis très fière de cette formation. Avant, quand je voyais les ordinateurs, je me disais que ce n’était que pour les grands étudiants alors que c’étaient aussi pour des mamans âgées comme moi », explique-t-elle.
En République centrafricaine, Noelle Jessica Gandou, élève de terminale G2 au lycée Technique de Bangui, est l’une des bénéficiaires de l'opération d'assainissement menée par une équipe d'Orange Centrafrique. Suite à cette opération qui s’est traduit par le ramassage des déchets papier et plastique abandonnés, le défrichage et l’entretien des espaces verts, l’assainissement des lieux pour lutter contre le paludisme et les insectes nuisibles, l’adolescente a exprimé sa satisfaction de voir « notre terrain de jeu propre et notre aire de rassemblement embellie par des fleurs, qui offriront une vue magnifique dans quelques mois ».
Des collaborateurs transformés
L’un des effets attendus de ce programme réside dans la transformation observée chez les collaborateurs eux-mêmes. Participer à des missions de terrain leur a permis de développer un nouveau regard sur leur rôle au sein de l’entreprise et de renforcer leur sentiment d’utilité sociale.
Jacqueline Diomandé, acheteuse chez Orange Côte d’Ivoire, juge le programme Orange Engage for Change nécessaire. « C’est une très belle initiative. Ce n’est pas évident pour nous qui sommes au bureau cinq jours sur sept de trouver le temps de sortir et de rendre service à l’humanité que nous-mêmes nous contribuons à détruire à travers nos usages quotidiens », explique-t-elle.
A Madagascar où 563 collaborateurs se sont engagés, Domoina Randriamananoro, Chargé PMO logistique Technique, s’est mobilisée avec d’autres collègues dans la préparation et la remise de paniers aux enfants dans les hôpitaux. Son action, elle l’a justifiée par son envie de se « faire plaisir en aidant et en étant solidaire en même temps. Le plaisir de donner et de recevoir une satisfaction en retour. Les actions humanitaires menées par notre entreprise sont diverses et variées. Je suis fière de pouvoir apporter ma petite contribution en rendant service et de m’associer avec des personnes qui partagent les mêmes valeurs ».
Prisca Mihanta Randrianarisoa, chef de publicité, également à Orange Madagascar, a participé à une initiation à une éducation numérique pour les élèves de l’école publique d'Ambohidratrimo. « Je leur ai appris à utiliser des tablettes, ce qui est bénéfique pour leurs études et les prépare pour leur futur », s’est-elle réjoui.
« Participer à la reforestation a été une expérience unique. Cela renforce le lien entre collègues et notre engagement envers l’environnement. », a déclaré quant à lui Omar Al-Majali, d’Orange Jordanie
Vers une montée en puissance du programme
Fort du succès de cette deuxième édition, Orange prévoit de renforcer et d'élargir le programme. L'objectif est de mobiliser un salarié sur deux dans Orange Engage for Change, pour une implication accrue de l’ensemble des équipes dans des actions à fort impact sociétal. Avec son nouveau programme d’action sociale, OMEA ne se limite plus à soutenir des causes : il implique activement ses collaborateurs dans une démarche de transformation sociale. Ce modèle repose sur la conviction que les grandes entreprises ont un rôle essentiel à jouer dans la construction de sociétés plus justes et résilientes. Cependant, l’un des grands défis de ce déploiement d’envergure d’OMEA sera de garantir que les projets soutenus continuent à porter leurs fruits après l’intervention de ses collaborateurs.
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